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Les Poilus (La France sacrifiée)

Les Poilus (La France sacrifiée)

Titel: Les Poilus (La France sacrifiée)
Autoren: Pierre Miquel
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espagnole, avec des régiments de volontaires norvégiens, danois, hollandais et flamands, sans compter les Volksdeutsche levés en Roumanie, en Hongrie, en Yougoslavie et en Pologne.
    Comme en 1918, les Allemands avaient choisi d’être des prédateurs, et non des libérateurs. Dans les conquêtes d’Ukraine, de Crimée, et d’une partie du Caucase, ils n’avaient pas cherché à gagner la confiance des populations, mais à exploiter drastiquement l ’Ostland. L’Ukraine occidentale était rattachée au gouvernement général du Gauleiter Frank, bourreau de la Pologne. Koch était tout-puissant dans le reste du pays, comme Lohse dans les Pays baltes et la Biélorussie.
    La germanisation des marches s’accompagnait de la confiscation des terres qui seraient un jour distribuées à des colons allemands, avant d’être exploitées par des esclaves slaves. L’essentiel de la production devait, dans l’immédiat, nourrir l’armée. Les mines et l’industrie, une fois remises en état, alimenteraient la machine de guerre du Reich.
    L’offensive n’avait pas atteint tous ses objectifs. Les Waffen SS s’étaient rendus maîtres de Maïkop et de la raffinerie de Mouk, mais les Soviétiques avaient détruit toutes les installations. Les énormes réserves en grains des kolkhozes avaient été évacuées par bateaux sur la mer Noire. La main-d’œuvre manquait pour la mise en valeur économique de l’Est, parce que Fritz Sauckel avait recruté près de trois millions d’hommes et de femmes en Ukraine et en Russie blanche comme Ostarbeiter en Allemagne. Les Allemands avaient eu le temps de mettre le pays en coupe réglée.
    La carte de guerre était bien la même au début de 1943 qu’en 1918, avec un projet de mise en exploitation de la sidérurgie d’Ukraine et une tentative d’appropriation des récoltes céréalières. Elle s’était étendue à toute l’Europe balkanique, les Anglais n’ayant pas réussi à tenir la Grèce. Les Croates pro-nazis avaient contribué à réduire les Serbes antiallemands. Les Bulgares et les Roumains avaient rejoint le camp de l’Axe, même si le gouvernement bulgare s’était refusé à combattre physiquement les Russes qui jadis avaient libéré le pays des Ottomans. Cette fois l’Italie mussolinienne, hostile à Berlin en 1918, avait contribué à la conquête allemande, en s’emparant de l’Albanie. Il ne manquait à l’hégémonie que la Turquie, restée neutre. De la Baltique à la Méditerranée et à la Caspienne, l’Europe était allemande.
    De la Manche et de l’Atlantique à la Volga, la machine industrielle tournait à plein régime. Les rêves des pangermanistes étaient dépassés. Les nazis ne disposaient pas seulement du charbon belge, comme en 1918, mais de toutes les mines françaises. Renault fournissait la Wehrmacht en chars et en camions, Citroën en automobiles. Les firmes françaises d’aéronautique équipaient la Luftwaffe. L’Allemagne n’exploitait en 1918 que dix départements français. Elle comptait à partir de 1942 sur la totalité des ressources du territoire entièrement occupé, en partie annexé. Dans l’affrontement trentenaire franco-allemand déchaîné en 1914, la France de 1942 avait entièrement perdu son indépendance. Le drapeau de la France libre ne flottait qu’à Londres, dans les colonies d’Afrique équatoriale, et dans les possessions du Pacifique.
    La France occupée contribuait à un effort de guerre allemand sans précédent, organisé dans toute l’Europe par Albert Speer à partir de 1943. Les Allemands fabriqueraient alors deux fois plus de chars que les Britanniques, bien qu’ils aient mobilisé cinq millions et demi d’hommes. Ils avaient recours largement à la main-d’œuvre forcée étrangère, déportée en Allemagne par Sauckel, aux wagons, aux locomotives, aux machines-outils d’un continent. 800 000 des 1 500 000 cheminots allemands étaient des étrangers. Huit millions d’étrangers européens travaillaient en Allemagne au début de 1945, dont deux millions de femmes, sans compter les prisonniers de guerre et les déportés. Plus de 600 000 travailleurs français avaient pris le chemin du Reich, au titre du STO.
    En 1914 déjà, les Allemands utilisaient dans leurs usines des travailleurs forcés saisis dans les régions occupées, mais à une échelle infime. Le conflit déchaîné en août 1914 avait abouti en 1942 à cet anéantissement de l’Europe, à cet esclavage industriel
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