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Même les oiseaux se sont tus

Titel: Même les oiseaux se sont tus
Autoren: Arlette Cousture
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jamais il n’avait osé lui faire d’avances auxquelles ses principes n’auraient pu répondre.
    Elle revint vers la caisse et salua des clientes qui étaient là, beau temps mauvais temps, tous les mardis midi. Denis apparut en coup de vent, lui demandant de passer au rayon des tissus pour choisir ceux qu’elle désirait voir aux fenêtres de son appartement. Elle demeura bouche bée avant de répondre qu’elle était capable de coudre ses rideaux, voilages et tentures elle-même. Il balaya sa réponse d’un sourire, la suppliant presque de l’autoriser à la gâter un peu.
    – Mais tu m’as déjà beaucoup donné en me le louant. Je ne veux rien de plus.
    – Laisse-moi f...
    – Non, merci. Il va falloir que tu apprennes que nous, les Polonaises, nous sommes têtues.
    Denis s’inclina et la quitta sans l’embrasser, toujours très correct lorsqu’il y avait des personnes autour d’eux.Élisabeth se dirigea vers l’estrade de droite, un pichet d’eau à la main, pour répondre au geste d’une cliente qui lui désignait son verre pour lui faire comprendre qu’il était vide.
    – C’était bien le docteur Boisvert qui vous parlait?
    Élisabeth se sentit mal à l’aise, pas tant à cause de la question qu’à cause du ton un peu trop curieux.
    – Peut-être. Je ne le connais pas.
    – Il me semblait qu’il vous parlait.
    – Oui, c’est vrai. Mais c’est parce que je suis violoniste et que les gens du rayon de la musique me l’ont envoyé. Il aurait besoin d’une musicienne. N’est-ce pas extraordinaire de penser qu’on va me payer pour jouer du violon?
    – Ah!... Je pensais que vous étiez peut-être une de ses patientes.
    – Oh non! Vous m’apprenez qu’il est médecin.
    Élisabeth revint à l’entrée, le cœur au galop. Elle était extrêmement mal à l’aise d’avoir menti, mais quelque chose lui disait que Denis aurait été heureux de sa réponse.
    La nuit fut agitée. Michelle, que Denis avait dit vouloir faire admettre à l’hôpital le lendemain, s’éveilla en sursaut à une heure et demie, baignant dans un liquide visqueux qui dégageait une odeur qu’elle ne put reconnaître. Elle réveilla Jan qui ouvrit la lumière, s’assit comme s’il avait été mû par un ressort, vit la couverture, éteignit, couvrit Michelle jusqu’au cou et se leva. Il téléphona à Boisvert qu’il joignit à l’hôpital, lui demanda une ambulance et sortit en pyjama pour aller chercher sa sœur, préférant la prévenir doucement plutôt que d’énerver les Favreau par la sonnerie du téléphone. Il la trouva debout devantsa fenêtre, complètement éveillée. Il n’avait pas encore prononcé un seul mot que déjà elle avait ouvert son placard pour en sortir des vêtements. Quand il comprit qu’elle l’accompagnerait, il retourna chez lui à toute vitesse et entra dans la chambre. Il demanda à Michelle si elle avait mal au ventre, mais elle ne répondit pas. Il alluma le plafonnier et retint un cri de détresse. Michelle avait été badigeonnée aux teintes de la mort. Il s’approcha d’elle, posa la tête sur sa poitrine et ne cessa de se déplacer l’oreille, incapable d’entendre le moindre battement.
    Il retourna au téléphone, complètement affolé, demanda à parler à Boisvert, mais on lui dit qu’il avait quitté l’hôpital. Il raccrocha, certain que Boisvert avait décidé de venir avec l’ambulance. Il retourna vite au chevet de Michelle et entendit monter Élisabeth, qui entra dans la chambre un sourire rassurant aux lèvres. Devant le spectacle morbide et sanguinolent, Élisabeth eut une vision de la boucherie de Cracovie, à laquelle elle n’avait pourtant pas assisté, et sortit pour aller dans la salle de bains mordre une serviette afin d’étouffer sa peur. Jan, lui, prit les lunettes de son père et les posa sur l’oreiller, près de la tête de sa femme. Il commença à leur lancer des invectives, d’abord à voix basse, puis, voyant que Michelle ne s’éveillait pas, de plus en plus fort. Élisabeth l’entendit de la salle de bains et elle arracha une autre serviette du support pour s’en enturbanner, laissant ses mains au-dessus de ses oreilles.
    – Papa! Si tu me fais ça, je te détesterai jusqu’à la fin de mes jours, tu m’entends? Je vais te haïr parce que tu m’as laissé tomber. Tu m’entends? Je vais faire plus que changer de nom, papa. Je vais changer de passé et d’histoire. Tu m’entends? Je ne serai plus deCracovie. Je ne
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