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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand
Autoren: Valerio Manfredi
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couloirs, un tintement d’armes
résonnant au sein des corps de garde.
    Quand il apparut sur le seuil de la
chambre, la reine était assise sur une chaise à haut dossier, son corps nu à
peine voilé par une tunique ionienne aux plis très fins. Le parfum des roses de
Piérie flottait dans la chambre et le bébé reposait dans les bras de la
nourrice.
    Deux ordonnances délacèrent les
épaulières de son armure et ôtèrent l’épée de son côté afin que la peau du roi
et celle de son bébé puissent se toucher. Philippe souleva son enfant et le
tint un long moment, appuyant sa petite tête au creux de son épaule. Il sentait
ses lèvres tendres sur le renflement de sa cicatrice, et la chaleur, le parfum
de sa peau de pêche.
    Il ferma les yeux et se figea au
milieu de la chambre silencieuse, oubliant un instant le fracas de la bataille,
le grincement des machines de guerre, le galop furieux des chevaux. Il écoutait
le souffle de son fils.

3
    L’année suivante, Olympias accoucha d’une fillette qui reçut le nom de
Cléopâtre. Elle ressemblait à sa mère, et elle était si jolie que les servantes
ne cessaient de lui changer de robe, comme si elles jouaient à la poupée.
    Alexandre, qui marchait depuis trois
mois, ne fut admis dans la chambre du bébé qu’au bout de plusieurs jours, muni
d’un petit cadeau préparé par la nourrice. Il s’approcha prudemment du berceau
et observa sa petite sœur d’un air curieux, les yeux écarquillés, la tête
penchée sur l’épaule. Aussitôt, une servante surgit, craignant que l’enfant ne
fût pris de jalousie et ne se comportât mal à l’égard de la nouvelle arrivée.
Mais il saisit la main de sa sœur et la serra entre les siennes comme s’il
comprenait qu’un lien étroit les unissait et qu’elle serait longtemps sa seule
compagne.
    Cléopâtre émit un gargouillis et
Artémisia s’écria : « Tu vois ? Elle est très contente de te
connaître. Pourquoi ne lui donnes-tu pas ton cadeau ? »
    Alexandre fit glisser de sa ceinture
un petit cercle de métal garni de clochettes en argent et commença à l’agiter
devant la petite, qui tendit aussitôt les mains pour s’en emparer. Olympias les
regardait avec émotion. « Ne serait-il pas merveilleux de pouvoir arrêter
le temps ? » dit-elle comme si elle pensait à voix haute.
    Après la naissance de ses enfants,
Philippe fut longuement occupé par des guerres incessantes et sanglantes. Il
s’était assuré les frontières du nord grâce aux victoires de Parménion sur les
Illyriens ; il pouvait compter, à l’ouest, sur le royaume ami de l’Épire,
où régnait Arybbas, l’oncle de la reine Olympias ; à l’est, il était venu
à bout des tribus belliqueuses des Thraces au terme de nombreuses campagnes,
étendant ainsi sa domination jusqu’aux rives de l’Istros. Il s’était ensuite
emparé de presque toutes les cités que les Grecs avaient fondées sur ses
côtes : Amphipolis, Méthone, Potidée, et s’était impliqué dans les luttes intestines
qui déchiraient la péninsule hellénique.
    Parménion avait tenté de le mettre
en garde contre une telle politique. Un jour que Philippe avait convoqué le
conseil de guerre dans l’armurerie du palais, le général décida de prendre la
parole.
    « Tu as construit un royaume
puissant et unifié, sire, et tu as rendu les Macédoniens fiers de leur
nation ; pourquoi veux-tu donc te mêler aux luttes qui ne concernent que
les Grecs ?
    — Parménion a raison, intervint
Antipatros. Ces luttes sont absurdes. Tout le monde se bat contre tout le
monde. Les alliés d’hier sont les ennemis d’aujourd’hui, et celui qui est
vaincu s’allie au plus odieux de ses ennemis dans le seul but de s’opposer au
vainqueur.
    — C’est vrai, admit Philippe.
Mais les Grecs possèdent tout ce qui nous fait défaut : l’art, la
philosophie, la poésie, le théâtre, la médecine, la musique, l’architecture et
surtout la science politique, l’art de gouverner.
    — Tu es roi, objecta Parménion,
tu n’as besoin d’aucune science. Il te suffit de donner des ordres, et tout le
monde t’obéit.
    — Tant que j’en ai la force,
souligna Philippe. Tant que personne ne me plonge une lame entre les
côtes. »
    Parménion s’abstint de
répliquer : aucun roi de Macédoine n’était mort dans son lit – il s’en
souvenait très bien. Ce fut Antipatros qui brisa un silence désormais
oppressant.
    « Si tu souhaites vraiment te
jeter
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