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L'Ombre du Prince

L'Ombre du Prince

Titel: L'Ombre du Prince
Autoren: Jocelyne Godard
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la
servante, Hatchepsout parut surprise, mais ne fit aucun mouvement pour retenir
Aïcha.
    — Allons, laisse-nous parler, petite. Tu
reviendras plus tard lorsque j’aurai tout enseigné à ta reine.
    — Veux-tu donc me dire autre chose ?
    — Peut-être.
    — Alors, suis-moi.
    Par une porte que dissimulait une tenture de
papyrus recouverte d’oiseaux et de fleurs, ils entrèrent dans une immense pièce
ouverte sur un horizon sans fin. Deux grandes colonnes de marbre blanc
enserraient un ciel criblé d’étoiles qui filait à l’infini. La Grande et la
Petite Ourse semblaient se défier, mais ce soir-là, il aurait fallu à la
pharaonne plus de concentration pour qu’elle vît d’elle-même ce que le vieil
homme s’apprêtait à lui montrer.
    Face à la grande ouverture qui donnait sur les
jardins, avec en premier plan des sycomores et des tamaris diffusant des arômes
incomparables, il y avait un grand cadran solaire en pierre blanche et des
appareils d’astronomie pour étudier le ciel et les étoiles.
    — Tout ceci est à toi, fit Hatchepsout en
désignant la panoplie complète des instruments astrologiques qu’elle mettait à
la disposition du vieil homme.
    Sur le visage de Nakht, aucune satisfaction particulière
ne vint s’installer, mais il entraîna tout de même Hatchepsout à sa suite :
    — Depuis bien longtemps, je n’ai plus
besoin d’appareils pour étudier les signes des astres.
    Il lui fit lever le visage et jeta
tranquillement :
    — Regardez sur votre droite.
    Hatchepsout redressa le buste et fixa les
étoiles.
    — Regardez, Majesté, à droite, le bras de
Mars enserre la corne du Bélier. Il y a combat, lutte, affrontement, mais il n’y
a pas de rencontre franche, d’explication loyale, directe. Regardez, le Bélier
se rebiffe et Mars tourne son bras vers la gauche.
    Hatchepsout écoutait, attentive et vigilante,
mais elle ne voyait qu’une série d’étoiles toutes ressemblantes. C’est à peine
si elle remarquait que certaines étaient plus grosses ou plus petites que leurs
voisines.
    — Voyez-vous cette traînée poussiéreuse
qui termine l’étoile la plus grosse, celle qui jouxte la queue du Taureau et
qui, par son extrémité, touche le pied du Grand Chien ? Elle débouche sur
l’étoile la plus éteinte, la plus endormie. Celle-ci vous ne pouvez la voir.
    — Pourquoi ? Parce qu’elle ne brille
plus ?
    — Elle dort.
    Hatchepsout savait qu’elle devait décrypter
les termes de l’astrologue. C’était ainsi. Il ne lui dirait rien d’autre que
des mots à double sens, des mots dont elle devait elle-même découvrir la
signification.
    — Elle est entrée dans un profond
sommeil, poursuivit l’astrologue. Certes, elle a brillé autrefois, car il lui
reste un point lumineux, là juste au centre, à la place du cœur. L’œil de
Saturne juste au-dessus d’elle la protège et veille sur son repos.
    — Connais-tu l’heure de son réveil ?
    — Non, car c’est elle-même qui décidera
de sa renaissance, comme elle a décidé de son assoupissement.
     
    *
    * *
     
    À l’aube du matin suivant, alors que des
soldats de l’armée royale venaient d’annoncer l’arrivée du prince Thoutmosis
aux portes de Memphis, Osiris, le dieu des morts, s’était saisi de l’âme du
vieux Nakht. Il était mort sans bruit, couché sur la terrasse, face aux astres
et aux étoiles qu’il avait étudiés durant sa longue vie.
    Anéantie à l’idée de n’avoir pu profiter de la
sagesse et de l’aide qu’aurait pu lui apporter le vieil astrologue, Hatchepsout
médita sur ce nouveau coup du sort et décida de se relever une fois encore,
serait-ce la dernière. Emplie de dignité, elle réclama pour son vieil ami Nakht
un bel embaumement et des obsèques dignes de celles d’un prince.
    Mais son esprit était tourmenté, car les
armées de Thoutmosis avançaient sur Thèbes avec des menaces de plus en plus
virulentes. Le prince voulait le trône et le peuple semblait le suivre. On
disait que ses capitaines d’armes qui, lors de cette dernière expédition, s’étaient
taillé une réputation à toute épreuve s’apprêtaient à détrôner Hatchepsout.
    On ébruitait aussi que des servantes avaient
été payées pour glisser dans sa couche des scorpions qui avaient l’art de ne s’éveiller
qu’en sentant le corps de leur victime endormi tranquillement entre les draps
de lin blancs et soyeux. Aussi, Hatchepsout dormait assise dans son grand
fauteuil
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