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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour
Autoren: Robert Merle
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modestes clicailles, les caisses royales
étant vides, et Navarre lui remettant tout de gob quatre mille écus pour
graisser sa conscience.
    Ce plan
machiavélien réussit à merveille : Cossein, qui était l’homme le plus
chiche-face de la Création, exigea pour les Ponts de Cé cent mille écus du roi,
lequel ne les put donner, ne les ayant pas, et se désolait de ne pouvoir
satisfaire Navarre, quand lui parvint un lettre missive de Lessart lui offrant
de lui rendre Saumur pour six mille écus. Proposition si modérée
qu’Henri III l’accepta tout de gob.
    Le pleure-pain
Cossein resta sans un sol avec ses chétifs Ponts de Cé. Lessart toucha de
dextre et de senestre. Le roi fut aise de s’en tirer à si peu de débours. Et
Navarre eut Saumur.
    Et vous, belle
lectrice, qui, lisant ceci, vous étonnez en votre for que les hommes disent
coutumièrement de votre gentil sexe qu’il est rusé, double face, fécond en
chatonies, alors même que, dans les occasions comme celle-ci, le nôtre vous
donne de si grands exemples de ses renarderies, se peut que vous soyez aussi quelque
peu surprise, me sachant à mon roi si dévotieux, que j’aie pour ma part
consenti au plan si adroit de Navarre. Oui-da, belle lectrice, j’y fus tout à
plein connivent, et de tout cœur, et dans l’intérêt même de mon bien-aimé
maître. Son armée n’étant pas tant vaillante et bien commandée que celle de
Navarre, celle-ci, comme avait dit Rosny, pourrait voler en un battement de cil
de Saumur à Tours au secours d’Henri, si Mayenne attentait de se saisir de sa
royale personne et de venger son frère, ce que je cuidais qu’il aurait appétit
à faire, la ligueuse Orléans étant si proche – ce qu’il fit, en effet.
     
     
    Le
30 avril de cette année 1589, le traité conclu entre les deux rois, et
Navarre cherchant le contact avec Mayenne, et se trouvant alors proche de Tours,
il reçut un message du roi lui disant que paix et traité ne sauraient suffire,
s’ils ne se voyaient pas pour accorder leurs plans, et qu’il le priait de se
rendre au Pont de la Motte sur la rivière de Loire pour y encontrer le maréchal
d’Aumont, qui lui dirait où le venir joindre.
    Navarre advint
donc audit pont, à une heure de l’après-midi, pour s’ouïr dire par le maréchal
que Sa Majesté et toute sa Cour l’attendraient à Plessis-les-Tours, et qu’il
avait amené des bateaux de Tours pour permettre à la noblesse de Navarre et à
ses gardes de traverser l’eau, le gros de ses troupes devant rester sur la rive
droite. Ayant dit, d’Aumont qui était un vrai vieux soldat à l’ancienne mode,
homme tout d’exécution et de peu de paroles, salua Navarre jusqu’à terre et
s’en alla, le laissant fort perplexe, et d’aucuns de sa suite fort
suspicionneux, pour ce qu’en effet le château de Plessis-les-Tours ne se
pouvait de la rive droite gagner que par embarcation, étant sis dans une sorte
d’île dedans le confluent de la Loire et du Cher qui font là un angle fort
aigu, sommet d’un triangle dont la base est coupée au surplus par le ruisseau
Saint-Anne, lequel joint les deux rivières à l’ouest de la ville. Il y avait
bien, à dire le vrai, un pont sur le ruisseau Saint-Anne [2] mais pour l’aller prendre, il eût
fallu remonter la rive droite de la Loire jusqu’au faubourg Saint-Symphorien et
l’ayant traversée, cheminer par la ville de Tours jusqu’au faubourg de La
Riche ; ce que le roi, d’évidence, n’avait point voulu, de crainte d’émouvoir
à sédition les manants et habitants, desquels bon nombre étaient ligueux.
    À deux lieues
des bateaux que d’Aumont nous avait promis, Navarre, le front barré d’une
soucieuse ride, mit pied à terre dans un petit pré où s’élevait un moulin, et
nous appelant, Rosny et moi, nous demanda ce que nous pensions de cette nasse
où nous allions nous fourrer à Plessis-les-Tours, séparés que nous serions du
gros de notre troupe par la Loire, le Cher et le ruisseau Saint-Anne et dans
cette sorte d’île, pouvant être accablés tout soudain par une force supérieure
qui nous eût attendus en embûche.
    — Ha !
Sire ! dis-je, à Dieu ne plaise que le roi vous veuille faire cette
traîtrise ! Entre la Ligue et lui, il y a, d’ores en avant, le sang des
guisards et une haine irréconciliable ! Vous êtes, Sire, son seul ami et
son unique appui !
    À quoi Navarre
hocha la tête, attachant sur moi son œil incisif, et assez content, je cuide,
de
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