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La parade des ombres

La parade des ombres

Titel: La parade des ombres
Autoren: Mireille Calmel
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Mortecouilles, tant que tu y es !
    — La ramène pas, commère, répondit le conducteur peu amène, ou la prochaine fois ça manquera pas d’arriver !
    Il y eut un grognement indigné. L’homme et son chargement s’approchaient de Mary. Elle s’écarta en se glissant dans l’auberge. Un rapide coup d’œil lui indiqua que les deux hommes n’étaient pas dans la salle.
    — Qu’est-ce qu’il y a pour votre service ? demanda l’aubergiste en essuyant ses mains grasses sur son tablier.
    — Je cherche deux hommes, dit-elle sans préambule, l’un se prénomme Corneille. Sais-tu où je peux les trouver ?
    — A l’étage, répondit l’aubergiste sans hésiter. La première chambre pour celui que tu cherches. L’autre, c’est au fond du couloir, dans le dortoir.
    Mary le remercia et gagna l’escalier, armant le chien de son pistolet à peine arrivée sur le palier. Il était désert, à l’inverse de la grande salle du rez-de-chaussée où les clients étaient attablés dans un brouhaha de conversations. La musique des fifres et des tambourins, s’ajoutant aux guitares et aux voix, créait un joyeux raffut dans cet endroit chargé de fumée de tabac.
    Elle se planta devant la porte de Corneille, l’estomac noué. Dans un instant, elle serait fixée.
    Elle toqua à la porte.
    — Fiche-moi la paix, Tom, répondit la voix agacée de Corneille. J’ai pas faim.
    Mary tourna le loquet. Elle ne pouvait s’éterniser dans le corridor au risque de voir l’Homme en noir surgir pour descendre manger, comme laissait supposer la réponse de Corneille. La poignée céda. Corneille n’avait pas fermé à clé. Il était appuyé de sa main valide contre le chambranle de la fenêtre, cherchant une distraction dans la contemplation du spectacle de la rue. Le conducteur du chariot de vin était en pleine altercation avec un autre qui transportait des poulets. Face à face, ils se disputaient violemment pour décider duquel devait reculer.
    Il se retourna en entendant la porte se refermer. La joie qui se peignit sur son visage rasséréna Mary.
    — Morbleu ! s’exclama-t-il, indifférent à l’arme qui le pointait. J’étais sûr que je n’avais pas rêvé, tout à l’heure !
    — Reste à ta place, ordonna-t-elle pourtant tandis qu’il faisait un pas dans sa direction. Beaucoup de temps a passé. Beaucoup de choses sont arrivées.
    Corneille s’immobilisa et la détailla, réalisant soudain sa détermination. Un pincement au cœur amena en lui une bouffée de colère.
    — Je n’ai cessé de t’espérer, lâcha-t-il, amer. Pourquoi n’as-tu rien dit ? Pourquoi m’as-tu quitté ? Pour ton trésor ? Ou pour rejoindre le camp de ton oncle détesté ? Peux-tu seulement imaginer le nombre de questions que je me suis posées. Jusqu’à préférer finalement te penser morte que me croire trahi. Je t’aimais, Mary. A en crever. Et tu es là, devant moi, à me menacer d’un pistolet. Mordiou, est-ce que tu te figures le mal que ça me fait ?
    La douleur inscrite dans ses yeux fit baisser son arme à Mary.
    — Je t’ai écrit, Corneille, murmura-t-elle. Une lettre, il y a quelques mois, pour tout te raconter et te demander de me pardonner.
    — Je n’ai rien reçu.
    — A présent que je te vois, je le crois. Ma lettre a été interceptée et ceux que j’aimais massacrés.
    — Interceptée, répéta Corneille, assommé par cette confidence. Bon sang, Mary, mais par qui ?
    On toqua à la porte. La voix de l’Homme en noir en franchit la barrière :
    — Ramène-toi, vieux frère ! Y a du porcelet et des friponnes pour dîner !
    D’instinct, Mary releva son pistolet, le regard dur et la gorge serrée. Ils s’affrontèrent un instant en silence, puis, étouffant un juron, Corneille hurla à Tom :
    — Laisse-moi cuver !
    — Si tu changes d’idée… grommela l’autre derrière la porte, vexé.
    Corneille et Mary restèrent muets, jusqu’à ce que son pas se fût éloigné.
    — Raconte-moi, implora ensuite Corneille à mi-voix en lui tendant son unique main, aussi tourmenté en cet instant qu’elle-même l’était.
     

3
     
     
    L ’Homme en noir était remonté depuis longtemps et la salle de l’auberge vide lorsque Mary abandonna Corneille à sa colère et à sa douleur.
    Il avait besoin d’être seul. Quelques instants.
    Ce n’était rien de plus qu’une de ces tempêtes qui ébranlent un navire et contre laquelle il fallait lutter pour survivre. Sept années
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