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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial
Autoren: Pierre Naudin
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Lambra que lo oyera,
     En ello mucho se holgara :
     «  Oh, maldita sea la dama
    Que su cuerpo te negara ;
     Si yo casada no fuera,
     El mio te lo entregaba ! » 4
    Le trovero se tut. Il y eut un silence qui valait une louange.
    –  Avez-vous compris, messire ? s’enquit Paindorge d’une voix dont l’inquiétude ne ressortissait pas aux difficultés de leur aventure.
    –  Oui, Robert. C’est une gentilfame qui, si elle n’était mariée, s’offrirait sans attendre.
    –  Je crois, messire, dit Serrano, que vous commencez à comprendre notre langue… Ce chevalier de Bureba la Vaillante était un noble cœur.
    –  Comme vous, murmura Teresa.
    Tristan ne l’osa regarder.
    –  Vos chevaliers sont aussi bâchelereux que les nôtres, dit-il. De sorte que si le Trastamare et Guesclin ont à leur livrer une grande bataille, je ne suis pas certain qu’ils la gagneront.
    Et de songer sans le moindre émoi :
    « Ils méritent de la perdre. Et tant pis, par ma foi, si je dois en souffrir ! »
    *
    Ils cheminèrent lentement. Le chemin montait toujours vers un sommet que Serrano avait nommé le Puerto de Somosierra 5 . L’ombre y était rare. Ils pouvaient voir, à leur dextre, les tentatrices verdures de la sierra de Guadarrama, et devant, une sorte de mur gris qui s’aplanit enfin, révélant à leurs yeux émerveillés un grand pan de campagne.
    –  La vallée de Lozoya, dit Serrano. Ne vous réjouissez pas : nous allons descendre et remonter encore. Le prochain village doit être Buitrago, puis ce sera la Cabrera et d’autres petites cités, puis Alcobendas et Madrid.
    –  Combien de lieues ?
    –  Une quinzaine… J’ai parcouru deux fois ce chemin…
    –  Il nous faudra trouver un endroit pour dormir.
    –  Des arbres et de la fraîcheur, messire, dit Eudes.
    Il était le fils bâtard que le baron de Rechignac, oncle d’Ogier d’Argouges, avait eu de Mathilde, sa concubine. Il devait savoir lire, écrire. L’essentiel était qu’il sût tenir une épée. Il gratta sa barbe brune, poudreuse, et dit comme s’il révélait un péché :
    –  Parfois je suis las… mais notre donzelle me donne du courage.
    Toujours prudents, ils passèrent autant qu’ils le pouvaient au large de Buitrago assoupie derrière ses murailles crénelées, flanquées de tours carrées derrière lesquelles, hautain, se dressait un château mudéjar (391) . Le chemin montait encore, sinueux, crevassé, ruisseau de pierres descendant de hauteurs interminables. Les chevaux parfois hochaient la tête comme pour exprimer leur réprobation. En fait, ils souffraient des atteintes des premières mouches. Serrano, qui boitillait, n’avait plus envie de chanter. Teresa piétait dans son ombre. Tenant Babiéca par le haut d’une étrivière, elle voyait son pas s’accourcir sans pour autant fournir l’impression d’une lassitude extrême. Courageuse. Comme Luciane. Aussi volontaire et secrète qu’elle. Plutôt que d’user sa volonté dans ce cheminement pénible, elle la renforçait. Parfois, après une hésitation, elle allongeait ses enjambées, souple, efficace. Elle eût fait – et ferait sans doute – le bonheur d’un mari de qualité.
    –  Vous voyant, votre aïeul serait fier de vous.
    –  Ah ?
    Elle avait rougi. Que son père-grand l’eût admirée, soit. Mais un goy ?
    –  Ce soir, ajouta Tristan, vous donnerez de l’air à vos cheveux. J’aime leur couleur.
    Elle ne sourit point et acquiesça en silence. Ce soir… La nuit… À quoi rêvait-elle, dans l’obscurité, entre lui et Simon ? Parfois, il l’observait du coin de l’œil et la trouvait plus belle encore dans le languissant abandon du sommeil. À qui pensait-elle lorsqu’un soupir effleurait ses lèvres ? Quelque personne ou bien l’amour dont elle ne savait rien au-delà du mot ? Résignée, mélancolique et forte, elle avançait vers son destin. Résolu, mélancolique et fort (du moins le voulait-il croire), il avançait sur une voie identique. Jamais elle ne croiserait celle de Teresa comme peut-être elle le souhaitait.
    Il laissa son cheval marcher seul et accourcit son pas de façon à être rejoint par la jouvencelle.
    –  Donnez-moi la main. Vous êtes hodée 6 .
    Elle obéit avec une promptitude qui la révélait toute. Ses petits doigts nus étaient doux et fermes et ce que leur saisissement révélait d’elle-même se passait du moindre mot. Il semblait, pour elle, qu’un souhait longtemps déçu
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