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Le prince des ténèbres

Le prince des ténèbres

Titel: Le prince des ténèbres
Autoren: Paul C. Doherty
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installé sur un banc, dans l’encoignure d’une fenêtre, un hanap à la main.
    — Ah, Hugh !
    Corbett sentit le coeur lui manquer : quand le roi jouait au soldat jovial et sans détour, il y avait anguille sous roche.
    — Pendant que vous vous jetiez des fleurs, Craon et vous, je réfléchissais à votre compte rendu sur l’affaire de Godstowe. Vous avez fait du beau travail, Hugh !
    — Merci, Sire.
    Le souverain se leva et emplit un gobelet qu’il tendit à son clerc.
    — Je suis navré de ne pas vous avoir parlé plus tôt de Dame Agatha.
    — Sire, j’ai déjà protesté. Comment puis-je obtenir de bons renseignements si j’ignore l’existence de gens comme elle ? Ce genre d’individus est une menace. Il faut les surveiller et les guider.
    — Vous pensez à Dame Agatha ?
    — En effet, Sire.
    Le roi jeta un regard rusé à Corbett.
    — Elle en a sans doute trop fait, mais si Lady Aliénor s’était échappée…
    Sa menace flotta dans l’air.
    — Si Lady Aliénor s’était échappée, Sire, reprit Corbett d’une voix acerbe, on l’aurait capturée.
    — C’est vrai ! C’est vrai ! murmura le roi. Mais Agatha…
    Il n’acheva pas sa phrase.
    Corbett reposa violemment son gobelet sur la table.
    — J’admets que Dame de Courcy ait pu agir pour vous protéger, Sire, mais elle a également tué pour se protéger, elle. Trois femmes, dont deux religieuses, sont mortes pour rien. Des femmes ont péri pour s’être trouvées là où il ne fallait pas au moment où il ne fallait pas. Qui répondra de leur mort ?
    — Vous voilà bien moralisateur ! l’interrompit sèchement le monarque.
    — En Italie, reprit lentement Corbett, une nouvelle race de penseurs affirment que la volonté du prince a force de loi. Est-ce là un exemple de ce qu’ils veulent dire, Sire ?
    — Peut-être !
    — Donc, si vous changez d’avis et décrétez ma mort… ?
    Le roi se retourna agressivement vers lui, lèvres retroussées, et jeta le hanap à ses pieds.
    — Taisez-vous !
    — Trois femmes, poursuivit inexorablement Corbett, trois femmes innocentes ont péri. Savez-vous comment on vous surnomme dans les collèges d’Oxford ? Le Justinien de l’Occident. Le grand législateur. On évoque vos parlements et votre fameux discours disant que ce qui concerne tous vos sujets doit avoir l’approbation de tous vos sujets. Je me demande ce qu’en auraient pensé Dame Martha et Dame Frances. Agatha de Courcy est une criminelle. Non seulement elle est en liberté, mais elle a défié votre autorité en agissant comme elle l’a fait.
    Le roi envoya voler la jonchée d’un coup de pied.
    — Vous feriez mieux de partir, Hugh, suggéra-t-il rapidement.
    Puis il le regarda en souriant :
    — Maeve est enceinte . Si c’est un garçon, prénommez-le Edouard !
    Il ajouta alors en détournant le regard :
    — Je n’oublierai pas ce que vous avez accompli à Godstowe. Vous voudriez que Maltote reste définitivement à votre service, je crois ? Accordé ! À présent, filez ! Vous reviendrez ici après la Saint-Michel.
    Corbett salua et se dirigea vers le seuil.
    — Hugh !
    Il se retourna :
    — Oui, Sire ?
    — Agatha de Courcy… J’en fais mon affaire.
    Corbett s’inclina de nouveau et referma la porte derrière lui.
    Édouard resta quelques instants immobile. Puis il alla vers la fenêtre et réfléchit à ce que lui avait révélé son clerc. Il savait, en son for intérieur, que ce dernier avait raison : Agatha de Courcy était une criminelle. Ce n’était pas la première fois que le roi avait recours à ses services. Il l’avait surnommée son « grain de sable » et l’employait pour faire échec aux funestes machinations de ses ennemis, qui continuaient à le harceler malgré l’écrasement de la révolte de Montfort, près de quarante ans auparavant. Oh, bien sûr, il connaissait l’existence de Dame Deveril, issue d’une branche illégitime d’un des connétables de Montfort. Le fils bâtard de Deveril s’était enfui à Bordeaux et avait épousé une jeune fille de la noblesse locale. Marie Deveril, née de leur union, avait été élevée dans la haine du roi d’Angleterre. Il l’avait fait surveiller de loin. Quand elle avait pris un nom d’emprunt pour solliciter l’autorisation d’entrer dans son royaume et d’être admise à Godstowe, il avait supposé qu’elle voulait fomenter quelque vilenie et saisir la moindre occasion pour frapper la
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