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Les champs de bataille

Les champs de bataille

Titel: Les champs de bataille
Autoren: Dan Franck
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qu’un rendez-vous a été pris pour moi. Une note m’attend dans une boîte aux lettres. Je ne suis pas passé relever le courrier. Donc, je ne sais pas que le général Delestraint m’attendra au métro La Muette deux jours plus tard.
    — Vous n’êtes pas soupçonné de son arrestation…
    — Je ne suis même pas soupçonnable !
    — Revenons à la boîte aux lettres où ce courrier vous attendait.
    — Cette boîte aux lettres était brûlée. Elle se trouvait à Lyon, rue Bouteille, au milieu de beaucoup d’autres. Elle appartenait à une couturière sympathisante. On y glissait les messages qui m’étaient destinés. Quand Multon, recruté par la Gestapo, est arrivé à Lyon, il la connaissait. Les Allemands ont arrêté la couturière, et son appartement est devenu une souricière. Quant au courrier, il était intercepté, lu, puis remis à sa place. Ce dispositif a permisl’arrestation d’une de mes collaboratrices. C’est ainsi que nous avons compris que l’endroit était devenu dangereux. C’est dans cette boîte brûlée qu’on m’a informé de mon rendez-vous avec le général Delestraint.
    —  On  ? »
    Hardy ne répond pas aussitôt à la question. Il n’en a pas fini avec l’appartement-souricière où une femme encadrée par deux gestapistes montait la garde, prête à faire arrêter les visiteurs.
    « Cette femme, précise-t-il, a son importance dans l’histoire de Caluire.
    — Edmée Deletraz, dit le juge. La femme au corsage rouge. »
    Hardy lui lance un regard tendu. Le rôle de ce témoin est considérable dans l’affaire de Caluire.
    « Elle ne vaut pas mieux que le traître Multon, dit-il.
    — Pas sûr, objecte le juge.
    — Elle a été retournée par la Gestapo.
    — Certes…
    — Elle a décidé de passer à l’ennemi en même temps que Multon. Ceci pour une raison que vous connaissez sans doute. »
    Le juge secoue la tête.
    « Elle était sa maîtresse.
    — On l’a dit. Cela n’a jamais été prouvé. »
    Le juge se lève et ouvre l’armoire métallique dans laquelle il range les pièces du dossier. Il a établi une chronologie succincte des faits. Il s’y reporte.
    « Le 26 avril, votre collaboratrice est arrêtée rue Bouteille. Le lendemain, On vous adresse un message vous indiquant le rendez-vous avec le général Delestraint.
    — Je n’ai pas eu ce message.
    —  On , poursuit le juge, dicte à sa secrétaire l’heure et le lieu du rendez-vous. Le texte n’est pas chiffré. Il est glissé dans la boîte brûlée.
    — C’est une faute impardonnable, marmonne Hardy.
    — Commise par On.  »
    D’un mouvement du menton, Hardy le reconnaît. Le juge reste debout. Il tourne autour de lui. Sa voix est devenue plus ferme, presque métallique. Le greffier attend, fixant le clavier de sa machine. Ce jour-là, il ne porte pas d’épingle à cravate.
    «  On savait qu’il y avait danger mortel à déposer un message en clair dans cette boîte aux lettres. Pourtant, On le fait. Il y avait danger mortel à envoyer sa secrétaire rue Bouteille. Pourtant, On le fait. Et savez-vous ce que On dit à cette femme lorsqu’il la retrouve quelques jours plus tard ? »
    Le juge s’assied, s’avance légèrement sur son siège pour se trouver bien en face de Hardy. Celui-ci soutient son regard.
    « Il lui dit : “Vous l’avez échappé belle ! La boîte était brûlée, et il y avait du monde là-haut.” Si cette femme était montée, Edmée Deletraz l’aurait fait capturer ! Et votre On le savait ! Il le savait avant d’envoyer sa secrétaire.
    — C’est une faute impardonnable, répète Hardy.
    — Qui est On  ? »
    Une fois encore, l’inculpé évite de répondre.
    « Ce même On vous rencontre au début du mois de juin. Il ne vous dit rien. Il ne prévient pas non plus Delestraint. »
    Le juge abat ses deux mains sur le plateau du bureau.
    « Donc, il vous envoie à la mort. A ce moment-là de l’histoire, autant vous que Delestraint. Car vous savez évidemment qui s’est emparé de la lettre, découvrant le lieu et l’heure du rendez-vous ?
    — Klaus Barbie.
    — Klaus Barbie ! Et Barbie dépêche Multon à Paris avec mission d’arrêter le général Delestraint ! »
    Ainsi se noue le piège dans le train qui traverse le pays occupé.
    La nuit est tombée. Les voyageurs s’agglutinent dans les compartiments et les couloirs. Certains posent leur valise en carton dans les soufflets, essayant de s’y
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