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La Cour des miracles

Titel: La Cour des miracles
Autoren: Michel Zévaco
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à Monclar que les truands dormaient et qu’on pouvait envahir la Cour des Miracles.
    – Parle ! dit rudement l’un des juges en s’adressant à Manfred, Tricot te répondra ensuite.
    – Je répète ce que j’ai avancé. Tricot vous trahit. Les sentinelles qu’il avait posées lui-même étaient de connivence avec lui.
    – La preuve ? hurla Tricot.
    Lanthenay apparut.
    – Je viens de faire remplacer toutes les sentinelles, dit-il ; j’ai fait lier celles que Tricot avait postées ; toutes ont avoué qu’elles avaient reçu pour mot d’ordre : Ne rien dire et laisser passer.
    – Qu’as-tu à dire ? fit l’un des juges.
    – Que les sentinelles ont été payées pour m’accuser, ou qu’elles n’ont pas compris l’ordre que j’avais donné.
    – J’accuse Tricot d’avoir eu des entretiens avec le grand prévôt, dit fortement Manfred.
    – Réponds ! dit un juge.
    – Je réponds que c’est faux ! Si cela est vrai, c’est que quelqu’un m’aurait vu ?… Qui est ce quelqu’un ?
    – Moi ! dit Ragastens.
    Tricot devint livide. Il fixa sur le chevalier un regard hébété. Puis, faisant un effort, il murmura :
    – Je ne vous connais pas…
    – Qui est cet étranger ? Comment est-il parmi nous ? demanda un juge.
    – Oui ! oui ! s’écria Tricot en reprenant tout son aplomb… Qu’il dise comment il a pu entrer parmi nous !
    – C’est bien simple, répondit tranquillement le chevalier ; vos sentinelles m’ont laissé passer parce qu’elles avaient reçu l’ordre de laisser passer tout ce qui viendrait de la cour. On m’a pris pour un seigneur du roi…
    A ces mots, il s’éleva une furieuse clameur, et Tricot vit se tendre vers lui les poings énormes des truands.
    Mais tel était l’instinct de discipline chez ces natures primitives que pas un ne fit un pas : le tribunal n’avait pas encore statué.
    – C’est un étranger ! hurla Tricot pour dominer le tumulte. Aurez-vous plus de confiance en cet homme, espion probable, qu’en moi que vous connaissez et aimez depuis vingt ans ?
    Ragastens fit un pas et saisit le poignet de Tricot.
    – Tu m’as appelé espion, dit-il de cette voix qui, chez lui, était l’indice d’une confiance illimitée en lui-même, tu vas demander pardon…
    Tricot poussa un cri de douleur et essaya de se débattre.
    La foule des truands, muette, attentive, regardait avidement.
    Ragastens, immobile, presque souriant, tendit ses nerfs dans un effort prodigieux. Le brigand se débattit une seconde encore, puis, pantelant, blême de rage, tomba à genoux et râla :
    – Pardon…
    Il y eut des trépignements de joie terrible dans cette cohue que le spectacle de la force opposée à la force faisait palpiter.
    – Noël ! Noël ! vociférèrent les ribaudes enthousiasmées.
    Mais Manfred fit un geste.
    Le silence se rétablit. Il parla :
    – Frères, un jour j’ai été pris comme jeune loup par les renards du grand prévôt. Acculé au gibet de Montfaucon, je me suis réfugié dans le charnier. Savez-vous ce qu’a fait M. de Monclar ? Il a fermé la porte de fer et a placé douze gardes devant cette porte en ordonnant de me laisser mourir de faim…
    Il nous serait difficile de donner une idée de la tempête que ces mots soulevèrent. Toutes les imprécations connues dans toutes les langues d’Europe se croisèrent et se heurtèrent à l’adresse du grand prévôt !…
    – Je lui mangerai les tripes !…
    – Je veux que son crâne me serve de gobelet !…
    – Il faut le rôtir à petit feu !
    Ces exclamations roulèrent furieusement au-dessus de ces mille têtes convulsées et féroces.
    – Frères, reprit Manfred, un homme est alors arrivé. Il a mis en fuite les douze gardes du grand prévôt ; il a défoncé la porte de fer et m’a dit : « Tu es libre ! » Cet homme, le voici !
    Il désignait Ragastens.
    Les cris reprirent, mais le plus vieux des juges étendit les deux bras, et le silence se fit avec la brusquerie instantanée de tous les mouvements qui agitaient ces hommes.
    – Honneur à ce noble étranger, s’écria le vieux truand, farouche et curieuse physionomie, avec sa grande barbe grise, ses cheveux épars ; glorifié soit-il ! Chez nous, chez nos enfants, et les enfants de nos enfants, jusqu’aux générations les plus reculées, le souvenir de sa hardiesse et de son courage demeurera en exemple. Qu’il parle ! Il nous fait honneur, en venant parmi nous.
    Ragastens,
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