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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince
Autoren: Jocelyne Godard
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témoignage.
Vous avez rénové, bâti, construit, élevé des temples et des obélisques qui
plaisent aux dieux. Vous avez érigé le plus grand sanctuaire qui soit à Deir-el-Bahari,
mêlant avec harmonie les dieux et la nature en utilisant la roche qui s’offrait
à vous. Par le commerce, que vous avez su développer, vous avez donné du
travail aux artisans et aux agriculteurs. Vous avez apporté la paix qui, plutôt
que de détruire un peuple, le nourrit.
    Satisfaite, la pharaonne acquiesça de la tête.
    — Vous avez fait mieux encore, Majesté,
poursuivit le vieux Nakht. Vous êtes revenue du Pays du Pount couverte de
gloire et de prestige.
    Il redressa l’index de sa main et l’éleva au
niveau de ses yeux.
    — Aucun pharaon de votre dynastie n’avait
pensé à enrichir l’Égypte autrement que par l’apport d’esclaves rapportés des
pays conquis. Les dieux vous ont été favorables, Majesté, car votre cœur a
préféré la paix à la guerre.
    Il s’arrêta pour prendre une respiration qui
sortait d’on ne sait où, tant ses lèvres étaient fermées et les narines de son
nez pincées. C’est à peine s’il ouvrait la bouche pour parler.
    — Les dieux m’ont été favorables, dis-tu !
Ne le seraient-ils donc plus ?
    — L’ombre d’Osiris veille sur vous,
Majesté.
    — Ce qui veut dire ?
    — Que l’ombre du prince veille aussi.
    — Ah ! Nakht. Ceci je le sais et je
n’ai pas besoin de toi pour me le confirmer.
    — Majesté, seul le maître tout-puissant
peut décider.
    Hatchepsout eut un petit geste agacé et sa
lèvre supérieure frémit comme une aile de papillon que l’on veut déloger d’une
branche de tamaris en fleurs. Nul n’avait besoin de lui dire que le maître
tout-puissant décidait de tout. Elle retourna vers le sofa où, quelque temps
plus tôt, elle était allongée.
    — Allons, Nakht, ne me dis pas que tu
refuses de m’aider.
    — Majesté, je ne suis plus très rapide à
présent. Je ne professe plus. Je me contente de regarder le ciel et les
étoiles.
    Songeant aux éventuelles prédictions que pouvait
encore lui faire l’astrologue, Hatchepsout fit quelques pas vers lui.
    — Allons, vieil astrologue. Veux-tu dire
qu’à présent, tu garderais pour toi ton savoir et tes expériences ?
    Elle se plaça juste devant lui et piqua ses
yeux dans les siens. Il avait un regard usé, décoloré par le temps. Ses
paupières étaient dépourvues de cils et, sous l’œil, la peau tombait en deux ou
trois plis qui s’affaissaient comme ceux d’une figue séchée. Les bruits qu’on
colportait sur le vieil astrologue disaient qu’il avait au moins cent ans d’âge.
    — Il n’y a pas si longtemps, fit la
reine, que par deux fois, tu as sauvé mon amie Séchât.
    — Sauvé !
    — Ne l’as-tu pas aidée à retrouver sa
fille Satiah dans les marais du delta ?
    — En effet, je me souviens.
    — Ne lui as-tu pas confié, un peu plus
tard, les cartes du trajet allant jusqu’au Pays du Pount qui ont permis à mes
vaisseaux de se tirer d’affaire sur un océan que nous ne connaissions pas ?
Indirectement, tu m’as aidée à rapporter les parfums qui plaisent tant à nos
dieux.
    Le vieux Nakht hocha la tête dans un signe
affirmatif.
    — Vieil homme ! Il n’est pas dans
mes intentions de te laisser repartir, car tu dois me révéler des signes, des
impressions, des certitudes.
    — Vous voulez me séquestrer ? fit le
vieil homme avec un sourire qu’il sut rendre suffisamment narquois pour
déstabiliser la reine.
    — Qui te parle de séquestration ? Tu
seras installé comme un prince. Tu mangeras à ta faim et boiras à ta soif.
    — À mon âge, je n’ai plus besoin de rien.
L’esprit nourrit mon corps.
    — Alors, je vais te présenter le problème
sous un autre angle. Désormais, tu veilleras sur moi, besoin de toi.
    — Je peux rien faire pour vous, Majesté.
    — Si, lança-t-elle d’un ton sec, et je t’ordonne
désormais de loger dans la pièce contiguë à ma chambre. Elle est grande,
claire, très spacieuse et, la nuit, elle ouvre sur les étoiles.
    Puis, elle se mordit violemment la lèvre inférieure
comme pour s’éveiller d’un mauvais rêve et reprit d’un ton plus adouci :
    — Qui te retient là-bas, dans ta masure ?
Tu n’as plus de famille. Ta fille unique est morte avant toi.
    — C’est vrai, il ne me reste plus que le
ciel et les astres qui l’habitent.
    D’un air assez dubitatif, Hatchepsout se
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