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La Violente Amour

La Violente Amour

Titel: La Violente Amour
Autoren: Robert Merle
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prévoir la male fortune qui,
moins d’une année plus tard, accabla notre pauvre maître.
    J’aimerais,
comme un peintre sur un tableau, immobiliser ce moment où le duc de Guise,
percé de coups et gisant, géantin et sanglant, au pied du lit royal, le roi,
sur le seuil de son cabinet neuf, et en croyant à peine ses yeux de la mort de
son ennemi, me dit de l’examiner. Et sur mon examen (à vrai dire inutile)
apprenant de ma bouche que le prince lorrain avait rendu son âme à qui que ce
fût qui l’était venu prendre, redressa sa haute taille et le regard calme et
assuré, sans hausser le ton, mais avec une majesté que nous ne lui avions pas
vue en son regard et sa contenance depuis notre fuite hors Paris révolté,
prononça ces paroles :
    — Le roi
de Paris est mort. Je suis maintenant le roi de France, et non plus captif et
esclave comme je le fus depuis les barricades.
    Et me donnant
alors une bague que Beaulieu venait d’enlever du doigt de Guise, laquelle avait
dans son chaton un cœur de diamant, le roi me commanda de l’apporter à Navarre,
avec qui se voulant réconcilier, il désirait unir ses forces pour lutter contre
la prétendue Sainte Ligue, se doutant bien que la fin du guisard n’était point
la fin de la Ligue, bien le rebours.
    Je fus à
quelque peine de saillir hors du château en la ville de Blois, toutes les
portes ayant été closes, remparées et gardées dès l’arrivée au conseil de Guise
et du cardinal, afin que la nasse se refermât sur eux et les retînt. Et encore
que Laugnac de Montpezat, le capitaine des quarante-cinq, me donnât pour
escorte La Bastide et Montseris, lesquels se bouchaient fort étroitement dans
leurs manteaux pour qu’on ne vît point leur pourpoint éclaboussé du sang guisard,
il ne fallut pas moins que l’intervention du seigneur de Bellegarde pour me
faire ouvrir une petite poterne donnant sur l’arrière du château. De là nous
passâmes en ville laquelle, sous une pluie battante et un ciel lourd et noir, s’éveillait
à peine, ignorant encore l’exécution du prince lorrain, mais pour fort peu de
temps, car nous vîmes, cheminant en sens inverse de notre trio, et gagnant le
château, une forte troupe d’archers y conduisant, les piques basses, une
demi-douzaine de prisonniers ligueux, parmi lesquels je reconnus le président
de Neuilly, La Chapelle-Marteau et le comte de Brissac, desquels je fus bien
aise de n’être pas reconnu, ayant, comme j’ai dit, les cheveux et la barbe
teints en noir et la toque des quarante-cinq fort enfoncée sur les yeux.
J’observai que La Chapelle-Marteau, plus jaune que jamais, trémulait comme
feuille de peuplier au vent ; que le président de Neuilly larmoyait (mais
ni plus ni moins qu’à l’accoutumée, ayant le pleur facile et le cœur dur) et
que seul faisait bonne contenance le comte de Brissac, se peut parce qu’il
avait, comme dit Chicot, plus d’un tour dans ledit sac, et ne désespérait pas
de la clémence du roi. Il marchait, la crête haute, l’épaule roide et de sa physionomie
(mais c’était là son ordinaire) l’œil louche et la bouche tordue, et à ce que j’imaginais,
tournant déjà en sa retorse cervelle quelque belle phrase d’excusation à Sa
Majesté pour la part qu’il avait prise aux barricades de Paris.
    Je laissai ces
archiligueux à leur fortune et combien que j’appète peu au sang, la leur
souhaitant la plus male possible, tant ils avaient fait d’écornés au nom de la
Ligue à mon pauvre bien-aimé souverain. Et les dalles de l’Auberge des deux
pigeons à la parfin sous mon pied fatigué, sourd aux questions de mon
Miroul, me jetai sur mon lit et sans même me débotter, m’endormis, n’ayant pour
ainsi dire pas fermé l’œil depuis deux jours, ma nuit avec Du Halde dans la
garde-robe du roi n’ayant été qu’une longue veille devant le feu, tant Du Halde
avait craint de passer l’heure à laquelle le roi lui avait commandé de l’éveiller.
    J’eus le
sentiment de ne m’être ensommeillé que cinq petitimes minutes quand deux mains
me saisissant au col et me secouant, je les contresaisis et les serrant au
poignet dans l’étau de mes doigts, huchai d’une voix terrible :
    — Mordedienne !
Qu’est-cela ? Que me veut-on ? Qui ose m’affronter céans ?
    — Hé !
Monsieur ! Lâchez-moi ! Ce n’est que je ! Je, Margot, votre
chambrière ! Plaise à vous de me dépoigner ! Je ne vous veux point de
mal et suis sans
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