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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août
Autoren: Michel Pagel
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sottement regimbé.
    —  Vade retro, Satana, articula Philippe, secoué par de nouveaux tremblements – ni de froid ni de désir, cette fois.
    Elle eut un rire léger, cristallin, qui parut au garçon déplacé dans la bouche d'un tel monstre.
    — Le voilà qui parle comme un clerc, à présent ! s'exclama-t-elle. Épargne ta salive : tes formules ne peuvent rien contre moi.
    —  Pater noster, qui es in caelis…
    Elle le gifla, à peine assez fort pour lui faire mal.
    — Assez ! te dis-je. Je ne suis pas un démon qu'on chasse avec des litanies. Regarde bien. (Lentement, elle se signa.) Crois-tu que j'en serais capable si j'étais issue de l'Enfer ? (Elle eut une moue méprisante.) Existe-t-il, seulement, cet Enfer dont vous menacent vos prêtres ? Tu me pardonneras d'avouer que je n'y crois pas plus qu'à ton Dieu.
    — Hérétique ! balbutia Philippe. Blasphématrice !
    Elle le gifla à nouveau, tuant dans l'œuf une nouvelle injure.
    — Tu n'es pas en position d'insulter les gens, mon ami, souviens-t-en. Tu es à ma merci. Dans un instant, si je le désire, le royaume n'aura plus d'héritier. (Elle sourit à nouveau, dévoilant deux rangées de dents blanches, idéalement plantées.) D'ailleurs, pour ne rien te cacher, je crois bien que je le désire… (Elle laissa sa phrase en suspens, s'amusant de la terreur qui brûlait dans les yeux du garçon.) Mais pas tout de suite. D'abord, il nous faut terminer ce que nous avons commencé…
    Philippe secoua la tête. La simple idée de la toucher, désormais, l'atterrait. Lysamour coula un regard navré vers son membre flasque, qu'elle gratifia d'une chiquenaude.
    — Eh bien quoi ? reprit-elle. Aurais-tu hérité le tempérament de ton père ? Serais-tu toi aussi un moine couronné ?
    Il serra les dents. L'expression, tristement célèbre, était de la reine Aliénor, la première épouse de Louis, qui devait savoir de quoi elle parlait. Après avoir manipulé quelque temps le pénis recroquevillé, en vain, l'odieuse créature qui usurpait une apparence de femme capitula.
    — Oh ! Très bien ! Nous ne sommes pas pressés. Nous avons même tout notre temps : nul ne viendra te chercher ici. En attendant que la vigueur te revienne, si tu veux bien, je vais te conter une histoire. Une histoire vraie. Je suis certaine qu'elle t'intéressera.
    Philippe, terrorisé, l'écoutait à peine. De tout ce qui précédait, il ne retenait qu'une chose : elle allait le tuer. Jamais il n'eût cru finir ainsi. À la guerre, oui, sous les coups d'un plus habile chevalier, ou encore, tel Roland, victime d'une félonie – mais non dans pareille position qui le privait de sa dignité. Toutefois, ne jamais abandonner le combat avant qu'il ne fût perdu était l'un des premiers préceptes inculqués à son élève par Robert Clément. Puisque Lysamour désirait jouer les trouvères à son intention, il souhaitait que le récit fût long si cela pouvait reculer l'échéance, lui donner une chance d'échapper à son sort.
    — Cela se passait ici même, continuait-elle déjà. Il y a bien longtemps ou il y a peu, selon que l'on est de ta race ou de la mienne : en l'an 971 de l'Incarnation du Seigneur, comme vous dites. J'étais jeune et naïve, à l'époque, je croyais encore en la bonté et en l'amour… (Elle s'interrompit devant la mine effarée de son auditeur.) Qu'y a-t-il ? Tu t'étonnes de ma longévité ? Pour nous, elle n'a rien d'exceptionnel, je te l'assure. J'ai encore de beaux siècles devant moi, si je n'étouffe pas de rage à vous regarder vivre, vous, les humains.
    Le garçon claquait des dents. La fraîcheur de l'air, le contact glacé de ses liens devenaient presque douloureux. Sa compagne, aussi nue que lui, ne paraissait toujours pas sentir le froid.
    — Qui êtes-vous ? trouva-t-il la force de balbutier, intéressé à son corps défendant.
    — Nous sommes les premiers enfants de la Terre. Elle était déjà nôtre quand vos ancêtres ne valaient guère mieux que des animaux, incapables de faire du feu – et même si nous ne sommes pas tous d'accord à ce sujet, j'ai la ferme conviction qu'elle sera encore nôtre quand vos descendants se seront éteints. En dehors de cela, nous n'avons pas de nom : nous n'en avons pas besoin. (Elle eut un sourire moqueur.) Bien sûr, ceux d'entre vous qui ont eu affaire à nous ne se sont pas fait faute de nous en donner. Votre imagination est sans limite, cela, au moins, je vous l'accorde. Au
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