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Les Poilus (La France sacrifiée)

Les Poilus (La France sacrifiée)

Titel: Les Poilus (La France sacrifiée)
Autoren: Pierre Miquel
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ce qu’aucun passager ne puisse s’échapper à la nage. « C’est un spectacle honteux, commentait cyniquement Hitler, de voir aujourd’hui le monde tout entier de la démocratie déborder de pitié au sujet des malheureuses populations juives tourmentées, mais demeurer insensible et plein de dureté au sujet du devoir qu’il aurait alors de leur venir en aide [138] . »
    Pas davantage Roosevelt ne pouvait avant son élection voler au secours des Franco-Britanniques. Le souhaitait-il ? L’opinion américaine se renfrognait dans l’isolationnisme bougon, aveugle, obstiné, même si elle n’était pas favorable aux thèses du germanisme développées par la propagande nazie dans certains médias américains. Hitler pouvait faire torpiller les bateaux neutres, le président américain restait de marbre. Les Prien, les Kretschmer, les Schepke, les « as » sous-mariniers allemands pouvaient couler en 1940 quatre millions de tonnes de navires, les États-Unis n’intervenaient pas.
    Pourtant une grande émotion s’était emparée de la presse quand soixante-dix-sept enfants anglais étaient morts en mer le 2 septembre, embarqués sur le City of Benares. Pour céder cinquante vieux destroyers à Churchill, Roosevelt avait d’abord dû faire réformer ces unités par la Marine, et les avait échangées aux Anglais contre des bases à Terre-Neuve et dans les Bermudes. Neutralité d’abord.
    *
    Les Américains avaient approuvé les lois de neutralité de 1935, 1936 et 1937, obligeant de jeter l’embargo sur les armes de guerre en cas de conflit. « Nous ne sommes pas isolationnistes, disait alors Roosevelt, sauf dans la stricte mesure où nous cherchons à nous isoler complètement de la guerre ».
    Il n’était naturellement pas question d’intervenir dans la guerre européenne en 1939 et 1940. Roosevelt avait répondu par une lettre glacée aux objurgations réitérées de Paul Reynaud. Tout juste avait-il écrit à plusieurs reprises à Hitler pour le mettre en garde dans les crises qui avaient précédé la guerre. Pourtant il avait autorisé finalement les Européens à acheter des avions américains, à condition qu’ils paient comptant, cash and carry.
    Seul le danger japonais dans le Pacifique obligeait Roosevelt à réarmer. L’armée américaine de 1939 ne comptait que 190 000 hommes dont 50 000 au-delà des mers. En septembre 1939, le Selective Service and Training Act avait permis d’appeler 800 000 jeunes gens. On tournait la loi de neutralité pour envoyer des armes aux Chinois à partir de 1937. On s’inquiétait de la puissance d’une marine de guerre japonaise évaluée à 289 unités. Mais, en 1938, un sondage Gallup révélait que 95 % des Américains étaient hostiles à la guerre et 66 % favorables à l’embargo.
    L’ouverture d’un nouveau champ de bataille en France avait cependant retourné l’opinion américaine. Roosevelt avait pu vendre des avions aux Alliés et faire voter des crédits militaires d’un milliard et demi de dollars, bien que l’entrée des États-Unis dans le conflit restât, disait-il, « impensable ». Pourtant, le 11 juin 1940, la majorité des Américains pensait que la guerre était « fatale ». Le 29 décembre 1940, après les élections, Roosevelt déclarait enfin à son pays, « au coin du feu », qu’il fallait « aider l’Angleterre ».
    Il faudrait attendre plusieurs mois encore avant que la loi prêt-bail du 11 mars 1941 fût promulguée. Les Anglais resteraient seuls à conduire la guerre pendant tout l’hiver, comme les Français avaient été presque seuls à contenir la ruée allemande de mai 1940. Mais la définition du Victory Program, portant 150 milliards de crédits, la construction d’une Two Oceans Navy, la création de la première aviation du monde et la mobilisation de huit millions d’hommes devaient lancer le pays, après Pearl Harbor, dans une Deuxième Guerre mondiale qui serait longtemps livrée dans le Pacifique. Le débarquement américain en Afrique du Nord, en Sicile et en Italie ne portait que sur un nombre réduit d’unités. L’engagement décisif serait celui des débarquements de 1944.
    Il reste que la machine était en place dès le 11 mars 1941, lors du vote de la loi prêt-bail qui permettrait d’armer le monde entier à crédit, dès avant Pearl Harbor, pendant cet été où Hitler décidait d’attaquer l’URSS.
    Pourquoi cette décision, qui faisait rentrer l’Allemagne dans la
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