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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince
Autoren: Jocelyne Godard
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subitement, consciente qu’elle
en disait trop, intriguant ainsi le Grand Prêtre.
    — Du Pays du Pount ! Parlerais-tu de
ces esclaves ramenés de l’expédition qu’a entrepris autrefois sa Majesté, la
pharaonne Hatchepsout ?
    Satiah hésita. À présent, elle ne pouvait plus
faire marche arrière.
    — Oui, murmura-t-elle.
    — Que fais-tu avec une esclave du Pount ?
Elles ont toutes été destinées au palais de Thèbes.
    — Cachou m’a été donnée en cadeau par ma
mère.
    — Et ta mère, d’où tenait-elle cette
esclave ?
    — Je ne sais pas, Grand Prêtre.
    Satiah rougit. Certes, elle ne voulait pas s’engluer
dans une suite de mensonges dont elle savait ne plus pouvoir sortir. Alors,
elle tenta de s’en tirer par l’une de ses boutades pleines de séduction qu’elle
avait pour habitude de lancer comme un atout lui permettant de gagner la
bataille.
    — Je vous en prie, Grand Prêtre, ne me
questionnez plus. Attendez la scène de mon spectacle que je vous jouerai ce
soir, dès que vous me l’aurez ordonné. Vous jugerez ensuite.
    Il fut fait comme il fut dit, car ce petit
prêtre ne semblait pas aimer les mensonges. Satiah et Cachou prirent un repas
léger fait de lait caillé, de raisins et d’un gâteau au miel pour ne pas
alourdir leurs gestes et leur esprit. Puis, elles s’apprêtèrent à jouer la
comédie, bien que Cachou tremblât à l’idée de se tromper dans les répliques qu’elle
devait donner à sa compagne.
    — Peu importe si tu te trompes, lui
chuchota Satiah. Ils savent que la comédienne, ce n’est pas toi.
    Devant une rangée de prêtres au crâne rasé, le
regard suspicieux – l’un d’eux leur jetait même une étincelle carrément
accusatrice – elles durent s’incliner bas à terre, le buste ployé, les
mains plaquées au sol.
    Le lieu choisi à cet effet était la grande
salle des offrandes. Au centre, une statue d’Osiris, le dieu des morts, trônait
en puissance. Elle était sculptée dans un beau granit couleur de jaspe aux
veines délicates et noires. À ses côtés, deux grandes urnes d’or recevaient les
offrandes. Sur les murs blanchis à la chaux vive, des peintures représentaient
la vie du roi Séthi I er . Elles s’étalaient de bas en haut et
forçaient étrangement le regard.
    Le Grand Prêtre fit signe aux jeunes filles de
se placer au centre du demi-cercle qu’ils venaient de former. Les prêtres d’Abydos
s’étaient assis en scribe, mains posées sur les genoux, attendant que Satiah
commençât son spectacle.
    — Puis-je disposer d’une tunique longue,
Grand Prêtre ? fit Satiah d’un ton tranquille. Celle que je porte ne
convient guère au personnage que je dois incarner. On ne doit voir ni mes bras,
ni mes jambes.
    — Fais comme si c’était une répétition.
    — C’est impossible, fit la jeune fille en
secouant énergiquement la tête. Une répétition doit se faire sans public.
    Le Grand Prêtre fit un signe à son intendant
pendant que son scribe personnel inscrivait le déroulement de la séance.
    — Cette jeune fille est bien exigeante,
constata-t-il d’une voix où la bonne humeur perçait pourtant. Apportez quelques-unes
de mes tuniques. Je ne suis pas grand de taille et l’une d’elles pourra, sans
doute, faire l’affaire.
    Intendant et scribe s’affairèrent aussitôt et
quelques minutes plus tard, ils présentèrent à Satiah un vêtement long et bleu
qui semblait ne jamais avoir été porté.
    — Cela ira, Grand Prêtre, fit-elle en l’enfilant
directement sur sa tunique courte. À l’exception, peut-être, des manches qui ne
me laissent pas assez d’aisance pour travailler avec les mains.
    Mais d’un bond Cachou fut près d’elle, fit un
large revers et l’affaire fut close.
    Satiah se plaça au centre du demi-cercle, décidée
à ne pas se laisser impressionner. Puis, elle fit quelques pas, les yeux
baissés, murmurant quelques mots pour créer un effet d’atmosphère. Enfin, elle
leva le visage et ouvrit les lèvres. Mais, elle resta quelque temps
silencieuse, laissant son public en alerte.
    Le regard en coulisse qu’elle glissa vers les
prêtres lui apprit qu’ils avaient l’air favorablement impressionnés. Il fallait
commencer. Lentement, elle éleva son bras, le coude à hauteur de l’épaule.
Puis, sa main balaya voluptueusement l’espace. Ainsi, elle allait jouer le rôle
de la déesse, celui de sa compagne Méryet, morte en accouchant de sa petite
fille laissée au harem
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