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Les fils de Bélial

Les fils de Bélial

Titel: Les fils de Bélial
Autoren: Pierre Naudin
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Roland d’Antugnac.
    Tristan se dit que c’était bien trouvé. Mais Bagerant était-il sa dupe ? Un rire retentit, annonciateur d’une de ces malices dont le routier avait la passion :
    –  Avec un cul pareil, il a de l’avenir. Peut-être deviendra-t-il connétable…
    Il fallait détourner l’intérêt de ce pernicieux. Tristan s’y employa d’une façon qu’il trouva infaillible compte tenu du mépris que Bagerant et ses deux compères vouaient à Guesclin, sans d’ailleurs oser le lui signifier.
    –  Et Bertrand ? Qu’advient-il de lui depuis le sacre d’Enrique ?
    Deux grognements et un rire. Une lippe où le dédain se mêlait peut-être à l’envie fit une sorte d’écorchure noire dans la bouche de Bagerant :
    –  Il ne se sent plus. Il se paonne comme nul n’oserait. Pas même un roi de Babylone. Henri l’a fait duc de Tristemare. Il lui a promis la seigneurie de Molina et ses immenses domaines 10 . Le Bègue de Villaines, – qui n’en fit ni plus ni moins que d’autres, quand on a purgé Briviesca de sa juiverie – a reçu le comté de Ribadeo…
    –  Le comte de la Marche, intervint Espiote, a fait chanter dix messes pour l’âme de sa cousine…
    –  On dit, acheva le bourg Camus, qu’il t’a demandé de pourchasser l’arbalétrier qui l’a occise.
    –  C’est vrai, dit simplement Tristan.
    Il avait hâte que ces trois malandrins s’en allassent, or, il semblait qu’ils eussent à cœur de satisfaire sa curiosité et celle de ses compères.
    –  Calveley a reçu le titre de comte de Carriôn 11 et, Sang-Bouillant, Don Tello a repris son titre de comte de Biscaïe et reçu une autre seigneurie du nom de…
    –  Castaneda, précisa Espiote. Don Sanche, son frère, a hérité des biens du favori de Pèdre : Alburquerque.
    Et, tourné vers les Lemosquet, Petiton, Paindorge et autres, plus ou moins attentifs, Bagerant crut bon de conclure :
    –  Savez-vous, compères, comment on appelle déjà ces grâces obtenues avant d’avoir été méritées ?… Les faveurs de don Henri. Eh bien, moi, ces faveurs-là, je chie dessus.
    Paroles d’homme déçu dans ses espérances, car il semblait bien que chez ce routier l’instinct de la domination était plus ardent que l’aptitude au mal, et qu’il composait cette puissance sourde, irrésistible et pénétrante qui déterminait toutes ses adhésions et tous ses actes. En se hissant au-dessus d’un monde sanglant, effrayé, jusqu’à s’écœurer lui-même, il atteignait une sorte de pinacle du haut duquel il se faisait l’effet d’un dieu. Dans cette Espagne vertigineuse où son goût des aventures l’avait conduit plus encore que son goût du lucre, il ne compterait pas plus d’affidés que sur les pentes de Brignais. Il n’avait point d’amis, rien que des connaissances. Peut-être quelque vieux chevalier retour de Terre-Sainte lui avait-il enseigné la maxime qui résumait les opinions les plus secrètes d’un fanatique Sarrasin, Hassan, qu’on appelait aussi le Vieux de la Montagne : «  Rien n’est vrai, tout est permis. »
    D’un regard suspicieux, Bagerant contourna Roland-Teresa occupée à desserrer la muserolle de Babiéca. La jouvencelle sentit la menace : elle enfonça son chaperon, contourna le genet dont elle vérifia deux fers. Elle avait heureusement les mains sales et les ongles aussi ras que ceux d’un palefrenier.
    –  Belle bête à chevaucher, Tristan.
    Ce compliment concernait-il le cheval de la jeune Juive ? Non, certes. Bagerant la dénoncerait-il ? Il était un des pires malandrins de la terre, mais nullement un délateur, et sur les pentes pierreuses de Brignais, un certain Tristan de Castelreng ne lui avait-il pas sauvé la vie ?
    –  La Tiphaine est cocue, Sang-Bouillant.
    –  Ah ! Tiens… On avait dit ces amours exemplaires.
    –  Une suivante de la nouvelle reine. Elle a trouvé le Breton «  merveilleusement laid  ». Le plus vaillant qui soit jusqu’à la mer.
    –  La merde ! rectifia de loin Paindorge.
    –  Un grand repas de couronnement. J’y étais, Sang-Bouillant : gelinottes, grues, pluviers, chapons, riches vins… Le soir même, Guesclin besognait sa geline… Quant à Pèdre, il doit être je ne sais où ; peut-être à Tolède avec ses grands amis, Jacob, David et Abraham et grand’foison de chevaliers fidèles qu’il nous faudra sans doute affronter…
    Tristan se permit d’interrompre cet homme trop disert auquel l’idée
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