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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes
Autoren: David Camus
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nom pouvait le ramener à la vie : Dodin ! Dodin !
    Morgennes cria, comme autrefois dans les marais de Noir Lac. Dans la grande salle du palais, Dodin fut saisi par des sanglots. Les Templiers l’escortèrent au-dehors. La foule s’interrogeait. Morgennes reprit son récit :
    — Je retirai la mousse du corps de Dodin, mais ce n’était pas suffisant. Il avait pris racine. Que faire ? N’ayant aucune arme sur moi, j’avisai à sa ceinture une dague. Celle-ci. (Il montra la miséricorde.) M’en saisissant, j’entrepris de couper tout ce qui se pouvait couper, tranchant, grattant, prenant bien soin de ne pas toucher les chairs, mais au contraire de les épargner. Après avoir arraché tout ce qu’il avait de végétal, je libérai Dodin – qui me tomba dans les bras. Il respirait à peine. Mais j’avais bon espoir de le sortir vivant de ces marais, car il n’était pas mort. Quelque chose d’humain vivait encore en lui. La preuve, sa bouche s’entrouvrit, laissant échapper un filet de sève, et il me demanda : « Pourquoi ? »
    Morgennes se tut, parut fouiller dans ses souvenirs, et continua :
    — « Pourquoi m’as-tu abandonné ? » me demanda Dodin. Me reconnaissait-il ? Ou bien me prenait-il pour Dieu ? Il me regardait, les yeux à demi ouverts, en bredouillant des paroles incompréhensibles. Parmi celles-ci, je crus distinguer : « Pardon… » Me pardonnait-il ? Ou me demandait-il pardon ? En tout cas, je lui dis : « C’est moi qui te demande pardon, tout comme je pardonne à Dieu, avant d’oublier… » Puis je le soulevai de sa gangue de boue, dont il sortit tout poisseux.
    Morgennes marqua une nouvelle pause, avant de reprendre :
    — Où ai-je trouvé la force de retraverser ces marais ? Je l’ignore. Mais je savais que revenir sur mes pas, à l’endroit où j’avais laissé Gargano et Marie Comnène, était suicidaire.
    — Qu’avez-vous fait ? lança alors Emmanuel, assis jambes croisées, au plus près de Morgennes.
    — Je suis retourné vers Crocodilopolis. J’ai donc retraversé les six cataractes qui séparaient ces marais de l’antique cité des ophites. Ensuite, j’ai volé des chevaux, et j’ai franchi le Sinaï pour regagner la Terre sainte.
    — Menteur ! C’est impossible ! cria un Templier dans la salle.
    Tous se tournèrent vers lui.
    — C’est toi qui as empoisonné Dodin ! C’est à cause de toi qu’il est dans cet état ! Tu paieras !
    — Ça suffit ! coupa le roi. S’il avait fait ce que tu dis, Morgennes n’aurait pas pris la p-p-peine de ramener son corps !
    — Morgennes a peut-être oublié, mais nous, les Templiers, nous n’oublierons pas !
    La foule se mit à le huer. Alors il quitta la salle, suivi par tous les Templiers.
    — Je suis désolé, dit Amaury à Morgennes.
    — Ce n’est rien, dit Morgennes en descendant de scène sous les applaudissements. Je m’y attendais.
    Une fois qu’il eut rejoint la salle, où un formidable banquet était servi, Morgennes dit à Guillaume de Tyr et à Amaury :
    — De toute façon, je vais partir. Je dois aller en Arabie, à la recherche de ma mère. Et puis surtout en France, à la recherche de…
    Il ne termina pas sa phrase. Alors, Amaury lui dit.
    — Avant que tu ne p-p-partes, j’ai quelque chose à te d-d-demander. Une ultime requête !
    — Pour cet enfant, intervint Guillaume de Tyr en caressant les cheveux du petit Baudouin.
    Morgennes s’agenouilla aux pieds du prince et lui demanda :
    — Sur quel sommet dois-je vous emmener cette fois-ci, Majesté ?
    — Je crains que ce ne soit pas aussi facile que d’escalader les p-p-pyramides, dit Amaury.
    — Ni aussi amusant, ajouta Baudouin.
    — Vraiment ? demanda Morgennes.
    — Il y va de sa vie, lui chuchota Guillaume à l’oreille. Voyant l’air grave qu’avaient le roi et son plus proche conseiller, Morgennes se releva et leur dit :
    — J’affronterai la mort pour la lui épargner.

Post-scriptum
    « C’est ici que finit le conte. »
    ( CHRÉTIEN DE TROYES ,
Érec et Énide. )
    Quelqu’un frappa à ma porte.
    — Qui va là ?
    — Gargano ! fit une voix caverneuse.
    Trop surpris pour répondre quoi que ce fût, je manquai tomber à la renverse et me précipitai pour ouvrir la porte de mon scriptorium.
    — Gargano ! C’est bien toi ?
    Le géant m’étreignit à m’étouffer.
    — C’est bon de te revoir, dit-il en me fixant du regard.
    — Entre plutôt !
    Gargano
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