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Vengeance pour un mort

Vengeance pour un mort

Titel: Vengeance pour un mort
Autoren: Caroline Roe
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habileté, et elle s’en alla cacher sa pièce dans un coin obscur du bâtiment.
     
    Quand il fut à nouveau seul, Arnau Marça regarda la table avec dégoût. C’est étrange, songea-t-il avec un sourire narquois, comment l’approche de la mort peut ôter tout appétit. Toutefois, piqué par les commentaires insolents de Garcia, il ôta les linges de lin qui recouvraient les plats. Le rayon de soleil qui pénétrait dans sa petite cage à cette heure de l’après-midi illumina une écuelle pleine d’agneau braisé aux légumes. À côté, dans la pénombre, il y avait une assiette de sardines grillées et un poulet rôti à la broche – des mets bien délicats pour un homme pratiquement condamné. Johana y était pour quelque chose, assurément. Ces mets étaient ceux qu’elle adorait préparer, comme si elle avait projeté de partager le dîner de son époux dans cette cellule minuscule. Un instant, les larmes lui brûlèrent les yeux ; pour s’arracher à de telles pensées, il prit la demi-miche de pain placée près du poulet.
    Il en saisit l’extrémité pour en arracher un morceau, mais il la laissa retomber. Son repas n’avait plus rien d’appétissant, de même qu’un serpent venimeux ou un champignon vénéneux n’a rien d’attrayant.
    Un morceau de mie avait été retiré puis replacé avec grand soin. Un stratagème aussi gauche ne pouvait lui échapper. Son ennemi, quel qu’il fût, ne pouvait-il donc attendre que le bourreau fasse son œuvre ? Vu que l’issue du procès était évidente, sa mort prématurée ne pourrait que soulever des questions gênantes. Mais peut-être l’issue n’était-elle pas aussi évidente. Une étincelle d’espoir s’alluma en lui pour la première fois depuis son arrestation, deux jours plus tôt. Il rejeta cette idée et s’intéressa au pain. Il sortit le morceau de mie et l’examina soigneusement à la lueur dorée du soleil. Aucune odeur, aucun changement de couleur, ni poudre ni humidité suspecte. Après avoir emballé la miche dans la pièce de lin, il la présenta également à la lumière.
    On n’avait pas essayé de dissimuler le petit paquet de couleur brun-gris glissé à l’intérieur. Lentement, avec soin, il tira un morceau de parchemin plié, puis il l’ouvrit et découvrit, non pas quelque bizarre instrument de mort, mais un message écrit de la main sûre et familière d’une personne ayant fréquenté l’école des sœurs. « Ce soir, je vous serrerai dans mes bras. Ne désespérez pas. J. »
    Il réfléchit à ce message. C’était là un sujet plus alléchant que sa mort prochaine. Perdu dans ses songeries, il mangea toutes les sardines et la moitié du poulet sans même s’en apercevoir. Peut-être voulait-elle dire qu’elle passerait la nuit à prier pour lui et qu’elle rêverait de le tenir une fois encore dans ses bras. Non. Elle l’aurait exprimé plus clairement si tel avait été le cas. Johana disait toujours ce qu’elle pensait, et c’était là une de ses grandes qualités. Cette nuit, donc, et pour quelque obscure raison, elle était convaincue qu’ils seraient à nouveau réunis. Avait-elle déjà pris contact avec le procurateur ? Cela semblait improbable. Mais il était maintenant certain que le geôlier avait raison : elle était en ville.
    Il se versa du vin et attendit patiemment le retour de la petite fille. Il but lentement, comme si c’était le dernier breuvage sur terre, et, quand elle revint, il n’avait même pas fini son gobelet. Il ne souhaitait pas embrumer son esprit.
    — Tu peux m’apporter une plume et de l’encre ? lui demanda-t-il.
    — Oh oui, messire, dit-elle. Ceux qui savent écrire veulent toujours une plume et de l’encre, mais si vous pouvez payer, il vaudrait mieux que je vous apporte aussi quelque chose sur quoi écrire, non ? Ils pourraient trouver ça étrange.
    — Les trois choses, alors, dit Arnau qui ne put s’empêcher de sourire. Il ne faudrait pas que l’on trouve ça étrange.
    — Du vin, aussi. Ils s’attendent à ce que vous buviez beaucoup vu ce qui est censé arriver demain.
    — Et un prêtre ?
    — Vous n’en aurez pas besoin, murmura-t-elle avec assurance. Ce serait uniquement après le procès, comprenez-vous ? Mais il y a autre chose : il faut que vous demandiez la grande chambre. Elle coûte très cher, mais elle a dit que vous auriez assez d’argent. C’est important. Il faut que vous vous y installiez.
    — C’est
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