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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse
Autoren: Louis Noir
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hommes de l’embuscade causaient entre eux à voix basse.
    Ces individus, qui avaient des façons de parler trop Croix-Rousse, pour être de vrais mariniers, semblaient éprouver des scrupules et des inquiétudes.
    – La femme sera accompagnée, disait l’un. Elle criera.
    – L’homme la défendra   !
    – Le temps de les « ficeler » et il viendra quelqu’un.
    – Et si, par hasard, une patrouille de la garde nationale passe, nous serons pincés.
    – Et si nous sommes pincés, ça ira loin.
    Une voix dit   : – Imbéciles   !
    On se tut.
    C’était l’homme de haute taille, le chef de la bande évidemment, qui venait de lancer cette apostrophe avec une conviction profonde et fortement accentuée.
    Cette troupe devait être disciplinée, puisque personne n’osait protester contre cette appellation humiliante.
    – Imbéciles   ! répéta le chef.
    Et il reprit, procédant avec l’ordre et la méthode des esprits supérieurs.
    – Primo, nous sommes nombreux et nous avons nos gourdins.
    – On défend de s’en servir   ! dit une voix avec l’accent des faubourgs de Paris   ; on veut qu’on dévalise la femme sans lui faire de mal. Nous avons des gourdins, mais c’est comme si nous n’en avions pas, ah   !…
    – Toi, la Ficelle, dit le chef, tu as toujours des objections à faire, et tu vois midi à quatorze heures. On n’a pas défendu absolument d’utiliser les gourdins, on a recommandé d’en user le moins possible et seulement si le vieux se débattait trop.
    – Ah   ! c’est un vieux.
    – Oui   ; de plus, c’est un bedeau.
    – Sans te commander, chef, est-on bien sûr que c’est un donneur d’eau bénite   ? demanda la Ficelle avec une insistance prouvant qu’il était le seul de toute la bande qui osât faire des observations.
    – Puisque je te le dis. Est-ce que je vous dore jamais la pilule, moi   ! est-ce que je blague jamais, moi   !
    – Si c’est un rat d’église, dit la Ficelle avec satisfaction, on pourra, en effet, sauter dessus sans être obligé de l’étourdir d’un coup de bâton   ; c’est lâche, ces bêtes à bon Dieu.
    – Pourtant, dit le chef, s’il se débattait par trop, s’il criait, on pourrait user du gourdin sans en abuser. La consigne est bien simple   : assommez au besoin, ne tuez pas.
    – Et la femme   ? demanda la Ficelle, qui paraissait s’intéresser au sexe.
    – La femme   ! c’est mon affaire. Il faut de la délicatesse. Je l’étrangle légèrement et je la bâillonne.
    – Dites donc, chef, est-elle jolie   ?
    – On le suppose.
    – Vous ne l’avez pas vue   ?
    – Non   ! Mais on la verra.
    À l’un de ses hommes qui causait à voix basse avec son voisin, le chef ordonna rudement   :
    – Gueule-de-Loup et vous autres tous, du silence maintenant.
    Tous obéirent. Cette bande évidemment se composait d’hommes très accoutumés les uns aux autres, très camarades puisqu’ils s’étaient donné à tous des sobriquets, habitude de voleurs et de mouchards.
    Le silence s’était fait profond. Bientôt le quart après dix heures sonna.
    – Attention   ! dit le chef. Elle ne peut tarder   ! Car on nous a dit de dix heures à dix heures et demie, et nous allons bientôt entendre trottiner la souris et le rat d’église.
    Puis avec autorité   :
    – De l’ensemble   ! À moi la femme   ! Que personne n’y touche que moi. Toi l’Enrhumé, tu sautes sur le bedeau et tu lui serres le cou avec ton mouchoir à nœuds   ; Gueule-de-Loup lui lie les bras avec sa corde et l’Amitié lui passe un nœud coulant aux jambes.
    – Et moi   ? demanda la Ficelle, humilié de ne rien faire.
    – Toi, tu as du jugement et du sang-froid   ; tu tiendras en réserve le coup de gourdin.
    – À la bonne heure   ! dit la Ficelle touché de cette marque d’estime.
    Et comme il avait la vue plus perçante que les autres, il regarda dehors.
    – Rien encore   ! dit-il.
    – Va donc jusqu’à la Saône, commanda le chef, voir si les mariniers ne dorment pas au fond du bateau.
    La Ficelle traversa le quai, descendit sur la berge, vit dans un assez fort bateau solidement amarré, trois mariniers bien éveillés (des vrais ceux-là) et il remonta faire son rapport.
    – Tout va bien sur l’eau   ! dit-il.
    – Bon   ! fit le chef.
    – Mais, demanda l’Enrhumé qui devait son surnom à sa voix éraillée, résultat probable d’un abus fréquent de liqueurs fortes, mais… mais,
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