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Le Lis et le Lion

Le Lis et le Lion

Titel: Le Lis et le Lion
Autoren: Maurice Druon
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entreprenant. Il était marié à la
fille de Marguerite de Bourgogne, Jeanne la Petite comme on continuait de
l’appeler bien qu’elle eût à présent dix-sept ans, et qui avait été écartée de
la succession de France à la mort du Hutin.
    La loi salique, en fait, avait été
inventée à son propos et afin de l’éliminer, ceci d’autant plus aisément que
l’inconduite de sa mère jetait un doute sérieux sur sa légitimité. En
compensation, et pour apaiser la maison de Bourgogne, on avait reconnu à Jeanne
la Petite l’héritage de Navarre. Mais on s’était peu hâté de tenir cette
promesse, et les deux derniers rois de France avaient gardé le titre de roi de
Navarre.
    L’occasion était belle, pour
Philippe d’Évreux, s’il avait ressemblé tant soit peu à son oncle Robert
d’Artois, d’ouvrir là-dessus une énorme chicane, de contester la loi
successorale et de réclamer au nom de sa femme les deux couronnes.
    Mais Robert, usant de son ascendant,
eut vite fait de rouler comme poisson en pâte ce compétiteur possible.
    — Tu auras cette Navarre qui
t’est due, mon bon neveu, aussitôt que mon beau-frère Valois sera régent. J’en
fais une affaire de famille, que j’ai posée en condition à Philippe pour lui
porter mon appui. Roi de Navarre tu vas être ! C’est une couronne qui
n’est pas à dédaigner et que je te conseille, pour ma part, de te mettre au
plus tôt sur la tête, avant qu’on ne te la vienne discuter. Car, parlons bas,
la petite Jeanne, ton épouse, serait mieux assurée de son droit si sa mère
avait eu la cuisse moins folâtre ! Dans cette grande ruée qui va se faire,
il faut te ménager des soutiens : tu as le nôtre. Et ne t’avise pas
d’écouter ton oncle de Bourgogne ; il ne te conduira, pour son propre
service, qu’à commettre des sottises. Philippe régent, fonde-toi
là-dessus !
    Ainsi, moyennent l’abandon définitif
de la Navarre, Philippe de Valois disposait déjà, outre la sienne propre, de
deux voix.
    Louis de Bourbon venait d’être créé
duc quelques semaines auparavant en même temps qu’il avait reçu en apanage le
comté de la Marche [3] .
Il était l’aîné de la famille. Dans le cas d’une trop grande confusion autour
de la régence, sa qualité de petit-fils de Saint Louis pouvait lui servir à
rallier plusieurs suffrages. Sa décision, de toute manière, pèserait sur le
Conseil des pairs. Or ce boiteux était lâche. Entrer en rivalité avec le
puissant parti Valois eût été une entreprise digne d’un homme de plus de
courage. En outre, son fils avait épousé une sœur de Philippe de Valois.
    Robert laissa comprendre à Louis de
Bourbon que plus vite il se rallierait, plus vite lui seraient garantis les
avantages en terres et en titres qu’il avait accumulés au cours du règne
précédent. Trois voix.
    Le duc de Bretagne, à peine arrivé
de Vannes, et ses coffres pas encore déballés, vit Robert d’Artois se dresser
en son hôtel.
    — Nous appuyons Philippe,
n’est-ce pas ? Tu es bien d’accord… Avec Philippe, si pieux, si loyal,
nous sommes certains d’avoir un bon roi… je veux dire un bon régent.
    Jean de Bretagne ne pouvait que se
déclarer pour Philippe de Valois. N’avait-il pas épousé une sœur de Philippe,
Isabelle, morte à l’âge de huit ans il est vrai, mais les liens d’affection
n’en subsistaient pas moins. Robert, pour renforcer sa démarche, avait amené sa
mère, Blanche de Bretagne, consanguine du duc, toute vieille, toute petite,
toute ridée, et parfaitement dénuée de pensée politique, mais qui opinait à
tout ce que voulait son géant de fils. Or Jean de Bretagne s’occupait davantage
des affaires de son duché que de celles de France. Eh bien ! oui,
Philippe, pourquoi pas, puisque tout le monde semblait si empressé à le
désigner !
    Cela devenait en quelque sorte la
campagne des beaux-frères. On appela en renfort Guy de Châtillon, comte de
Blois, qui n’était nullement pair, et même le comte Guillaume de Hainaut,
simplement parce qu’ils avaient épousé deux autres sœurs de Philippe. Le grand
parentage Valois commençait à apparaître déjà comme la vraie famille de France.
    Guillaume de Hainaut mariait en ce
moment sa fille au jeune roi d’Angleterre ; soit, on n’y voyait pas
d’obstacle, et même on y trouverait peut-être un jour des avantages. Mais il
avait été bien avisé de se faire représenter aux noces par son frère Jean
plutôt que de
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