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Vengeance pour un mort

Vengeance pour un mort

Titel: Vengeance pour un mort
Autoren: Caroline Roe
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quelques sous supplémentaires pour que vous vous joigniez à nous ce soir. Ou quand vous le désirerez.
    — Donnez-moi le temps de réfléchir. C’est une très grosse somme d’argent. Et quoi que vous puissiez dire, je sais pertinemment que c’est moi qui encourrai tous les risques.
    — Doña Violant…
    — De quelle Doña Violant parlez-vous ? demanda le jeune Ramon dont les yeux s’éclairèrent enfin. La fille du vicomte ? La femme de Don Francesc ?
    — Quelle autre Doña Violant pourrait-on évoquer ? Elle a manifesté un certain intérêt à l’idée de se rendre ici pour vous voir jouer. Si elle est certaine de vous y trouver, naturellement.
    — Me voir jouer aux cartes ?
    Le jeune homme paraissait stupéfait.
    — Ou à quelque autre jeu que Doña Violant et vous-même imagineriez. La demeure, si vous prenez la peine de vous retourner pour regarder, est assez vaste pour accueillir toutes sortes de jeux…
     
    Perpignan, jeudi 2 octobre 1354
     
    — Madame votre épouse est en ville, señor. Les paroles du geôlier étaient pleines de respect, mais sa voix frissonnante de curiosité emplissait la cellule. Malgré toute la maîtrise de soi dont il faisait preuve, Arnau Marça sentit son ventre se contracter à ces mots.
    — Vous l’avez vue de vos propres yeux ? demanda-t-il d’un ton détaché comme si le geôlier n’était qu’un serviteur.
    — Non, Don Arnau.
    — Alors pourquoi conclure qu’elle est ici, mon bon Garcia ?
    — La nourriture que votre serviteur a apportée est de meilleure qualité aujourd’hui. J’en déduis donc qu’une épouse affectueuse est à l’origine de cette amélioration.
    — Voilà qui est audacieux, dit avec froideur le chevalier en se détournant.
    En dépit de ce que les remarques du geôlier pouvaient avoir de sournois, il savait exactement où se trouvait Johana, et cette certitude lui donnait la force de résister aux mesquineries de Garcia. Au moment de son arrestation, Arnau Marça avait eu pour premier réflexe d’envoyer à sa femme un message la priant de ne plus quitter l’enceinte du château. Elle ne devait en aucun cas se déplacer : si intrépide fût-elle, elle tremblait à l’idée de perdre son enfant.
    Garcia de l’Almunya referma la porte de la cellule d’Arnau et s’appuya contre l’huis, l’air sombre. Il voulait se venger d’Arnau Marça, qui le traitait comme un moins que rien. Il ne lui avait pas été facile d’accéder au poste qu’il occupait à présent. Il avait écarté bien d’autres candidats à la fonction de gardien de la prison royale. Il menait une vie agréable. Les devoirs du gardien étaient minimes, le salaire excellent, les revenus additionnels des détenus bien utiles et, parmi ses semblables, le prestige élevé. Cela faisait presque de lui un gentilhomme, et toutes ses relations le reconnaissaient pour tel. Il appréciait particulièrement d’accueillir dans son établissement un membre de l’aristocratie ou de la petite noblesse. Ils étaient élégants et généreux, même s’ils se montraient parfois fiers et arrogants, comme Arnau Marça. Et ils étaient à sa merci.
    Il médita là-dessus jusqu’à ce que l’arrivée du dîner de son prisonnier l’arrache à ses pensées, et il haussa les épaules. Il n’avait aucune raison de s’en faire. Ce n’était pas lui qu’on pendrait pour trahison dès la fin du procès. Demain, disait-on, et puis en route pour Malloles, pour Puig Johan, où il avait rendez-vous avec le bourreau. Où seraient alors ses sarcasmes et son arrogance ? Il entrebâilla la porte.
    — Les voilà enfin, señor, dit-il. Je vais vous faire porter votre repas.
    Le geôlier ouvrit grand la porte. Un subalterne entra, porteur d’une petite table chargée de plats couverts. Une fillette le suivait, qui serrait entre ses mains une cruche de vin. La table fut posée près de la chaise unique ; l’enfant déposa la cruche sur le sol, ramassa le gobelet du prisonnier et le posa sur la table.
    Arnau fouilla dans sa bourse, en sortit deux sous et en tendit un à chacun de ces serviteurs à l’air pitoyable.
    — Je vous remercie pour toutes vos attentions, dit-il d’une voix grave.
    — Merci, monseigneur, dit la fillette en fourrant la pièce sous sa robe déchirée. Je peux vous apporter encore du vin si vous le désirez, ajouta-t-elle d’une voix très douce, ou tout ce que vous voudrez.
    Sur ce, elle disparut, évitant les deux hommes avec
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