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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand
Autoren: Valerio Manfredi
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Prologue
    Les quatre mages gravissaient lentement les sentiers qui menaient au
sommet de la Montagne de la lumière. Ils revenaient des quatre points de
l’horizon, avec à l’épaule une besace contenant des bois parfumés qu’ils
destinaient au rite du feu.
    Le mage de l’aurore portait un
manteau de soie rose aux reflets bleus et des sandales en cuir de cerf. Le mage
du couchant avait une veste cramoisie, diaprée d’or, ainsi qu’une longue étole
de soie de mer brodée de semblables couleurs.
    Le mage du midi arborait une tunique
de pourpre semée d’épis d’or et des babouches en peau de serpent. Le dernier
d’entre eux, le mage de la nuit, était vêtu de laine noire, tissée dans la
toison d’agneaux mort-nés et ponctuée d’étoiles d’argent.
    Leur allure, tandis qu’ils
cheminaient, semblait rythmée par une musique qu’ils étaient les seuls à
entendre, et ils approchaient du temple d’un pas égal, parcourant les mêmes
distances. Pourtant, l’un montait une côte pierreuse, l’autre marchait le long
d’un sentier plat, et les deux derniers avançaient sur le lit sablonneux de
fleuves asséchés.
    Ils se présentèrent au même instant
aux quatre entrées de la tour de pierre, alors que l’aube nappait d’une lumière
de perle l’immense désert du haut plateau.
    Ils se saluèrent d’un signe de tête
sous les quatre arcs d’entrée puis gagnèrent l’autel. Le mage de l’aurore
accomplit son rite le premier : il disposa des rameaux de bois de santal
de façon à former un carré ; le mage du midi lui succéda, ajoutant de
biais de petits fagots de brindilles d’acacia fasciculées. Le mage du couchant
amoncela sur cette base du bois de cèdre écorcé, ramassé dans la forêt du mont
Liban. Enfin, le mage de la nuit déposa des branches émondées et vieillies de
chêne du Caucase, un bois frappé par la foudre et séché par le soleil des
montagnes. Tous quatre tirèrent alors de leur besace les silex sacrés et firent
jaillir à l’unisson des étincelles azurées au pied de la petite pyramide,
jusqu’à ce que le feu commence à brûler – faiblement d’abord, puis de plus en
plus fort. Ces langues vermeilles virèrent au bleu, puis au blanc, en tous
points semblables au feu du ciel, au souffle divin d’Ahura-Mazda, dieu de
vérité et de gloire, seigneur du temps et de la vie.
    Seule la voix pure des flammes
murmurait sa mystérieuse poésie à l’intérieur de la grande tour de
pierre : on n’entendait pas même la respiration des quatre hommes,
immobiles au centre de leur immense patrie.
    Ils regardaient comme en extase le
feu sacré lécher la simple architecture de branches disposée sur l’autel de
pierre. Ils fixaient de leurs yeux cette lumière pure et la merveilleuse danse
tandis que montait leur prière pour le peuple et le roi. Le Grand Roi, le Roi
des Rois, qui siégeait si loin, dans la salle somptueuse de son palais, l’immortel
Persépolis, au milieu d’une forêt de colonnes peintes en pourpre et or, veillée
par des taureaux ailés et des lions rampants.
    En cette heure matinale, dans ce
lieu magique et solitaire l’air était parfaitement immobile, et tel devait-il
être afin que le Feu céleste pût adopter les formes et les mouvements de sa
nature divine, qui ne cesse de le pousser vers le haut pour qu’il s’unisse à
l’Empyrée, sa source originelle.
    Mais soudain, une force puissante
souffla sur les flammes et les anéantit. Sous le regard surpris des mages, les
braises se changèrent brusquement en un noir charbon.
    Il n’y eut pas d’autre signe, pas le
moindre son, si ce n’est le cri lointain du faucon qui s’élevait dans le ciel
vide. Aucun mot ne fut échangé. Effarés et frappés par ce triste présage, les
quatre hommes fondirent en pleurs près de l’autel.
    Au même instant, dans un lointain
pays d’Occident, une jeune femme s’approchait en tremblant des chênes d’un
antique sanctuaire, afin de demander une bénédiction pour son fils, qu’elle sentait
pour la première fois tressaillir en son sein. Elle s’appelait Olympias. Quant
au nom de l’enfant, c’est le vent qui le révéla en soufflant impétueusement
dans les branches millénaires et en agitant les feuilles mortes au pied des
troncs gigantesques. Et ce nom était : ALEXANDRE.
     

1
    Olympias s’était rendue au sanctuaire de Dodone en obéissant à une
étrange inspiration, à un présage qui l’avait visitée dans son sommeil
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