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Sang Royal

Sang Royal

Titel: Sang Royal
Autoren: Christopher John Sansom
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avait honte de ses problèmes d’argent. Puis la fièvre s’est emparée de lui. »
    J’avais hoché la tête. Ç’avait été un choc d’apprendre que la ferme où j’avais grandi, et qui désormais m’appartenait, croulait sous les dettes. Mon père allait sur ses soixante-dix ans, et William, son régisseur, n’était guère plus jeune. Ils ne s’étaient pas occupés de leur terre comme ils auraient dû le faire et les dernières moissons avaient été médiocres. Pour s’en sortir, mon père avait hypothéqué son bien auprès d’un riche propriétaire terrien de Lichfield. Je l’avais appris seulement lorsque celui-ci m’avait écrit, tout de suite après l’enterrement, ses doutes pour m’indiquer que la valeur de la terre ne pourrait probablement pas couvrir la dette. Il cherchait à accroître son domaine pour faire paître ses moutons, et accorder des hypothèques aux paysans âgés à un intérêt exorbitant constituait un moyen de mener à bien son projet, à l’instar de maints hobereaux de l’époque.
    « Sir Henry est une vraie sangsue, avais-je dit à Bess avec amertume.
    — Que comptes-tu faire ? Laisser la propriété tomber en faillite ?
    — Non. Je refuse que le nom de ma famille soit déshonoré. Je vais payer sa dette. » Dieu sait que je lui dois ça ! avais-je pensé.
    « C’est bien ! »
    Un bref renâclement poussé derrière mon dos me ramena au présent. Barak avait tiré sur les rênes de Sukey. Je fis halte moi aussi et pivotai avec difficulté sur ma selle. Dans la lumière du jour naissant, la silhouette de mon compagnon et celle des arbres étaient plus nettes désormais. Barak pointait le doigt devant lui.
    « Regardez par là ! »
    En face de nous la forêt devenait moins dense. Au loin, bas dans le ciel, brillait un point lumineux rouge.
    « Nous y sommes ! m’écriai-je d’un ton triomphant. Voilà la lampe qu’on nous a dit de guetter. Elle est placée au sommet du clocher d’une église afin de guider les voyageurs. On est dans la forêt de Galtres, comme je l’avais deviné ! »
    Nous sortîmes du bois. Comme le ciel s’éclaircissait, un vent glacial se leva du fleuve. Nous resserrâmes nos manteaux avant de reprendre notre route vers York.
    La grand-route menant à la ville fourmillait déjà de chevaux de bât, de chariots remplis de vivres de toutes sortes, ainsi que d’énormes charrettes de forestiers, chargées de troncs d’arbres entiers qui dépassaient dangereusement de l’arrière. Devant nous se dressaient les hauts remparts de la ville, noircis par la fumée des siècles passés, tandis qu’au-delà se profilaient les innombrables églises, toutes dominées par l’envolée des deux tours jumelles de York Minster, la cathédrale.
    « C’est aussi animé que Cheapside un jour de marché, fis-je observer.
    — Tout cela pour le grand cortège royal. »
    Nous poursuivîmes lentement notre chemin à travers une foule si compacte qu’on avait du mal à avancer au pas. Je jetais des coups d’œil de biais à mon compagnon. Cela faisait déjà plus d’un an que j’avais engagé Jack Barak comme assistant dans mon cabinet d’avocat, après l’exécution de son ancien maître. Le recrutement de ce gamin des rues de Londres, qui s’était retrouvé agent de Thomas Cromwell chargé de missions suspectes, paraissait incongru, bien qu’il fut intelligent et eût le privilège d’être instruit. Je n’avais d’ailleurs pas regretté mon choix. Il s’était bien adapté au travail et avait mis tout son zèle à apprendre le droit. Personne ne savait mieux que lui dénicher des éléments obscurs et forcer les témoins à s’en tenir aux faits pendant leur déposition sous serment, et sa vision cynique du système constituait un utile contrepoids à mon enthousiasme personnel.
    Ces derniers mois, cependant, Barak m’était souvent apparu d’humeur morose. Il lui arrivait même de redevenir aussi insolent qu’aux premiers temps de notre association. Je craignais qu’il ne s’ennuyât et me dis que le voyage à York l’aiderait peut-être à reprendre le dessus. Or, en bon Londonien qui nourrit force préjugés à l’égard du Nord et de ses habitants, il avait grogné et pesté durant presque tout le trajet. À présent, il jetait un regard suspicieux à l’entour, se méfiant de tout.
    Des maisons commencèrent à apparaître de loin en loin, puis on aperçut sur notre droite un antique et haut mur crénelé.
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