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Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia

Titel: Francesca, Empoisonneuse à la cour des Borgia
Autoren: Sara Poole
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Rodrigo Borgia, la voix décisive venant du vieux patriarche de Venise qui, dit-on après, avait raconté à plusieurs cardinaux quels grands amis Borgia et lui avaient été lorsqu’ils étaient tous deux enfants, il y avait tant d’années de cela, à Venise. À ce jour, personne ne sait réellement pour qui il crut voter.
    Dans un geste magnanime lui ressemblant si peu que cela fit jaser, le Cardinal Giuliano della Rovere (dont on remarqua la mauvaise mine) accepta la motion que l’on avait déposée pour élire Borgia à l’unanimité.
    Lorsque l’on ouvrit les fenêtres donnant sur la place et que l’on cria « Habemus Papam ! », la foule hurla de joie. Rome (et toute la chrétienté) n’aurait pas à subir le chaos engendré par une longue et âpre lutte pour la papauté. Le Sacré Collège avait choisi un homme qui, malgré ses origines espagnoles, avait su conquérir le cœur des Romains. Ces derniers entamèrent promptement les réjouissances, avec leur enthousiasme habituel.
    Pendant ce temps-là, Borgia était porté jusqu’à la basilique Saint-Pierre sur la sedia gestatoria, le trône mobile du pape, et hissé sur le maître-autel, où chacun des cardinaux vint lui présenter ses hommages. Je ne saurais vous dire si della Rovere s’acquitta dignement de cette tâche, la basilique n’étant assurément pas un endroit pour « un » page couvert de vomissures, et qui avait de surcroît oublié de remettre son chapeau.
    Je retournai au palazzo en passant par des rues remplies de festoyeurs se jetant déjà sur les immenses quantités de nourriture et de vin que Borgia s’était arrangé, bien sûr, pour mettre à disposition en prévision de sa victoire. Non loin du Pons Ælius, je tombai par hasard sur Petrocchio, que l’on avait chargé d’organiser l’événement. Le Maestro me fit la grâce d’un large sourire et, en dépit de mon état, d’une étreinte non moins enthousiaste.
    — Il est pape ! s’extasia-t-il. Notre Borgia à nous est pape !
    Il n’y avait pas de doute à cela. Quant à savoir s’il serait capable de voir au-delà des intérêts de La Famiglia pour être « notre » pape…
    En arrivant au palazzo je trouvai les domestiques pris d’une fièvre soudaine, car ils devaient emballer au plus vite tous les effets de Borgia et les envoyer dans sa nouvelle maison. Renaldo fondit sur moi, visiblement choqué par mon apparence mais voulant tout savoir. Je lui dis ce que je pus sans m’étendre trop tout de même, et me rendis aussi vite que possible dans mes quartiers. Je n’avais aucune idée de l’endroit où j’allais me retrouver, mais je faisais confiance à Borgia pour y avoir déjà réfléchi. Malgré mon état de fatigue, je n’attendis pas plus longtemps pour rassembler mes affaires, les mettre dans mon coffre, et bien vérifier que le verrou secret était en place. Une fois cela accompli, seulement, je pris le temps de prendre un bain et de revêtir des vêtements à moi.
    À peine avais-je fini qu’une servante frappa timidement à ma porte. Lorsque je lui ouvris, elle me tendit deux mots.
    — Ceci est arrivé pour vous, Madonna, murmura-t-elle sans oser me regarder. Telle était ma réputation, déjà, née de la rumeur mais alimentée par la vérité. Très peu de gens m’ont regardée dans les yeux depuis, en tout cas pas de leur plein gré. Je vis avec, mais on ne peut pas dire que ce soit plaisant.
    J’ouvris le premier mot après son départ. Debout près de la fenêtre, je parcourus rapidement les quelques lignes élégamment tracées :
    M fait route vers Florence. Je suis. T’envoie des nouvelles dès que j’en sais plus. DbE.
    Florence, l’opulente cité des Médicis. Qu’allait trouver là-bas le prêtre fou, et qu’est-ce que cela signifierait pour nous tous ? Au moins, je pouvais compter sur David pour remuer ciel et terre afin de découvrir ce que Morozzi comptait faire par la suite.
    Le second mot venait de Rocco. Il disait seulement que le matériel commandé était prêt et que je pouvais venir le chercher à son échoppe à ma convenance.
    Je m’y rendis le lendemain matin. Je me disais qu’il serait lâche de ne pas le faire, mais à la vérité, j’étais incapable de ne pas y aller.
    Nando jouait dans la rue. Il se leva d’un bond en me voyant et se jeta dans mes bras. Je m’agenouillai, le serrai fort et fis de mon mieux pour ne pas fondre en larmes en sentant entre mes mains cette petite créature bouillonnante
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