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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand
Autoren: Valerio Manfredi
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les lèvres avec
de l’eau de source, dont les servantes ne cessaient de remplir une écuelle en
argent.
    Mais lorsque la douleur s’accrut
encore, la conduisant au seuil de l’évanouissement, Nicomaque intervint. Il
guida les mains de la sage-femme et ordonna à Artémisia de presser le ventre de
la reine, car celle-ci n’avait plus de forces, et l’enfant souffrait.
    Il posa l’oreille contre l’aine
d’Olympias et se rendit compte que les battements du petit cœur ralentissaient.
    « Pousse aussi fort que tu le
peux, lança-t-il à la nourrice. Le bébé doit naître immédiatement. »
    Artémisia appuya de tout son poids
sur la reine, qui, dans un grand cri, accoucha.
    Nicomaque noua le cordon ombilical
avec un fil de lin, puis le coupa aussitôt avec des ciseaux de bronze et
désinfecta la blessure à l’aide de vin pur. L’enfant cria, et le médecin le
confia aux femmes afin qu’elles le lavent et le vêtissent.
    Artémisia fut la première à voir son
visage. Elle le regarda d’un air extasié. « N’est-il pas
merveilleux ? » s’exclama-t-elle en tamponnant ses joues avec un peu
de laine trempée dans de l’huile.
    La sage-femme lui lava la tête, et
lorsqu’elle l’essuya elle ne put retenir un mouvement de stupeur. « Il a
la chevelure d’un enfant de six mois et de beaux reflets dorés. On dirait un
petit Éros. »
    Artémisia était en train de lui
enfiler une minuscule tunique de lin, car Nicomaque s’opposait à la coutume qui
voulait que les bébés fussent étroitement emmaillotés.
    « À ton avis, de quelle couleur
sont ses yeux ? » demanda-t-elle à la sage-femme.
    Celle-ci approcha de son visage une
lampe à huile, à la lumière de laquelle les yeux du bébé s’éclairèrent d’un
reflet irisé. « Je l’ignore, c’est difficile à dire. Tantôt ils semblent
bleus, tantôt ils semblent sombres, presque noirs. Peut-être faut-il mettre en
cause la nature si différente de ses parents… »
    Pendant ce temps, Nicomaque
s’occupait de la reine qui, comme cela arrive souvent aux primipares, saignait.
Redoutant que de telles suites ne se produisent, il avait ordonné qu’on ramasse
de la neige sur les pentes du mont Bermion.
    Il en fit des compresses et les
appliqua sur le ventre d’Olympias. Epuisée, la reine frissonna, mais le médecin
ne se laissa pas attendrir et répéta ces gestes jusqu’à ce que les saignements
cessent.
    Puis, tandis qu’il ôtait son tablier
et se lavait les mains, il abandonna sa patiente aux soins de ses servantes. Il
les autorisa à changer ses draps et à nettoyer sa peau avec des éponges douces,
trempées dans de l’eau de rose, à lui passer une des chemises fraîches qu’elle
rangeait dans son coffre, à étancher sa soif.
    Ce fut Nicomaque qui lui présenta le
petit : « Voici le fils de Philippe, reine. Tu as accouché d’un
magnifique bébé. »
    Enfin, il sortit dans le couloir, où
l’attendait un cavalier de la garde royale en tenue de voyage.
    « Va, cours auprès du roi et
dis-lui que son enfant est né. Dis-lui que c’est un garçon, qu’il est beau,
fort et en bonne santé. »
    Le cavalier jeta son manteau sur ses
épaules, s’empara de sa besace et partit en courant. Au moment où il
disparaissait au bout du couloir, Nicomaque s’écria : « Dis-lui aussi
que la reine se porte bien. »
    L’homme ne s’arrêta pas. Bientôt on
entendit un hennissement dans la cour, puis un galop qui se perdit dans les
rues de la ville endormie.

2
    Artémisia prit le bébé dans ses bras et le déposa sur le lit, à côté de
la reine. Adossée à ses oreillers, Olympias se redressa légèrement pour mieux
le contempler.
    Il était magnifique. Il avait des
lèvres charnues, un visage rose et délicat. Ses cheveux, châtain clair,
étincelaient de reflets dorés, et il avait au milieu du front ce que les
sages-femmes appellent « le coup de langue du veau » : une
touffe de cheveux drus, partagée en deux moitiés.
    Ses yeux paraissaient bleus, mais il
y avait une sorte d’ombre dans son iris gauche, qui lui donnait un aspect plus
ou moins foncé selon que la lumière changeait.
    Olympias le souleva et le serra
contre elle ; elle se mit à le bercer jusqu’à ce qu’il cesse de pleurer,
puis dénuda son sein pour l’allaiter. Alors, Artémisia se pencha vers elle et
lui dit : « Mon enfant, cette tâche revient à la nourrice. Tes seins
risquent de se flétrir. Le roi rentrera bientôt et tu devras
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