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Satan à St Mary le bow

Satan à St Mary le bow

Titel: Satan à St Mary le bow
Autoren: Paul C. Doherty
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penché au-dessus du feu vif d’un petit brasero, enveloppé de sa cape, Édouard s’efforçait de faire fi du vent glacial qui s’acharnait sur les vantaux de bois. Finalement il se leva et traversa la pièce pour s’assurer qu’ils étaient bien fermés ; il faisait noir dehors, la cité et le fleuve disparaissaient sous d’épaisses brumes, et seuls les gémissements du vent et le hurlement d’un chien dans la rue brisaient l’étrange silence. Le roi frissonna et tressaillit lorsqu’un rat remua la paille jonchée d’herbes odorantes. « Trop de recoins sombres, pensa le roi, que n’atteint pas la pauvre lueur des torches fichées aux murs. »
    — Des ombres partout, murmura-t-il avant de revenir vers le brasero et de repenser aux ombres fantomatiques qui hantaient son âme. D’abord, il y avait son père, Henri, aimant le plaisir et les arts, trop complaisant, ne se souciant que des aises de ses favoris et des siennes propres, Henri à la voix douce, à la peau douce, Henri dont la seule passion avait été la construction de sa précieuse abbaye de Westminster.
    Puis surgissaient d’autres visages plus menaçants ; les Montfort {8} , Simon aux cheveux filasse et ses fils arrogants et agressifs : sourire aux lèvres et traîtrise au coeur. Simon avait été son ami autrefois, Édouard s’était même allié à lui contre son père le roi afin de créer une Communauté du Royaume plus juste, mais le rêve avait tourné au cauchemar — Henri était piètre roi, mais Montfort et les autres barons étaient des tyrans ne pensant qu’à leurs propres intérêts. Simon s’était révélé le pire, lié à des sectes sataniques, aux rites secrets et exécrables que sa famille maudite avait ramenés des provinces opulentes et aimables du midi de la France. Même mort, pensa tristement Édouard, Montfort surgissait de la tombe pour venir le hanter par-delà les années. De fait, le roi se demandait souvent si Montfort était vraiment mort ou s’il était encore vivant, organisant secrètement des sabbats et dirigeant des assassins qui poursuivaient Édouard comme des chiens de meute bien dressés et impitoyables ; Édouard regarda la longue cicatrice blême de sa main droite.
    — Montfort doit être mort ! murmura-t-il vers le brasero. Tué à Evesham il y a longtemps. Le roi contemplait les charbons ardents, les flammes rouges lui rappelant cette journée de folie et de tuerie passée à Evesham une vingtaine d’années auparavant, parmi les prairies verdoyantes et les champs jonchés de pommes. Lui et son armée s’étaient avancés contre Simon, toutes bannières déployées et claquant à la brise. Cette journée d’été avait été brusquement écourtée par un orage soudain qui avait envahi le ciel ; le fracas du tonnerre et des éclairs avait couvert le martèlement sourd de sa cavalerie en armure chargeant la petite troupe des rebelles encerclés. Malgré toutes les batailles qu’il avait livrées, Édouard se souvenait très précisément de cet instant à Evesham où il avait enfoncé les rangs ennemis, l’épée rougie du sang des soldats de Montfort. À la fin Simon était resté seul, debout, en cotte de mailles, enjambant les cadavres de sa garde, et défiant les troupes royales de venir se mesurer à lui. Assis à l’écart, Édouard avait assisté à la fin du chef rebelle. À ce moment-là, l’orage avait subitement cessé et le sang coulant à travers l’armure brisée de Simon avait étincelé sous le pâle soleil comme une cascade de rubis. Ils avaient mis le corps de Simon en pièces. Édouard ressentit un léger frisson d’horreur en repensant à ce qu’il avait ordonné dans l’ardeur de la bataille : jeter les restes déchiquetés de Simon à une meute de lévriers affamés.
    — Oui, murmura Édouard, Simon doit être mort. Le roi regarda la pièce déserte. Si Simon était bien mort, pensa-t-il avec accablement, ses partisans, eux, ne l’étaient pas : ils organisaient des sabbats et complotaient sa mort par le poison, le poignard, l’épée, la masse d’armes ou les flèches, prêts à l’attaquer de jour comme de nuit, en Angleterre ou à l’étranger. À l’étranger ! Édouard contempla les ténèbres. Il se rappelait Saint-Jean-d’Acre en Palestine où, quelque huit ans après sa victoire d’Evesham, la reine Aliénor {9} et lui étaient à la croisade, essayant d’unifier les petites principautés de Terre sainte. Il avait cru que là,
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