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Meurtres dans le sanctuaire

Meurtres dans le sanctuaire

Titel: Meurtres dans le sanctuaire
Autoren: C.L. Grace
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Marchands, magistrats, clercs et autres notables du Conseil se pressaient alors dans cette salle aujourd’hui étrangement déserte. Même la table, en son extrémité, était vide. Une voix lança :
    — Par ici, Maîtresse Swinbrooke !
    Kathryn porta les yeux vers l’imposante cheminée. Quatre hommes y étaient assis. Le plus proche était un vénérable vieillard ; Kathryn nota sa robe pourpre bordée de coûteuse fourrure. Il était flanqué d’un clerc portant une écritoire sur ses genoux. De l’autre côté de l’âtre, Kathryn reconnut le magistrat John Newington, grisonnant et sec comme un pique-feu. Derrière lui se trouvait un homme jeune vêtu de la sobre tenue vert bouteille des écuyers : manteau, surcot et cuissardes. Elle nota rapidement les longs cheveux noirs et les yeux enfoncés dans leurs orbites.
    Les quatre personnages se levèrent comme elle avançait vers eux en hésitant. Puis Newington lui indiqua d’un geste le siège à dossier derrière lequel on avait placé un tabouret rembourré pour Thomasina.
    — Soyez la bienvenue, Maîtresse Kathryn. Le magistrat paraissait nerveux. Sous son crâne chauve luisant de sueur, ses yeux étaient circonspects et son visage tiré de fatigue. Marchand prospère, Newington avait sans doute échappé à l’épuration de la ville par les soldats des York, parce que, comme l’avait un jour fait observer le père de Kathryn, il ne savait jamais quel jour l’on était, a fortiori quel parti politique soutenir. À présent, il tripotait fébrilement la bordure en fourrure de sa robe. Kathryn lui sourit avant de glisser un nouveau regard au soldat derrière lui : celui-ci était fort laid avec son visage long au teint basané, son menton agressif, ses yeux enfoncés, son nez trop proéminent et sa bouche mince et dure. À coup sûr, un individu renfermé, dissimulé. Kathryn l’eût-elle croisé dans une ruelle, elle l’aurait pris pour un hors-la-loi, voire un loup-garou, et se serait méfiée.
    — Maîtresse Swinbrooke ?
    Kathryn se tourna vers le vieillard en robe pourpre qui avait prononcé son nom et retint son souffle. Elle l’avait déjà vu dans la cathédrale, vêtu de tous les ornements de l’Église et de l’État, aussi s’inclina-t-elle sur-le-champ pour baiser l’améthyste à son doigt. Car l’homme n’était autre que Thomas Bourchier, cardinal archevêque de Cantorbéry. Avec son visage large et empâté, il aurait pu être intimidant, mais ses yeux étaient jeunes et joyeux, comme s’il était réellement content de jouir de la compagnie d’une jeune femme. Malgré son âge avancé, il escorta Kathryn jusqu’à son siège.
    — Vous êtes bien bonne d’être venue, murmura-t-il de sa voix profonde et mélodieuse.
    Puis, tortillant le lobe d’une de ses oreilles, il poursuivit :
    — N’ayez crainte, je ne suis pas ici pour vous excommunier ni vous passer à la question.
    Il posa de nouveau une main tavelée et veinée de bleu sur l’épaule de Kathryn pour la rassurer et ajouta :
    — Quand j’étais simple moine, j’ai bien connu votre père, un honnête médecin. Qu’il repose dans la paix de Dieu !
    Son regard se porta ensuite sur Thomasina, et il feignit un air solennel.
    — Tu es sans doute la servante du docteur Swinbrooke ? Et la nourrice de Kathryn aussi ? Je me souviens que son père m’avait parlé de toi.
    Thomasina pour une fois ne répondit rien, se contentant de minauder.
    — Asseyez-vous, je vous en prie, asseyez-vous, intervint alors Newington, toujours agité, en indiquant les sièges.
    Le clerc à côté de l’archevêque se gratta le nez avec un doigt maculé d’encre, fusillant les deux femmes du regard.
    — Oui, prenez vos sièges ! tonna-t-il. Voulezvous une boisson fraîche ?
    Secouant la tête, Kathryn lui sourit. Sans doute était-il l’un des clercs de l’archevêque, peut-être son clerc principal. C’est ce que laissaient deviner sa robe usée, ses doigts tachés d’encre, son écritoire, ainsi que son encrier en corne et ses plumes posés sur un petit tabouret à côté de lui. L’homme n’était donc pas marié et sans doute n’aimait-il pas les femmes. La présence de Kathryn lui déplaisait.
    — Allons, Simon, murmura l’archevêque, moins de rudesse. Il nous faut l’aide de Maîtresse Swinbrooke.
    Kathryn ressentit aussitôt du soulagement : on ne l’avait pas mandée pour l’interroger sur son père ni sur son mari disparu. Bourchier se
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