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La dottoressa

La dottoressa

Titel: La dottoressa
Autoren: Graham Greene
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il avait tendu un filet sur l’étal ; même pour le
peu que j’avais réussi à voler, il avait encore trouvé le moyen de s’en
apercevoir.
    Alors, j’ai flanqué mes cerises sur le filet et je me suis
sauvée en courant.
    Oui, oui, c’était très vilain. Tant et si bien que, voyez-vous,
ça aussi j’ai dû le confesser. Et la pénitence… il a bien fallu que je la fasse,
et ça n’avait rien de drôle, car je ne pouvais pas m’empêcher de me représenter
les perles de mon chapelet comme des cerises, et ce que ç’aurait été bon d’en
chiper encore et de ne pas être tout le temps si pieuse ! Du coup, je suis
redevenue une révoltée, et de là j’ai fait de la dépression – c’est
seulement quand on est dans le trou qu’on demande à Dieu de pardonner et aussi
qu’on réclame des faveurs.
    Mais cet endroit du Tivoli où on m’avait battue à cause de
tous les péchés marqués dans le missel, ah ! ce qu’il était joli en ce
temps-là ! Ce n’était pas du tout bâti partout comme maintenant. Il y
avait, vous savez, un grand espace planté d’arbres et une vaste prairie où on
pouvait cabrioler, enfant.
    Quand j’étais aux Ursulines, pour rien au monde je n’aurais
voulu que le cocher et la voiture m’attendent à la porte du couvent : je
serais morte de honte, de devoir monter dans ce magnifique équipage devant les
autres qui, toutes, faisaient le trajet aller et retour à pied. De sorte que le
cocher devait s’arrêter dans l’Annagasse, alors que le couvent, lui, c’est
Johannesgasse.
    Il y avait aussi des moments où nous allions nous promener
en voiture tous les jours au Prater, à midi. Pour le Jause, comme on
appelait ça – vous dites « le onze heures », non ? Donc, nous
étions tous les jours à midi au Prater, au Lusthaus. Et en ce temps-là, les
prairies étaient encore pleines de cerfs et de daims roux. C’était ravissant.
    Moi, bien sûr, jamais je ne restais dans la voiture. Hop !
je sautais, je courais, toujours, au lieu d’avoir envie de demeurer là avec mes
parents comme une gentille petite fille. Je m’approchais tout doucement des
daims, ils me regardaient et il y en avait qui continuaient à brouter et d’autres
qui s’écartaient, mais qui revenaient si je m’asseyais sans bouger. Je leur
donnais des noms à tous, et puis j’oubliais lesquels, et eux aussi.
    Sauf Elisabeth, qui m’aimait bien d’un peu loin et qui
répondait à son nom en s’arrêtant de brouter pour lever la tête et me faire un sourire.
Seulement, je découvris que c’était François-Joseph que j’aurais dû l’appeler :
mes yeux n’étaient pas allés regarder là où il fallait pour savoir de quoi ça
avait l’air, derrière. À la suite de ça, j’ai ouvert les yeux et changé les
noms.
    Ce qui me rappelle… que de fois, un peu plus tard, j’ai
gâché une brève rencontre avec un garçon ou un autre en éclatant de rire. Impossible
de m’en empêcher. Sitôt que leur machin se redressait, toujours j’éclatais de
rire. Et comme une folle ! Alors, eux, ça les rendait furieux, et le
machin baissait le nez, et fini, plus personne ! Mais moi, impossible de m’empêcher
de rire. C’est seulement quand je ne regarde pas que ça va et que c’est bien. Ja,
ja, mais alors à un point !…
    J’ai parlé de brèves rencontres parce que c’est ça que je
préférais, toujours. Hop ! et on n’en parle plus. Bien sûr qu’on peut l’imprimer,
ça fait partie de mon personnage.
    Bon, mais que je vous en dise un peu plus long sur mes
classes aux Ursulines. J’y suis restée jusqu’à l’âge de quatorze ans. J’étais
vraiment le contraire de sage, et je me suis fait souvent pincer. On ne me
gardait que parce que Maman était preneuse de toutes leurs espèces de tracts et
de publications catholiques. Pieuse, je l’étais toujours, naturellement, mais
méchante fille aussi. Je ne marquais plus tous mes péchés, pour ne pas être
battue à la maison ; j’avais appris un peu la furberia. Mais pas
assez, oh ! non. Et ça n’a pas changé, je ne suis furba que quand
ça ne sert à rien, jamais quand ce serait important. C’est comme ça avec moi. Je
suis ainsi faite.
UNE ROSSÉE À ANACAPRI
    Avant que j’aie tout oublié, il faut que je raconte comment
j’ai reçu encore la raclée, bien des années après. J’avais mes diplômes de
médecin et j’exerçais à Capri quand c’est arrivé. Ça vous amuse ? Vous
croyez qu’on m’a seulement
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