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Le prince des ténèbres

Le prince des ténèbres

Titel: Le prince des ténèbres
Autoren: Paul C. Doherty
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serait-ce un crime commis par quelqu’un du prieuré, agissant par jalousie ou sur ordres ? Les Français, peut-être ? Une délégation du roi Philippe, conduite par son vieil adversaire, Amaury de Craon, était arrivée en Angleterre.
    Corbett se mordit les poings. Craon, son homologue au Conseil de France, était un personnage habile, à l’esprit tortueux, qui ne portait guère le roi Edouard dans son coeur, ni, d’ailleurs, le principal clerc du monarque. Un scandale éclaboussant la couronne anglaise réjouirait fort les Français. Lady Aliénor, ancienne maîtresse du prince Edouard, avait été bannie, ce qui leur enlevait un motif de plainte. Bien sûr, Gaveston pouvait avoir pris sa place, mais ils n’avaient aucune preuve démontrant qu’il y avait plus que des relations d’amitié entre le jeune prince et lui. Cependant, si Craon se mettait à insinuer que le prince et Gaveston étaient impliqués dans une affaire de meurtre, le roi Philippe pouvait très bien décider qu’il n’y aurait pas de fiançailles, que le traité de paix était nul et non avenu, et les Anglais se retrouveraient alors entraînés dans une guerre sanglante et coûteuse. Le clerc reprit sa plume et se remit à écrire.
    — J’ai appris par un de mes espions que le prince Edouard a épousé en secret Lady Aliénor. Ne serait-ce pas là un motif d’assassinat ?
    Corbett eut soudain froid dans le dos. Le prince ou son père ? Il ne se faisait plus d’illusions sur le roi et son fils. L’un et l’autre étaient impitoyables et soucieux de leurs seuls intérêts.
    — Eudo Tailler, l’agent qui hante les couloirs du Louvre, nous a envoyé, il y a quelques semaines, un renseignement laconique : un membre de la famille des Montfort se promène en toute liberté en Angleterre. Quant à Eudo, il a disparu depuis.
    L’appréhension de Corbett s’accrut. Quarante ans auparavant – six ans après sa naissance –, Édouard Ier avait écrasé une dangereuse rébellion fomentée par le comte Simon de Montfort. Le roi, qui avait failli perdre sa couronne, vainquit l’armée du comte près d’Evesham. Montfort avait été tué et Édouard avait ordonné à ses soldats de mettre son corps en pièces et de le jeter à ses chiens. Les Montfort survivants avaient fui à l’étranger et – chaque fois que c’était possible – envoyé des hommes de main en Angleterre pour attenter à la vie du souverain et à celle de ses proches. Ce conflit durait depuis des décennies. Quelques années auparavant, le roi avait requis les services de Corbett pour percer à jour l’un de ces complots. Le clerc se frotta le visage en se rappelant l’amour fatal que lui vouait Alice, la jeune femme à la tête de la société secrète. Qui était ce nouvel assassin, se demanda-t-il, et où était-il à présent ?
    — Hugh ! Hugh !
    Il leva les yeux. Maeve se tenait sur le seuil, emmitouflée dans une des capes de son mari. Malgré ses préoccupations, ce dernier ne put s’empêcher d’admirer sa beauté : sa chevelure blond argenté, son teint qui, à la lueur des bougies, prenait la patine du vieil or, ses yeux bleu violet qui se fermaient de sommeil.
    — Que regardez-vous, mon époux ?
    — Vous le savez bien ! murmura-t-il.
    Il se leva, moucha les bougies et la raccompagna à leur chambre.
    — Hugh, que faites-vous ?
    Elle se débattit et lui fit face, l’air grave.
    — Pour l’amour de Dieu, je me réveille au beau milieu de la nuit : le lit est froid et vous vous êtes envolé !
    Elle lui sourit avant de laisser tomber sa cape et de l’enlacer.
    — C’est la lettre du roi, n’est-ce pas ? Cette affaire de Godstowe ?
    Il prit une profonde respiration.
    — Oui ! Il faut que je m’y rende demain. Dès le retour de Ranulf.
    Elle le fit asseoir près d’elle, au bord du lit.
    — Cette femme a été assassinée, n’est-ce pas ?
    — J’en ai bien peur.
    — Et le roi va être tenu pour responsable ?
    Corbett se passa la main sur le visage.
    — Je crois que oui. Si un scandale éclate, Dieu sait ce qui arrivera.
    Il lui prit la main.
    — Cela fait quarante ans, Maeve, qu’il n’y a pas eu de guerre civile en Angleterre. La mort de Lady Aliénor pourrait en déclencher une.
    Elle frissonna et se blottit sous l’épaisse courtepointe.
    — Hugh, chuchota-t-elle, vous n’allez pas régler ce problème maintenant, en pleine nuit !
    Il eut un pauvre sourire :
    — Peut-être n’existe-t-il
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