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Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I

Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I

Titel: Les hommes naissent tous le même jour - L'aurore - Tome I
Autoren: Max Gallo
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hitlérienne, est à droite du groupe, au garde-à-vous, comme si tout le monde l’observait ou bien que les tanks défilent pour lui. Karl Menninger ferme les yeux, le souvenir d’un corps à corps, lors d’une attaque, à la fin de 1917, peut-être dans l’Argonne, ce soldat français, à peine vingt ans, qui tenait son ventre déchiré à deux mains. Dietrich qui…
    Mais le bruit des chenilles de tanks sur l’asphalte, une question du général Klein et Menninger s’évade du passé et de l’avenir possible. Il n’est jamais donné de penser longtemps à la mort vers quoi pourtant la vie pousse…
    Et Lee Lou Ching debout les mains sur les hanches, sa casquette portant en son milieu l’étoile rouge, s’il parle de la mort, c’est pour la faire oublier.
    Autour de lui, dans cet amphithéâtre creusé au cœur des terres légères et jaunes du Yunan, des soldats accroupis.
    Il fait beau, frais, Lee vient de commencer son cours. « Soldats de l’université politico-militaire, dit-il, notre but est de libérer la Chine du joug de l’oppression japonaise et des féodaux leurs complices : il faut que la haine coule en vous comme le fleuve dans la plaine. N’oubliez jamais ce que les militaristes japonais ont accompli à Nankin sur nos sœurs et nos mères, nos pères et nos jeunes frères sans défense…»
    Sac de Nankin, sur les escaliers corps entassés, prisonniers-mannequins dans lesquels les Japonais enfoncent leurs baïonnettes, milliers, milliers, milliers de massacrés.
    Pour chacun d’eux l’avenir s’est brusquement interrompu.
    Mais Lee Lou Ching, les mains passées maintenant dans son ceinturon, ne médite sur aucune de ces vies singulières. Voilà longtemps que l’homme est devenu pour lui partie sans visage d’un tout. Oubliées les prières récitées à la mission catholique de Shanghai, effacé le visage de Giulio Bertolini.
    Dolorès Clerkwood elle-même ne pense plus que rarement à Giulio Bertolini. Une nouvelle fois elle prépare un départ. James quitte Moscou pour Londres.
    Elle s’en va comme toujours en avant-garde, avec Julia et Ronald. Ils prendront l’un des paquebots mixtes qui en six jours, font la liaison entre Leningrad et Londres. Dolorès tout entière occupée par ces malles qu’il faut marquer, Ronald qu’il faut surveiller puisque Julia s’enferme dans sa chambre, lit avec la passion qu’on peut avoir à dix-huit ans, oublie le monde réel pour le rêver.
    Mais quand ils arriveront à Leningrad, descendant du wagon spécial que le ministère soviétique des Affaires étrangères a mis à leur disposition, seule Julia verra le jeune mécanicien qui, accroché d’une main à la locomotive, dirige de l’autre la manœuvre, les cheveux dans les yeux, le front et la combinaison tachés de cambouis.
    Un regard entre eux, Julia Clerkwood et Marek Krivenko.
    Le soir, Marek retrouvera Anna Spasskaia et Ivan Machkine. Il demeurera un instant songeur, puis il enfoncera sa cuillère dans le bortsch brûlant.
    Anna l’observera, détendue tout à coup, tranquille, comme si l’avenir était une boule de glaise qu’on est le seul à pétrir…
    Elle aussi, Anna Spasskaia, sûre à cet instant d’être seulement au milieu de sa vie, comme chacun d’eux, Allen, Sarah, Serge, Lee, Karl et Dolorès.
    Mais qui connaît le moment où se durcit à jamais le regard, où le front devient blanc et froid comme le marbre ?
    Paris, Spéracèdes,
    1977-février 1978.
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