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George Sand

George Sand

Titel: George Sand
Autoren: Elme Caro
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idées. Quelle que fût la valeur des siennes, elle y croyait fortement, elle les prenait fort au sérieux ; elle ne permettait pas qu'en quelque milieu que ce fût, sceptique ou gouailleur, on en plaisantât ; elle y subordonnait instinctivement la meilleure partie d'elle-même, son art. Or les idées ont une telle force en soi, que, fussent-elles contestables, elles communiquent quelque chose de cette force aux esprits qui s'en nourrissent ; elles lui donnent un caractère d'élévation et de générosité en comparaison de ceux qui se font une sorte d'esthétique de l'indifférence absolue.
    C'est là le secret de cette supériorité qu'elle semble avoir conservée dans sa longue correspondance avec Flaubert, où furent abordées quelques-unes des plus délicates questions de la littérature, où purent se contrôler réciproquement deux manières tout à fait diverses et presque opposées de concevoir l'art.
Cette controverse amicale dura près de douze années, de 1864 à 1876. Comment était née cette amitié littéraire entre deux personnages si différents, il importe peu ; sans doute ils se rencontrèrent un jour à ce fameux dîner Magny où George Sand ne manquait pas de paraître, quand elle passait par Paris, ne fût-ce que pour reprendre langue dans ce pays des lettrés qu'elle oubliait dans les longs séjours de Nohant. Après cette rencontre, plus ou moins fortuite, Flaubert avait applaudi de toutes ses forces à la première représentation de Villemer, et George Sand, reconnaissante, lui écrivait «qu'elle l'aimait de tout son coeur». La connaissance était faite ; les lettres devinrent de plus en plus fréquentes ; elles devaient durer autant que la vie de George Sand. Elle avait admiré Madame Bovary ; pour Salammbô, elle avait tout de suite vu le défaut de la cuirasse. «Ouvrage très fort, très beau, disait-elle, mais qui n'a vraiment d'intérêt que pour les artistes et les érudits. Ils le discutent d'autant plus, mais ils le lisent, tandis que le public se contente de dire : «C'est peut-être superbe, mais les gens de ce temps-là ne m'intéressent pas du tout [Lettre à Maurice Sand du 20 juin 1865.].»
Elle avait laissé, sans doute, percer quelque chose de cette impression en causant avec Flaubert, qui, de son côté, avait plaisanté, paraît-il, «le vieux troubadour de pendule d'auberge, qui toujours chante et chantera le parfait amour».
    Troubadour, le nom plaît à George Sand, elle l'adopte en riant et se désigne ainsi elle-même depuis ce jour-là. L'artiste et le troubadour, c'était bien là l'opposition des deux auteurs, caractérisée par deux mots pittoresques, et ce fut l'occasion toute naturelle de la controverse. Il est assez vraisemblable qu'avant cette époque George Sand, bien qu'elle eût souvent touché en passant à ce sujet de l'art, n'avait jamais porté sa réflexion sur son art personnel, qu'elle ne s'était jamais rendu un compte bien exact ni de ses procédés de compositions ni du but qu'elle poursuivait. Elle avait en cela, comme en autre chose, obéi à ses instincts et particulièrement à cette vocation d'écrire pour raconter et pour peindre, qui s'exprimait chez elle avec une force irrésistible et une facilité qui tenait du prodige. Ce qui l'amena à réfléchir sur ces sujets et à se définir elle-même, ce fut le spectacle des tendances et des richesses contraires qui surgissaient autour d'elle, et la comparaison des talents les plus divers qui s'imposait à elle. Le réalisme ne faisait que commencer ; elle put à peine connaître le premier grand succès de M. Zola. Mais Flaubert, mais Jules et Edmond de Goncourt révélaient dans chacune de leurs oeuvres un art nouveau, où se combinaient l'influence de Balzac par l'intensité de l'observation et celle de Théophile Gautier par la préoccupation et le souci de la forme. Il y avait là des symptômes qui saisirent la curiosité de George Sand, tenue en éveil et avertie. Elle profita des hasards de la vie d'abord, puis des relations d'amitié qui la rapprochèrent de Flaubert, pour préciser, dès qu'elle en eut l'occasion, les différences de tempérament littéraire qu'elle sentait en elle, en présence de ces groupes nouveaux ou des personnalités qui en résumaient le mieux les tendances.
    Le contraste était frappant entre sa nature, prodigue jusqu'à l'excès, toute en effusion littéraire, d'une fécondité inépuisable, d'une abondance si spontanée et si naturelle
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