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Le Pacte des assassins

Le Pacte des assassins

Titel: Le Pacte des assassins
Autoren: Max Gallo
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avait été assassiné, avait été arrêtée et avait
disparu dans les profondeurs de la Loubianka, puis du goulag.
    Mais Alfred Berger invitait les communistes et
le peuple de France à pleurer le « camarade Staline » et à se
rassembler ; il avait d’ailleurs annoncé la réunion à Paris d’un Vel’d’Hiv
de deuil !
    Julia avait hésité, essayant
en vain de joindre, à Berlin-Ouest, Arthur Orwett, s’étonnant qu’il ne songeât
pas à l’appeler pour lui annoncer le jour de son arrivée, qu’il ne partageât
pas avec elle non la joie, mais le soulagement de savoir que le Vieux Loup n’avait
pas échappé au sort de chaque humain.
    Elle aurait voulu dire à Orwett : « Il
n’était que cela : un mortel, et ce sont les hommes qui lui avaient
conféré sa puissance, qui avaient fait de lui un tyran qui leur paraissait
immortel. »
    Elle avait tout à coup été saisie par l’angoisse,
l’impatience, la crainte de la solitude, et elle avait décidé de se rendre au Vel’d’Hiv de deuil.
    Dès l’entrée dans l’immense
nef, elle avait été impressionnée par la tristesse de cette foule recueillie
qui communiait avec les dirigeants communistes figés sur la scène cependant qu’Alfred
Berger rappelait l’apport à la liberté et aux combats progressistes de l’humanité
de ce géant de l’histoire qu’était le maréchalissime Joseph Staline, « notre
camarade ».
    Julia n’avait pas eu le cœur à ricaner, à s’indigner
cependant que se déroulait cette cérémonie païenne, cette messe noire où l’on
célébrait l’un des plus grands assassins de l’histoire de toute l’humanité.
    Puis l’assistance, levant le poing, avait
entonné, sur un tempo lent, L’Internationale, et Julia avait craint d’éclater
en sanglots tant ce chant lui rappelait les débuts de sa vie, l’élan qui l’avait
poussée vers Heinz Knepper, ces temps de sincérité et d’enthousiasme, ces
années de passion et d’aveuglement, quand elle avait considéré que construire
un monde juste et nouveau valait bien qu’on y sacrifiât des hommes.
    Et elle avait accepté, durant toute la guerre
civile, les injustices, les massacres, la dictature. Elle avait voulu ne pas
voir. Elle avait cru que du Mal surgirait le Bien. Et ce n’est que peu à peu qu’elle
avait compris que le Mal ne pouvait engendrer que le Mal, et que de la volonté
de faire le Bien pouvait aussi surgir le Mal !
    Julia avait quitté
le Vel’d’Hiv de deuil et les longs crêpes noirs entourant le gigantesque
portrait de Staline avant que ne s’achève L’Internationale.
    Elle était rentrée à l’hôtel Lutetia où elle
descendait chaque fois qu’elle séjournait à Paris, en souvenir des temps
anciens, quand Thaddeus Rosenwald, Willy Munzer, Heinz Knepper et tant d’autres
étaient encore vivants.
    De tous ceux de ces années-là ne survivait qu’Alfred
Berger, le maléfique.
    Elle s’était jetée
sur le lit sans même se déshabiller, et alors qu’elle avait pensé sabler le
Champagne avec Arthur Orwett pour fêter la mort du Vieux Loup, elle avait
pleuré, seule et accablée, pensant à ses compagnes de Karaganda, à Vera et
Maria Kaminski, à Heinz Knepper, au pont de Brest-Litovsk, un 8 février 1940, aux
déportées de Ravensbrück.
    C’est le lendemain matin qu’elle avait appris
qu’Arthur Orwett avait succombé aux suites d’un accident de la circulation sur
une route qui conduisait à Berlin. Un camion avait heurté sa voiture qui avait
pris feu. Staline était mort, mais ses ordres et ses tueurs parcouraient encore
le monde.

49.
    Dans son sanctuaire de Cabris, Julia avait
posé sur la grande table une médaille de bronze maculée et tordue.
    Elle est encore devant moi, au milieu des
dossiers d’archives et des carnets de notes de Julia.
    Elle était, lui avait-on dit, tout ce qui
restait d’Arthur Orwett. Les autres objets avaient fondu ou avaient été brûlés.
Le corps avait été calciné. Un enquêteur anglais, autorisé à l’examiner, avait
dit à Julia qu’on aurait pu croire qu’il avait été brûlé au lance-flammes.
    — Je ne sais pas si vous imaginez, avait
ajouté l’enquêteur avant de murmurer des excuses.
    Elle avait répondu d’une voix calme qu’elle n’avait
pas à imaginer, mais seulement à se souvenir.
    Les SS, à Ravensbrück, avant d’abandonner le
camp, avaient ainsi brûlé des cadavres de détenues.
    — Le corps ne parle plus, avait ajouté l’enquêteur.
On
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