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Si je meurs au combat

Si je meurs au combat

Titel: Si je meurs au combat
Autoren: Tim OBrien
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avez tort, quand il est question de tripes. Tu sais ce que c’est que le courage ? Je vais te le dire. Ça consiste pas à rester le cul sur une chaise et à espérer que tout se passe bien. Le courage, c’est sortir de son trou, être fort, faire preuve de bon sens, faire en sorte que tout se déroule bien comme il faut.
    Il a attrapé son casque et, sans expliquer ce qu’il entendait exactement par « bien comme il faut », il est reparti au mess des officiers.
    Je suis resté là avec une poignée de gars et on s’est mis à parler du commandant Callicles. D’après Bates, il était complètement dingue, et Porter était d’accord, dans le fond, mais ça ne l’empêchait pas d’admirer la parfaite simplicité du bonhomme.
    — Sa manière de faire des grimaces, on n’en fait plus, des comme ça, de nos jours ! L’Allemagne nazie en a produit des pas mauvais dans le genre, bien sûr. Vous vous souvenez de Himmler ? «  Jawohl, was ist richtich ist richtich ! En avant, en avant, on ne va pas se rendre ; sauvez notre Mère Patrie ; ah, désolé – sauvez notre Père Patrie ! » C’est clair, il a du caractère, on a vraiment besoin de types comme le commandant Callicles.
    — Il est cinglé, a grommelé Bates, tout en cirant ses godasses.
    — Bien sûr qu’il est cinglé. C’est ça qui fait la beauté du personnage. Mais fous-le dans les pompes de Himmler ! Essaie un peu d’imaginer ça ! Tu le vois pas ? Fous-lui un monocle. C’est pas génial, ça ? Sieg heil !
    — Non, il fait pitié. Ce type va faire du grabuge, ça va mal tourner, tu vas voir.
    Porter s’y connaissait quand il s’agissait de prendre un ton dramatique.
    — Oh non, Bates, attends, faut reconnaître qu’il a du style, et pour ça, faut faire preuve d’un peu d’imagination. Bon, imagine-moi ça : le commandant Callicles, maintenant, c’est Wehrmeister Hintenberg. «  Guten Tag, Herr Hintenberg, Comment se passe das guerre ? Gut ? Ach, ja ! Aber die Menschen  – l’herbe, die Fräulein, das Haar. Ça va fumer ! »
    — Arrête tes conneries, a fait Bates. Par moments, je l’aime bien, ce mec.
    À minuit, le commandant Callicles est revenu du mess des officiers avec les yeux qui tournaient dans leurs orbites.
    — O’Brien ! Va chercher ton sac à dos, ton fusil, des munitions et une radio. On descend à Tri Binh 4 – on va se faire une petite patrouille, juste toi, moi et un éclaireur vietnamien. On va voir un peu si t’as des couilles.
    Je lui ai répondu que j’étais de service.
    — De service, mon cul ! Qui c’est qui commande ce bataillon ? Allez, en selle, c’est parti.
    — Vous êtes sérieux, chef ? Allez, quoi…
    — Un peu, mon neveu, que j’suis sérieux. Ça fait du bien d’aller sur le terrain. T’as peur ?
    Je lui ai répondu que oui, j’avais peur, et pas qu’un peu.
    — Très bien, qu’il a fait, en faisant un clin d’œil à l’un des gars. Les bons soldats ont toujours peur ; comme ça, ils font pas n’importe quoi et ils se mettent pas à chier dans leur benne quand il commence à y avoir de l’action. Peut-être qu’on va en tuer quelques-uns, les prendre par surprise, hein ? Le vieux commandant Callicles part en vadrouille et il se fait des Charlies, pendant que tout le monde, par ici, tire tranquillement sur son joint en matant des bouquins de cul, ouais, et pendant ce temps, le vieux Callicles, ce vieux soldat, il est là-bas, en train d’embrouiller des Charlies. Demain, il y en a qui vont chier dans leur froc quand ils vont entendre ça, allez, c’est parti.
    Je me suis marré et j’ai jeté un œil sur mes paperasses. Il est allé dans son bureau et Bates a dit qu’on y avait échappé de justesse. C’est là que le commandant Callicles est ressorti avec son gilet pare-balle et qu’il m’a dit de me magner le cul et de foutre un casque.
    On est sorti du périmètre et on a été chercher un éclaireur vietnamien à Nouc Man. Là, on a pris l’autoroute 1, direction Tri Binh 1.
    Sur place, un groupe de la compagnie Delta nous attendait. Callicles s’est allumé un clope et leur a demandé quel était le meilleur itinéraire pour se rendre à Tri Binh 4. Le chef de groupe a pointé son doigt sur une rizière et lui a conseillé de ne pas y aller, parce que les Viêt-congs aimaient bien le coin. Mais Callicles était encore bourré au whisky et au courage, alors il m’a demandé d’allumer la radio et on a commencé à
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