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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse
Autoren: Louis Noir
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Le Guet-apens
    Par un soir des premiers jours de mai, Lyon commençait à s’endormir.
    Dix heures venaient de sonner lentement à l’horloge de l’église métropolitaine, le couvre-feu tintait, éveillant les échos de la vieille basilique, faisant vibrer lugubrement les profondeurs de ses cryptes, s’épandant delà dans l’espace et remontant, en lentes ondulations, vers les hauteurs escarpées de Fourvière.
    Dans les casernes, les roulements sourds du tambour et les notes étouffées de la trompe sonnant en sourdine l’extinction des feux répondaient au son de la cloche.
    À cette époque et à pareille heure, les portes des maisons étaient closes depuis longtemps et l’on voyait à peine çà et là quelques lampes filtrer des lueurs incertaines à travers les interstices des volets fermés.
    Le quai de l’Archevêché, mal éclairé, s’étendait silencieux, couvert d’ombre par ses grands arbres qui bourgeonnaient déjà   ; le ciel était chargé de nuages lourds, formés de vapeurs tièdes, courant très bas et venant du midi.
    Lyon était alors divisé, comme toute la France, en deux partis   : les Jacobins et les Girondins   ; derrière ceux-ci se cachaient beaucoup de royalistes   ; aux malheurs de l’invasion, allaient se joindre les horreurs de la guerre civile.
    Déjà, les troubles politiques avaient produit des conflits déplorables, par suite de la mésintelligence des partis, dès que la nuit devenait noire, les rues se vidaient, chacun se retirait chez soi, car on ne se sentait plus protégé dehors.
    Lyon si riche, si tranquille, si bien surveillé, était devenu une ville troublée, inquiète, où la misère de la population et l’indifférence de trois polices faisaient surgir des voleurs et des assassins.
    En ce moment même, une embuscade est tendue par un groupe d’individus d’allures plus que suspectes qui, dans l’allée de traverse obscure d’une maison du quai de l’Archevêché, se tiennent cachés, assez nombreux pour former une bande redoutable   ; ces hommes, vêtus comme les mariniers, portent le chapeau rond de feutre noir   : munis de solides bâtons, ils attendent et ils sont évidemment aux aguets.
    L’état politique de la ville favorise, du reste, toutes les audaces malsaines.
    Il y a trois polices   : la garde nationale dévouée aux Girondins, les agents municipaux, qui ne savent trop à qui obéir, et la police secrète du comité central, qui agit pour le compte des Jacobins, et qui prépare leur triomphe.
    En février, c’est-à-dire tout récemment, les Girondins, forts de l’appui du ministère de leur parti encore au pouvoir, ont saccagé le club des Jacobins, et ils ont voulu casser la municipalité, mais trois membres de la Convention sont venus rétablir l’ordre et ils ont adopté une politique de bascule, qui n’a fait qu’équilibrer les forces entre les partis.
    De là, cette situation étrange de trois polices se contrecarrant, et de trois partis se livrant à des guets-apens et à des violences telles que Châlier, chef des Jacobins, a une garde spéciale.
    Trois polices, point de police.
    Aussi, à cette heure, n’était-il pas prudent de s’aventurer sans armes dans les rues désertes, encore moins sur les quais, près de la Saône qui garde si longtemps les noyés dans les enlacements de ses longues herbes.
    Rien d’étonnant donc à ce qu’une bande, ayant évidemment dessein de se livrer à une attaque violente, fut cachée dans cette allée noire de la maison du quai de l’Archevêché.
    Ces hommes, à coup sûr, avaient des intelligences dans la maison même, car, de temps à autre, une porte intérieure donnant sur l’allée, s’ouvrait sans bruit et une voix demandait très-bas   :
    – Ne voit-on rien   ?
    – Non, répondait un des individus placés en embuscade.
    – N’entend-on rien   ?
    – Rien.
    – Elle viendra, pourtant   ! affirmait la voix   ; elle doit aller à un rendez-vous et passer par ici.
    – Du moment où c’est sûr, patientons.
    – Surtout, reprenait la voix, ne manquez pas de m’appeler, si vous entendez des bruits de pas. Je ne veux pas de méprise.
    – Entendu   ! disait laconiquement un grand gaillard, maigre, efflanqué, ayant toutes les allures d’un chat de gouttière.
    Et la porte se refermait pour se rouvrir bientôt, et la voix répétait les mêmes questions, suivies des mêmes réponses.
    Dans l’allée, quand le questionneur impatient était rentré, les
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