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Le combat des Reines

Le combat des Reines

Titel: Le combat des Reines
Autoren: Paul C. Doherty
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m'est inconnu. Édouard le sait. Ce jour-là, il
enroula une mèche de mes cheveux autour de son doigt, la serra et tira.
    — Mathilde,
on prétend que vous étiez belle naguère, chuchota-t-il.
    — On dit la
même chose à votre propos, sire !
    — Toujours
la bonne repartie !
    Il me tira
derechef les cheveux, puis laissa retomber sa main.
    — Vive
comme un lévrier ! souffla-t-il. Je vois les restes de votre beauté. Ma
mère vous a décrite : cheveux aile de corbeau, peau claire, yeux tendres,
mince et souple comme une baguette de coudrier.
    — Vanité
des vanités, raillai-je. Tout passe, sire.
    Le roi se pencha
et je pus sentir le parfum frais émanant de son justaucorps molletonné ;
ses doigts chargés d'anneaux d'or s'approchèrent de mes mains à la peau à
présent foncée et tavelée comme celle d'un crapaud.
    — Dites-moi
donc, Mathilde, dites-moi à qui vous faites confiance.
    — Ne mettez
point votre foi dans les princes, citai-je, dans un fils de la glaise, il ne
peut sauver.
    Édouard recula,
ses yeux d'ambre flamboyant et l'écume à la bouche comme un chat furieux.
    — Voici
qu'ils guettent votre âme, des puissants s'en prennent à vous, cita-t-il à son
tour, menaçant.
    — Je vais
leur cacher ma face, rétorquai-je, et je verrai ce qu'il adviendra d'eux, car
c'est une génération pervertie, des fils sans fidélité.
    — Gardez
vos psaumes et vos prières ! se gaussa le souverain. Allez attendre votre
Dieu. Réfugiez-vous à l'ombre du tombeau de ma mère, mais souvenez-vous,
Mathilde, qu'un jour je saurai la vérité.
    Je souris.
    — Qu'est-ce
que la vérité ? Pilate a posé cette question, bien qu'il n'ait pas attendu
la réponse. Et en cela, peut-être, différez-vous de lui, commentai-je avec
ironie.
    — Je ne
suis point Pilate ! glapit-il. Nul sang innocent ne souille mes mains.
    Il m'aurait
volontiers frappée mais son regard tomba sur le cadeau, celui d'Isabelle, que
je portais toujours : la broche d'argent en forme de croix celtique
incrustée de pierres précieuses qui ferme ma mante. Il serra le poing, sa main
de fer* passa au-dessus de ma tête.
    — Allez,
murmura-t-il. Je vous retire mon affection.
    Il voudrait
tellement savoir ce qu'il en est ! D'autant plus qu'il a gâché bien des
occasions de le découvrir. Il avait tué le gentil Mortimer, l'avait traîné en « juste
procès », ou du moins le prétendait-il : Mortimer avait été bâillonné
avant d'être pendu aux ormes qui dominaient la rivière de Tyburn. Isabelle ne
pardonna jamais à son fils et Édouard regretta toujours cette exécution. Il
aurait pu en apprendre beaucoup ! Ma maîtresse, sans nul doute, le lui
avait rappelé. Vingt-huit ans durant elle avait tourmenté et brocardé son « très
cher fils » à propos de ses secrets. Sur son lit de mort elle avait
épaissi les mystérieuses et troubles ténèbres par de fiévreuses divagations
évoquant des épisodes de sa vie. Elle s'était livrée par des mots et des
expressions qui volaient comme des traits et piquaient l'orgueil du roi.
    Je suis vieille.
Je me juge intelligente. En vérité, je peux être aussi stupide qu'une autre. Je
pensais qu'Édouard me laisserait m'enterrer vivante à Grey Friars, car le
prieur et moi sommes liés par une ordonnance royale. Je ne dois onc quitter cet
endroit. Je me trompais. Édouard est bel et bien le fils de sa mère, et par
conséquent chaque combat contre lui est à l'outrance *, à mort. En
l'occurrence, la mienne. Il a décidé que s'il ne pouvait m'arracher ce que je
sais, il pourrait peut-être me fermer à jamais la bouche afin que personne
d'autre ne puisse l'apprendre. Mais revenons aux funérailles de l'homme que
j'ai tué. Un anachorète est arrivé ici, un soi-disant reclus, un ermite qui se
faisait appeler Rahomer. Je me suis méfiée depuis le début. Pendant cinquante
ans j'avais affronté les Judas, les traîtres, les suborneurs, les abuseurs, les
espions de tout poil. Malgré l'air benoît et ascétique de Rahomer, sa maigre
chevelure et ses yeux larmoyants, je reconnus le loup dans la bergerie. Il
faisait de son mieux, tout regard paterne, lèvres prudes, mains sans cesse
jointes en prière. Je suis médecin ; j'étudie les signes et les symptômes.
Rahomer était un homme fluet, un homme qui, à en juger à la couleur et à la
texture de sa peau, à ses dents, à la douceur de ses mains, appartenait plus à
ce monde qu'à l'autre. Les frères, n'ayant pas le choix,
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