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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand
Autoren: Valerio Manfredi
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ordonna-t-il aux gardes, qui l’emmenèrent de force.
Le médecin ne cessait de pleurer et de supplier le roi d’avoir pitié de lui. Il
continua de le faire une fois conduit dans la cour et plaqué contre un mur.
Mais l’officier cria : « Tirez ! » Et les archers
s’exécutèrent immédiatement.
    Frappé en pleine poitrine, Glaucos
s’effondra sans un gémissement dans une mare de sang et d’urine.
    Alexandre demeura plusieurs jours en
proie au désespoir. Puis il fut soudain pris d’une étrange frénésie : il
avait décidé d’honorer son meilleur ami par les funérailles les plus imposantes
qu’on eût jamais célébrées dans le monde. Il envoya une délégation à l’oracle
d’Ammon, à Siwah, pour demander au dieu s’il pouvait offrir des sacrifices à
Héphestion comme s’il s’agissait d’un héros, puis il intima à l’armée l’ordre
de se diriger vers Babylone et de transporter dans cette ville le corps embaumé
de son ami.
    Malgré leur affection pour
Héphestion, ses compagnons n’approuvaient pas unanimement le choix d’une
manifestation de douleur aussi grandiloquente. Léonnatos ne comprenait pas
pourquoi Alexandre s’était adressé à l’oracle de Siwah.
    « Il est en train de créer la
religion de son nouveau monde, avec ses dieux et ses héros, lui expliqua
Ptolémée. Héphestion est mort, mais Alexandre a décidé qu’il serait le premier
de ces héros, qu’il vivrait dans une dimension mythique. Il a déjà commencé à
nous entraîner dans la légende. Le comprends-tu ? »
    Léonnatos secoua la tête. « Il
est mort d’indigestion : je n’y vois rien d’héroïque.
    — C’est la raison pour laquelle
Alexandre organise une cérémonie funèbre aussi fastueuse. Voilà ce qui restera
dans la mémoire de tous, en fin de compte. La douleur que la mort d’Héphestion
a suscitée chez Alexandre est identique à celle qu’Achille éprouva à la mort de
Patrocle. Peu importe la façon dont Héphestion est mort. La seule chose qui
importe, c’est la façon dont il a vécu : en grand guerrier, en grand ami,
en jeune homme prématurément fauché par le destin. »
    Léonnatos hocha la tête, même s’il
n’était pas certain d’avoir compris ce que Ptolémée entendait dire par ce
discours. Il pensa que Thanatos s’était ménagé une brèche dans la troupe
d’Alexandre, emportant le premier des sept compagnons, et il se demanda qui
serait le suivant.
    Tandis que l’armée marchait vers
Babylone, des devins chaldéens vinrent trouver le roi pour le mettre en
garde : s’il entrait à Babylone, il n’en ressortirait pas vivant, lui
dirent-ils. Alexandre consulta alors Aristandre : « Qu’en
penses-tu ? lui demanda-t-il.
    — Un obstacle pourrait-il
t’empêcher d’accomplir ce que tu as décidé ?
    — Non, répondit le roi.
    — Alors, ne t’arrête pas. De
toute façon, notre destin repose dans les mains des dieux. »
    Ils entrèrent dans la ville au début
du printemps. Alexandre s’installa au palais royal et ordonna à ses hommes de
préparer le bûcher funéraire : une tour de cent quarante coudées de haut,
reposant sur une plate-forme artificielle d’un demi-stade de large.
    Ce projet fut mis en œuvre par son
ingénieur en chef, Diadès de Larissa, et par une armée de charpentiers, de
décorateurs et de sculpteurs. L’admirable construction se dressait sur cinq
étages, elle était ornée de statues qui représentaient des éléphants, des lions
et toutes sortes d’animaux mythologiques, de grands panneaux sculptés où l’on
pouvait admirer des scènes de gigantomachie et de centauromachie. Des torches
colossales recouvertes d’or pur furent placées aux coins de l’édifice. Au
sommet, le catafalque était soutenu par des statues de sirènes grandeur nature.
    Quand l’énorme bûcher fut achevé, le
corps d’Héphestion y fut conduit par les hétairoï de son bataillon, qui le
portèrent sur leurs épaules. Alexandre et ses compagnons le suivirent jusqu’au
pied de la tour. On le hissa au sommet et on le déposa sur le catafalque grâce
à des machines conçues pour l’occasion. Les prêtres attendirent alors que le
soleil ait disparu derrière le fil de l’horizon pour incendier la construction.
Celle-ci fut aussitôt enveloppée dans un tourbillon de flammes, qui dévora les
statues, les panneaux sculptés, les ornements et les riches offrandes votives.
    Alexandre contempla sans broncher ce
spectacle barbare,
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