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La Bataillon de la Croix-Rousse

Titel: La Bataillon de la Croix-Rousse
Autoren: Louis Noir
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répéta-t-il, avec l’embarras de langue d’un alcoolique… pourquoi faut-il porter ces… ces… gens là dans le bateau…
    – Pourquoi   ? c’est l’ordre.
    – On pourrait les… les… dévaliser dans la chambre.
    – Et les y laisser, n’est-ce pas   ? Tu es une triple brute   ! Les laisser dans cette chambre   : autant vaudrait donner ton adresse, imbécile   ; tandis qu’un bateau, sur l’eau, ne laisse pas de traces.
    – Et qu’est-ce qu’on en fera de ces… ces… gens-là… quand on les… les… aura fouillés   ?
    – Çà n’est pas ton affaire. Si l’on nous commande de les noyer, nous les noierons.
    – Oh   ! fit La Ficelle… noyer   ?
    – Pourquoi pas   ? On n’en a rien dit, mais je prévois… que, du moment où l’on ne veut pas que nous jouions du couteau, où l’on ne nous laisse taper avec les gourdins qu’à la dernière extrémité, c’est que l’on ne tient pas à ce que les corps portent des marques   ; un coup de gourdin peut passer pour une contusion reçue par le noyé contre un rocher de la Saône. La noyade peut passer pour un accident.
    – Mais, dit la Ficelle, tu parles, chef, comme si l’on voulait absolument la mort de ces gens-là   !
    – On veut d’abord ce qu’ils ont sur eux, puis on veut s’en débarrasser. Et je ne crois pas que, du moment où l’on a préparé un bateau, par une si grosse Saône, ce soit pour faire prendre un simple bain d’agrément au rat d’église et à la petite souris de sacristie.
    – Si j’avais su…
    – Tu vas discuter, maintenant…
    – Non… trop tard… mais si j’avais su…
    – Attention   ! les voilà   ! dit Gueule-de-Loup placé en sentinelle.
    Le chef alla frapper à la porte de la chambre   ; elle s’ouvrit.
    – Les voilà, dit le chef à celui qui ouvrait   ; on vous attend.
    – Vous êtes tous prêts   ?
    – Oui.
    – Eh bien, agissez en vigueur et sans hésiter.
    Le silence se refit profond dans l’allée et l’on entendit un bruit de pas sur le quai. Si peu clair qu’il fit, on pouvait distinguer la mise des deux victimes qui s’approchaient du guet-apens tendu dans l’allée. L’homme portait ce vêtement quasi ecclésiastique, cher aux jésuites de robe courte.
    Le chef l’avait bien dit   ; ce bedeau ne devait pas peser bien lourd.
    Aussi, la Ficelle, évidemment de bonne humeur et augurant bien de l’expédition, donna-t-il un coup de coude significatif à Gueule-de-Loup qui sourit dans l’ombre. Ce Gueule-de-Loup n’avait pas le sourire aimable, car ce sourire découvrait le côté gauche de la lèvre supérieure, et montrait un croc formidable d’où était venu le surnom de l’individu. Il avait, du reste, des attitudes de bête fauve, et semblait se ramasser pour mieux bondir sur ses victimes qui s’approchaient toutes deux pas à pas.
    Si le bedeau était peu sympathique au premier aspect et tout enveloppé d’hypocrisie, ce qui sautait à l’œil, même de loin, même dans la nuit, en revanche, la jeune femme qui l’accompagnait, semblait devoir être charmante. Jeune assurément, car elle allait légère avec la grâce sautillante d’une fauvette   ; il y avait trop de ressort dans la démarche, trop de vivacité dans l’allure, trop de grâces dans les ondulations du corps et d’élégance dans la tournure pour que cette femme eût plus de vingt-cinq ans et qu’on ne la devinât point jolie. Elle était vêtue comme une ouvrière, mais très coquettement, et elle portait sa mante sur son bras, car il faisait une chaleur tiède.
    La Ficelle, qui y voyait la nuit comme les chats, poussa un soupir.
    – Noyer cette petite femme   ! pensait-il. Et son cœur se fendait.
    La Ficelle avait fait, en quelques secondes, toutes les réflexions que nous venons d’écrire en quelques lignes   ; mais le moment d’agir arrivait et il n’y avait pas à reculer.
    Penchés sur le bord de l’allée, le corps tendu, les muscles raidis, les mains crispées sur leurs corps, les faux mariniers retenant leur haleine, s’apprêtaient à bondir, attendant un signal du chef   ; cette troupe, je l’ai dit, semblait soumise à une discipline qui lui donnait de l’ensemble.
    Quand le bedeau et sa compagne passèrent devant l’allée, le trou béant de la porte ouverte leur fit une impression désagréable   ; la petite ouvrière fit un bond léger de côté et le bedeau deux pas en arrière.
    – Allez   ! cria tout à coup une voix au
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