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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres
Autoren: Mireille Calmel
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durant, il avait affronté sa houle pernicieuse. Aujourd’hui, il devait la vaincre.
    Mary Read ne l’aimait plus.
    Il comprenait. Il avait entendu son histoire, toute son histoire, acceptant cette fatalité qui avait mis du temps et de la distance entre eux, faisant place à d’autres rêves, d’autres gens. A ce Niklaus qui avait su, comme lui autrefois, prendre la dimension de l’âme de Mary pour la garder. Il ne lui en voulait pas. Il ne leur en voulait pas. C’était ainsi.
    Mais il avait mal. Sans cris, sans pleurs, sans reproches. Mal de s’être confié à Tom, devenu pernicieusement son ami. À son arrivée sur La Perle, celui-ci était douloureusement replié sur lui-même et froid comme une lame. Peu à peu, au fil des mois, Corneille l’avait vu changer, s’ouvrir aux autres, retrouver sourire et chaleur. Tom lui avait finalement appris que, blessé grièvement, il n’avait aucun souvenir de son passé et avait vécu d’expédients jusque-là. Corneille n’avait pas cherché à en savoir davantage. Tom lui avait offert la fraternité que Forbin lui avait enlevée, après qu’il lui eut tout avoué concernant Mary. Leurs caresses, son amour et cette quête qui les avait liés. Corneille n’avait rien caché à son capitaine. Par honnêteté et par respect, espérant que cela ne changerait rien. Il se trompait. Pas plus que lui, Claude de Forbin n’avait oublié Mary Read. Il l’avait laissée partir en le regrettant chaque jour. Que Corneille la lui ait prise l’avait rendu mauvais.
    — Tu m’as trahi ! avait-il explosé. Toi ! Toi, le seul à qui j’aurais confié ma vie !
    Pour unique excuse, Corneille avait répondu, piteusement :
    — L’amour n’a pas de maître, capitaine. Et l’amitié pas de valet.
    Forbin lui avait fait des excuses trois jours après, mais depuis quelque chose s’était brisé. Au lieu de se lamenter ensemble de cette perte irremplaçable, ils s’étaient éloignés l’un et l’autre pour tenter de s’en remettre. Sans y parvenir.
    Tom s’était visiblement servi de cette fêlure pour l’approcher. Corneille savait déjà que s’il pouvait pardonner son silence à Mary, accepter la vie qu’un autre lui avait offerte, il ne pourrait pas admettre cette trahison. Si tant est que Mary ait raison. Tom avait-il subtilisé cette lettre qu’elle lui avait envoyée, ramenant ainsi Tobias Read et Emma sur ses traces ? Il avait du mal à y croire, quoi qu’elle ait pu en dire. Tant d’années avaient passé. Comment pouvait-elle se souvenir d’un visage si peu entrevu ? Elle avait affirmé que c’était à cause de sa cicatrice. Elle était peu commune en effet. Mais avait-elle bien détaillé Tom dans le cabaret ? Mary était certaine de son fait or le temps qu’il avait partagé avec Tom sur La Perle contredisait les actes dont elle l’accusait. Bien sûr Tom était étrange, bien sûr il ne parlait jamais d’avant son embarquement, bien sûr il était anglais, bien sûr, à cause de cette ancienne blessure, il hurlait parfois comme un damné, bien sûr cela le rendait belliqueux et enragé, au point que seul Corneille pouvait l’approcher, bien sûr il aimait se battre et tuer. Mais il n’était pas pire que d’autres matelots.
    Corneille avait demandé à Mary de lui faire confiance. Il avait été difficile de l’en convaincre. Elle avait semblé à tout instant sur le qui-vive. Prête à sortir son poignard pour se défendre. Et même à le tuer. Il comprenait ses doutes, ses craintes. Elle réagissait comme une mère, prompte à lutter pour sa survie, mais plus encore pour la protection de son enfant.
    Elle était brisée par la mort de Niklaus, et tout autant par l’enlèvement de sa fille. Son angoisse transparaissait, à chacun de ses mots, de ses silences, de ses regards baissés. Il l’avait aussi senti dans sa manière de demander pardon d’avoir été si égoïste, d’avoir été si heureuse. Comme si elle avait voulu trouver des excuses à son amitié avec Tom et cesser d’avoir peur de lui. Il ne pouvait en espérer davantage pour l’heure. Elle était trop ravagée.
    Si Tom, même indirectement, en était responsable, Corneille devrait se montrer sans pitié pour pouvoir convaincre Mary de sa sincérité. Il n’avait d’autre recours que prêcher le faux pour savoir le vrai. Cela lui coûterait, indiscutablement, mais il savait déjà en son âme que seule Mary Read lui importerait.
     
    Tandis qu’il discutait
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