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Le Lis et le Lion

Le Lis et le Lion

Titel: Le Lis et le Lion
Autoren: Maurice Druon
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s’y rendre lui-même, car c’était ici, à Paris, qu’allaient se
produire les événements importants. Guillaume le Bon ne souhaitait-il pas
depuis longtemps que la terre de Blaton, patrimoine de la couronne de France,
enclavée dans ses États, lui fût cédée ? On lui donnerait Blaton, pour
presque rien, un rachat symbolique, si Philippe occupait la régence.
    Quant à Guy de Blois, il était l’un
des derniers barons à avoir conservé le droit de battre monnaie.
Malheureusement, et malgré ce droit, il manquait d’argent, et les dettes
l’étranglaient.
    — Guy, mon aimé parent, ton
droit de battage te sera racheté. Ce sera notre premier soin.
    Robert, en peu de jours, avait
accompli un solide travail.
    — Tu vois, Philippe, tu vois,
disait-il à son candidat, combien les mariages arrangés par ton père nous
aident à présent. On dit qu’abondance de filles est grand-peine pour les
familles ; ce sage homme, que Dieu l’ait en sa garde, a bien su se servir
de toutes tes sœurs.
    — Oui, mais il faudra achever
de payer les dots, répondait Philippe. Plusieurs n’ont été versées qu’au quart…
    — À commencer par celle de la
chère Jeanne, mon épouse, rappelait Robert d’Artois. Mais dès lors que nous
aurons tout pouvoir sur le Trésor…
    Plus difficile à rallier fut le
comte de Flandre, Louis de Crécy et de Nevers. Car lui n’était pas un
beau-frère et demandait autre chose qu’une terre ou de l’argent. Il voulait la
reconquête de son comté dont ses sujets l’avaient chassé. Pour le convaincre,
il fallut lui promettre une guerre.
    — Louis, mon cousin, Flandre
vous sera rendue, et par les armes, nous vous en faisons serment !
    Là-dessus, Robert, qui pensait à
tout, de courir de nouveau à Vincennes pour presser Charles IV de parfaire
son testament.
    Charles n’était plus qu’une ombre de
roi, crachant ce qui lui restait de poumons.
    Or, tout moribond qu’il fût, il se
souvint à ce moment-là du projet de croisade que son oncle Charles de Valois
lui avait naguère mis en tête. Projet d’année en année différé ; les
subsides de l’Église avaient été employés à d’autres fins ; et puis
Charles de Valois était mort… Dans le mal qui le détruisait, Charles IV ne
devait-il pas reconnaître un châtiment pour cette promesse non tenue, ce vœu
non accompli ? Le sang de poitrine dont il tachait ses draps lui rappelait
la croix rouge qu’il n’avait pas cousue sur son manteau.
    Alors, dans l’espérance d’amadouer
le Ciel et de négocier quelque survie, il fit ajouter à son testament ses
volontés concernant la Terre sainte… « Car mon intention est d’y aller
de mon vivant , dicta-t-il, et, si de mon vivant ne se peut, que
cinquante mille livres soient données au premier passage général qui se
fera. »
    On ne lui en demandait pas tant, ni
de grever d’une semblable hypothèque la fortune royale dont on avait besoin
pour de plus pressants usages. Robert enrageait. Ce niais de Charles, jusqu’au
bout, aurait de ces sots entêtements !
    On lui demandait simplement de
léguer trois mille livres au chancelier Jean de Cherchemont, autant au maréchal
de Trye et à messire Miles de Noyers, président de la Chambre aux Comptes, pour
leurs loyaux services rendus à la couronne… et parce que leurs fonctions les
faisaient siéger de droit au Conseil des pairs.
    — Et le connétable ?
murmura le roi agonisant.
    Robert haussa les épaules. Le
connétable Gaucher de Châtillon avait soixante-dix-huit ans, il était sourd
comme une marmite, et possédait des biens à ne savoir qu’en faire. Ce n’était
pas à son âge que se développait l’appétit de l’or ! On raya le
connétable.
    En revanche, Robert, avec beaucoup
d’attention, aida Charles IV à composer la liste des exécuteurs
testamentaires, car cette liste constituait comme un ordre de préséance parmi
les grands du royaume : le comte Philippe de Valois en tête, le comte
Philippe d’Évreux, et puis lui-même, Robert d’Artois, comte de Beaumont-le-Roger.
    Cela fait, on s’occupa de rallier
les pairs ecclésiastiques.
    Guillaume de Trye, duc-archevêque de
Reims, avait été précepteur de Philippe de Valois ; et puis Robert venait
de faire coucher son frère, le maréchal, sur le testament royal, pour trois
mille livres qu’on sut rendre tintantes. On n’aurait pas de mécomptes de ce
côté-là.
    Le duc-archevêque de Langres était
acquis de longue date aux
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