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L'assassin de Sherwood

L'assassin de Sherwood

Titel: L'assassin de Sherwood
Autoren: Paul C. Doherty
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Savigny avait humecté ses épaisses lèvres rouges, lorgné à nouveau la poitrine généreuse de Clothilde et accepté le marché à contrecoeur, en échange d’une bourse d’or et des faveurs gratuites de la donzelle. Pourquoi refuser ? Savigny avait vu le Code et n’y avait compris goutte. Alors, comment ces Godons {7} de malheur auraient-ils pu y entendre quelque chose ? À présent, il était emporté dans une spirale de plaisir, les mains courant le long du dos satiné de Clothilde, dont les cheveux noir de jais entouraient le visage d’un halo virevoltant de passion. Il adorait la façon qu’elle avait de rejeter la tête en arrière tandis qu’elle l’implorait à mi-voix de redoubler d’ardeur.
    La fille jeta un bref regard par-dessus l’épaule de son compagnon : le fin rouleau de parchemin qu’il avait jeté sur la table était toujours là. Elle s’en moquait comme de l’an quarante, de ce vélin, mais Ranulf-atte-Newgate avait l’air bien séduisant, surtout avec la bourse pleine d’or qu’il lui avait offerte. Assez pour qu’elle quitte Paris, retourne en Provence et achète une petite ferme ou même une taverne. Que les hommes étaient bêtes ! Donner tant d’argent pour passer une seule nuit avec elle ! Elle continua à haleter et à gémir, feignant l’extase, mais se raidit soudain : la porte s’ouvrait. Se faufilant comme une ombre, Ranulf s’approcha de la table à pas de loup, s’empara du parchemin avec un clin d’oeil à son adresse et ressortit en refermant doucement l’huis.
    — Et si vous nous le donniez, Monsieur {8} ?
    Ranulf fit volte-face. Deux des vendeurs de reliques obstruaient le haut de l’escalier. L’un s’adossait au mur en mâchonnant un brin de paille, l’autre s’appuyait à la rampe. Ranulf jura. Ils avaient été trahis. Il entendit Clothilde glousser dans la chambre.
    — C’est votre soeur ? lança-t-il d’un ton persifleur. Elle vous salue bien bas !
    Le mâchonneur fit un pas en avant. Ranulf écrasa son poing sur la figure de l’autre assaillant. Le mâchonneur n’eut pas le temps de lever sa dague : Ranulf, souple comme un chat, le frappa de la sienne en lui infligeant une profonde blessure au cou. Puis il descendit l’escalier en trombe et fit irruption dans la salle :
    — Sauve-toi, Bardolph, vite ! cria-t-il.
    L’éternel étudiant ne se le fit pas dire deux fois. Ranulf et lui s’enfuirent de la taverne avant que les autres vendeurs de reliques ne se ressaisissent. Le chef poussa deux de ses compagnons vers l’escalier en jetant d’une voix rauque :
    — Allez voir ce qui se passe !
    Les deux gaillards écartèrent d’un coup de pied leurs boîtes de reliques et prirent les arbalètes, suspendues à des crochets sous leurs capes. Puis ils s’élancèrent vers les marches qu’ils gravirent quatre à quatre. Un des leurs gisait inanimé, tandis que l’autre agonisait, le sang giclant de sa blessure au cou. Ils ne s’en occupèrent pas. D’un violent coup de pied, l’un d’eux enfonça la porte qui claqua sur ses gonds de cuir. Clothilde et Savigny levèrent les yeux, interloqués, mais n’eurent pas le temps de protester. Les hommes de Nogaret ajustèrent leurs arbalètes et envoyèrent des carreaux se ficher dans la gorge de chacun des amants.
    Dans les rues qui s’assombrissaient, les autres sicaires de Nogaret pourchassaient Ranulf et Bardolph. Les deux agents anglais couraient à toutes jambes, glissant et dérapant parfois sur les pavés souillés.
    — Qui leur a dit ? siffla Bardolph.
    — Clothilde, bien sûr ! haleta Ranulf. Qui d’autre ? Elle ne leur a pas révélé qui elle allait rencontrer, sinon Savigny ne serait jamais entré vivant dans la taverne. Elle a dû seulement les avertir que nous agirions cette nuit. Elle mangeait à tous les râteliers !
    Bardolph s’arrêta à un angle de rue et s’appuya contre un mur pour reprendre haleine.
    — La garce ! La sale menteuse ! chuchota-t-il. Je la tuerai !
    — Ce n’est pas la peine, rétorqua Ranulf en le poussant en avant. Savigny et elle sont sûrement morts à l’heure qu’il est. Et c’est ce qui va nous arriver si tu ne cours pas !
    Ils s’enfoncèrent dans le dédale des ruelles. Ranulf s’était préparé à une telle éventualité. S’ils atteignaient la rive de la Seine, ils étaient sauvés. Il avait le précieux parchemin. D’autres agents au service de « Maître Longue Figure », comme il appelait
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