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Tarik ou la conquête d'Allah

Tarik ou la conquête d'Allah

Titel: Tarik ou la conquête d'Allah
Autoren: Patrick Girard
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s’étaient livrés,
la ville avait encore belle allure. Elle avait conservé ses thermes, son
théâtre, ses basiliques et les luxueuses demeures des riches propriétaires
terriens dont les domaines s’étendaient à perte de vue dans la campagne
environnante.
    Sertorius, descendant d’une vieille
famille sénatoriale romaine, lui avait offert l’hospitalité durant quelques
semaines. Affable et courtois, l’homme entretenait des relations commerciales
avec les négociants de la plupart des ports d’Hispanie, d’Italie et de Gaule.
Il n’avait pas caché à son invité la difficulté de la tâche qui l’attendait
dans ses nouvelles fonctions. À son arrivée à Septem, l’exarque avait dû
convenir que son hôte n’avait pas tort. Cette grosse bourgade sans charmes
était l’un des postes les plus exposés de l’Empire.
    Telle une pièce de métal coincée
entre le marteau et l’enclume, la ville était prise entre deux ennemis aussi
redoutables l’un que l’autre : les Wisigoths et les Arabes. Ceux-ci
attendaient patiemment le moment d’y porter la ruine et la désolation.
    Installés de l’autre côté du
détroit, les premiers descendaient de Barbares passés au service de Rome.
Longtemps adeptes de la doctrine hérétique propagée par l’évêque Arius [2] ,
ils étaient revenus depuis peu dans le giron de l’Église. Quatre-vingts ans
avant la naissance de Julien, ils avaient chassé du Sud de l’Hispanie les
dernières garnisons byzantines. Occupé à repousser les Perses, l’empereur
Héraclius n’avait pu venir au secours de ses lointains sujets. Le nouveau
maître du pays, Sisebut, avait expulsé sans ménagement les fonctionnaires
impériaux. Beaucoup s’étaient alors réfugiés à Septem et y avaient fait souche,
donnant naissance à un groupe influent dont les membres rêvaient de récupérer
les provinces que leurs pères n’avaient pas su défendre.
    Les Arabes, eux, constituaient, aux
yeux de Julien, la menace la plus sérieuse. Il les connaissait déjà puisqu’il
avait eu l’occasion de les combattre quand ces disciples d’un prophète nommé
Mahomet avaient osé mettre le siège devant Constantinople. À la tête de ses
hommes, il n’avait pas ménagé alors ses efforts pour repousser ces démons venus
de la lointaine péninsule Arabique qui occupaient désormais la Palestine, la
Syrie, la Perse, l’Egypte et la Cyrénaïque.
    Montant des destriers plus rapides
que l’éclair, ces guerriers avaient atteint les rives de l’Atlantique et
s’étaient rendus maîtres de Tingis [3] la localité voisine de Septem, ainsi que de la plus grande partie de l’ancienne
Afrique romaine, hormis Carthage et la Mauritanie Césarienne [4] .
    En découvrant cette situation,
Julien avait compris le cadeau empoisonné que lui avait fait Théodote. Soit il
succombait sous les coups de l’ennemi, soit il réussissait à conserver à
l’Empire sa plus lointaine province et, dans ce cas, victime de son succès, il
serait condamné à rester sur place jusqu’à la fin de ses jours. Pris en
tenailles entre deux forces antagonistes, Julien avait consacré l’essentiel de
son temps et de son énergie à donner des gages à ses voisins pour garder son
indépendance. Parce qu’ils étaient, eux aussi, des Chrétiens, il avait
recherché naturellement l’alliance des Wisigoths. Certes, il ne pouvait oublier
que l’un de leurs rois, Alaric, avait jadis assiégé et mis à sac Rome. Cet
événement avait frappé d’horreur les esprits. Philagrius, l’évêque de Septem,
aimait à rappeler le cri de douleur de Jérôme, le traducteur en latin de la
sainte Bible, quand il apprit l’entrée des troupes hérétiques dans la cité de
Romulus : « La lumière la plus éclatante de l’univers s’est éteinte,
la terre entière a péri avec cette ville. » Repoussés par les Francs de
Gaule, les Wisigoths s’étaient ensuite établis dans la péninsule Ibérique et y
avaient conquis des provinces appartenant en droit à l’Empereur.
    À l’origine mal disposé à leur
égard, Julien s’était fait aux mœurs étranges de ses turbulents alliés. Ils
portaient des cheveux longs comme des créatures efféminées et se servaient de
beurre pour la cuisine, et non pas d’huile, signe indéniable de leur
sauvagerie. Toutefois, ils s’étaient progressivement frottés aux bienfaits de
la civilisation. L’illustre évêque d’Hispalis [5] ,
Isidore, issu d’une vieille famille romaine,
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