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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus
Autoren: Arlette Cousture
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Non, plutôt une petite fille. Si seulement vous pouviez venir pour les fêtes…
    – Je vais y penser.
    Élisabeth savait qu’il n’en ferait rien. Jerzy termina l’appel sur des anecdotes et raccrocha sans avoir mentionné le nom de Jan.
    Le fœtus s’agrippait toujours et Jan avait retrouvé sa sérénité, le danger étant presque annihilé. Des clients lui avaient vendu lit de bébé, commode et chaise haute. M. Favreau les avaient peints en blanc à la demande de Michelle qui ne voulait ni rose ni bleu.
    – Du jaune. Je voudrais du jaune. C’est aussi joli pour une fille que pour un garçon. Peut-être une petite touche de vert tendre, si vous voulez.
    Michelle avait tricoté une layette complète et M me Favreau avait non seulement installé des tentures jaunes mais aussi cousu des accessoires pour le moïse – blancs à fleurettes jaunes – et des petites décorations en feutrine qu’elle avait fixées autour du plafonnier, essayant de produire l’effet d’un mobile.
    La seule ombre au tableau, au grand désespoir de Michelle, fut un incident avec sa mère. Elle avait eu le malheur de lui raconter la générosité de la clientèle de l’épicerie, qui leur avait vendu le mobilier à prix ridicule et qui ne cessait d’apporter des vêtements de bébé à peine portés. M me Dupuis en avait presque fait une syncope.
    – Voyons donc, ma fille! Tu veux faire porter du linge usagé à notre premier petit-enfant? On dirait que ton mari te fait vivre en pauvresse.
    Michelle avait été tellement froissée et énervée par la réaction de sa mère que Jan avait poliment prié sa belle-mère de rentrer chez elle et de ne revenir que pour aider.
    – Vous connaissez les consignes du médecin, madame Dupuis.
    – Un jeune sans expérience. Michelle en avait un bon jusqu’à ce que vous lui en fassiez changer.
    – Madame Dupuis, Michelle aurait pu perdre le bébé si le docteur Boisvert n’était pas intervenu. Votre médecin devrait se retirer et cultiver des fleurs.
    M me Dupuis avait durement pris la remontrance, protestant que Michelle était sa fille. Michelle avait éclaté en sanglots et Jan, à bout de patience, avait entraîné sa belle-mère jusqu’à la sortie, saisissant son manteau au passage et le lui mettant dans les bras avant de la saluer devant la porte grande ouverte.
    – Je vais parler de ça à mon mari. C’est peut-être votre enfant, mais c’est notre unique fille et ce sera notre petit-enfant.
    – Je sais.
    – Je vais dire à mon mari que vous m’avez mise à la porte.
    – Maman! Si je pouvais me lever, c’est moi qui l’aurais fait.
    – Michelle! Oh non! Vous me l’avez changée. Est-ce que c’est l’habitude des Polonais de manquer de respect à leurs parents?
    Jan était si en colère qu’il blêmit. M me Dupuis comprit et s’esquiva rapidement.
    – Maman va revenir te voir, mon bébé.
    Jan vit Michelle s’enfouir la tête dans l’oreiller et il aurait bien aimé se demander si c’était pour rire ou pour pleurer. Des sanglots lui donnèrent sa réponse.
    Jan s’en voulut tellement d’avoir provoqué une crise de larmes chez sa femme et d’avoir peut-être trop bousculé sa belle-mère qu’il alla s’excuser le soir même. Il ne pouvait espérer changer sa belle-mère, mais il reconnaissait qu’elle faisait de véritables efforts pour être aimable avec lui. Ce fut M. Dupuis qui lui ouvrit et Jan vit, à son air maussade, qu’il était informé de la bisbille. Il lui tendit la main en lui disant qu’il était venu faire des excuses. M. Dupuis les accepta sans se faire prier – pour la première fois depuis qu’il le connaissait, Jan sentit une complicité d’homme – et indiqua à Jan que sa femme était au salon. M me Dupuis était assise devant un landau magnifique couvert d’une moustiquaire de gaze, qu’elle poussait et tirait comme si elle essayait d’endormir un poupon. Jan fondit et s’approcha d’elle doucement.
    – Pensez-vous que nous allons avoir une fille ou un garçon, madame Dupuis?
    – Un garçon. Ma fille, même si je ne l’ai pas vue debout depuis longtemps, porte comme je le faisais quand j’ai eu ses frères. Je suis certaine que c’est un garçon. Un beau petit garçon blond comme celui de vos photos.
    – C’est mon neveu, Stanislas.
    – Je sais. Je sais aussi que ma fille et vous nous avez certainement fait un beau bébé.
    Elle se tut, ourla sa lèvre supérieure et Jan comprit qu’elle était aussi rongée
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