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Les Amants De Venise

Titel: Les Amants De Venise
Autoren: Michel Zévaco
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Candiano ! C’est Roland Candiano qui
l’emporte !…
    – Grâce ! Grâce ! clame l’Arétin d’une voix qu’il
croit plaintive et qui demeure tonitruante.
    – Candiano ! Candiano ! répètent les
Arétines.
    – Hein ? » s’exclama Pierre.
    Et de dessous le lit apparaît sa tête effarée que les jolies
filles saluent d’un éclat de rire.
    « Coquines ! vocifère l’Arétin, qu’avez-vous à rire,
quand j’ai risqué cent fois d’être tué ! »
    Les Arétines, alors, le rassurent, l’aident à sortir de dessous
le lit, le frictionnent, l’embrassent, et finalement lui racontent
la victoire de Candiano.
    « La lettre ! murmure l’Arétin en se frappant le
front. La lettre de Dandolo !… Comment la lui faire parvenir
sans risquer d’être tué !… »
    Ses yeux tombent sur Gianetto.
    Il lui parle à voix basse.
    Il lui remet la lettre. Gianetto part en courant.
    *
    * *
    Scalabrino, après avoir mis le feu aux poudres du vaisseau
amiral, était remonté sur le pont. Dans le tumulte et le désarroi,
nul ne fit attention à lui. Il portait d’ailleurs le costume de
marin du vaisseau.
    Il atteignit le pont au moment où, répondant aux cris d’Altieri,
les officiers poussaient leurs soldats vers le pont en
planches.
    Ce fut vers le bord opposé à ce pont que Scalabrino se dirigea,
jouant des coudes, se frayant un passage à coups de poing.
    Ce mouvement, il l’exécuta d’ailleurs sans hâte, avec peut-être
l’espoir qu’il n’atteindrait pas à temps le bordage.
    Il l’atteignit pourtant !…
    « Allons ! murmura-t-il, il paraît qu’il faut que je
vive encore ! »
    Et enjambant le bordage, il plongea du haut du pont.
    Deux secondes plus tard, le vaisseau s’ouvrait comme un
cratère.
    Scalabrino demeura plus d’une minute entre deux eaux : la
manœuvre lui était familière.
    Lorsqu’il atteignit le quai, d’un coup d’œil il vit qu’Altieri
était perdu. Il le vit fuir…
    Et il s’élança à sa poursuite.
    « Celui-là ne m’échappera pas », songea-t-il.
    Altieri atteignit en courant son palais. En quelques bonds il
monta à l’appartement de Léonore et enfonça la porte d’un coup de
pied, parcourut les pièces.
    « Partie ! Partie ! » hurla-t-il.
    Brusquement, il se ressouvint que Léonore avait suivi le
cercueil de son père…
    Des serviteurs rentraient…
    « Où est la signora ? gronda-t-il.
    – À l’île d’Olivolo », répondirent-ils, épouvantés de
voir leur maître sanglant, déchiré, les yeux égarés.
    Altieri reprit sa course éperdue.
    Vingt minutes plus tard, il atteignit la maison, se jeta dans le
jardin, étourdit d’un coup de poing le vieux Philippe qui lui
barrait le passage, et fit irruption dans la salle à manger.
    Léonore, dans les bras du vieux doge, cria :
    « Protégez-moi, mon père ! Réveillez-vous, monseigneur
doge ! À mon secours !… »
    D’un geste violent et doux à la fois, le vieillard entoura
Léonore d’un de ses bras et étendant l’autre en avant :
    « Qui vient là ?… Quel est le bravo qui fait ainsi
trembler la femme ?
    – C’est moi !… Moi, Altieri !…
    – Que réclamez-vous ?
    – Ma femme !
    – Votre femme ! » fit le vieux Candiano avec
l’étonnement infini d’un homme qui se réveille d’un long
sommeil.
    Oui… ces brusques secousses, ces clameurs lointaines, les appels
de Léonore, sa voix déchirante, alors que prosternée à ses pieds
elle lui disait son malheur, ces émotions violentes avaient
accompli dans l’âme du vieillard une révolution dernière, achevant
de lui rendre la raison que les paroles de son fils et les soins de
Philippe avaient commencé à éveiller…
    « Ma femme ! répéta violemment Altieri. Allons,
arrière, vieillard ! Et rends grâce au Ciel que ta folie te
protège ! Mais par l’enfer ! elle ne te protégera pas
longtemps, si… »
    Altieri ne put en dire davantage.
    Une main lourde venait de s’abattre sur son épaule.
    Il se retourna avec un cri de rage…
    Scalabrino était devant lui.
    « Que me voulez-vous ? demanda Altieri d’une voix
rauque.
    – Vous tuer ! » dit Scalabrino.
    En même temps, il bondit vers une panoplie, en arracha deux
poignards, en jeta un aux pieds d’Altieri et garda l’autre dans sa
main.
    Altieri le ramassa.
    Par une soudaine et prompte manœuvre, Scalabrino se plaça entre
le capitaine général et le groupe formé par Léonore et
Candiano.
    Le vieux doge avait
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