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L'envol du faucon

L'envol du faucon

Titel: L'envol du faucon
Autoren: Axel Aylwen
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stratégiques.
    — Sa Majesté vous considère comme un ami spécial de la France, mon Seigneur. Elle souhaite vous prêter toute l'assistance nécessaire pour tenir les Hollandais à distance, et y a-t-il plus sûr moyen de dissuasion que de remettre ces enclaves stratégiques aux mains des Français ? En gage de l'estime particulière dans laquelle elle vous tient — je l'ai entendue vous appeler son plus grand ami et allié en Asie —, elle a chargé l'ambassadeur La Loubère de vous décerner l'ordre de Saint-Michel. Elle vous a en outre fait citoyen français honoraire et comte de France. » Tachard inclina respectueusement la tête, laissant à ses paroles le temps de produire leur effet.
    L'expression de Phaulkon changea à peine. « Il serait difficile à quiconque de ne pas être touché par de si grands honneurs, accordés qui plus est par le plus grand monarque d'Europe », dit-il en prenant soin de masquer son euphorie. « Mais je ne vois pas ce que j'ai pu faire pour les mériter, à moins qu'il ne me reste à les mériter par mes bonnes actions. »
    Tachard sourit. « Je ne vous cacherai pas, mon Seigneur, que le roi Louis compte énormément sur vous pour conduire votre maître sur le bon chemin, mais je sais qu'en tant que catholique vous ne pourriez avoir de plus haute aspiration. » Le prêtre se pencha avec empressement. « Quels sont à présent vos espoirs en ce qui concerne la conversion de Sa Majesté ? »
    L'expression de Phaulkon se durcit soudain. « Très grands, mon Père, jusqu'à tout à l'heure. Mais vous me surprenez. Vous, les Jésuites, et vous en particulier, vous avez longtemps travaillé dur au Siam pour accomplir l'unique ambition qui vous domine. Pourtant, maintenant que vous êtes près du but, vous venez me voir avec des exigences qui vont tout détruire et ramener les Jésuites cent ans en arrière. Dites-moi, mon Père, quand vous recevez un cadeau, avez-vous coutume de l'échanger contre un autre ou de le rendre pour en demander deux à la place ? Pensez-vous que le roi de Siam ait l'habitude de distribuer des ports d'importance vitale à ses visiteurs comme autant de présents du jour de l'An ? Il a eu de longues et difficiles délibérations afin de déterminer au mieux comment distinguer la France des autres nations et exprimer la grande estime dans laquelle il tient votre roi et votre pays. » Phaulkon marqua un temps. « Dans un geste sans précédent, il vous a fait présent d'un port sur ses côtes. Et tout ce que vous trouvez, pour le remercier, c'est de lui demander un échange, et même d'en exiger deux à la place !
    — Mais, mon Seigneur, votre lettre mentionnait d'autres concessions à venir et...
    — Je n'en ai pas encore terminé, mon Père, coupa Phaulkon, dont le courroux allait grandissant. Si je faisais ne serait-ce qu'allusion à vos suggestions devant Sa Majesté, vous vous exposeriez non seulement à sa grande indignation pour votre manque de bonnes manières — qui, vous le savez bien, sont de toute première importance pour un Siamois — mais aussi à son mépris éternel. Pour ce qui est des progrès dans le domaine spirituel, les mots me manquent. Croyez-vous sincèrement que mon maître, ou n'importe quel souverain digne de ce nom, soit disposé à embrasser la foi de quelqu'un qui lui demande de lui céder ses deux ports les plus stratégiques ? Les places clés de la défense de son royaume ? C'est bien mal connaître l'esprit siamois, mon ami, ou la sagesse du roi, mon maître. »
    La diatribe avait visiblement secoué Tachard. « Mon Seigneur, vous devez savoir que ce ne sont pas les Jésuites qui dictent une telle politique. Rien ne me chagrinerait plus que de défaire tout ce pour quoi nous avons lutté. Mais j'ai mes ordres. »
    Phaulkon l'observait avec calme. La tempête qui avait obscurci ses traits s'était apaisée presque aussi vite qu'elle s'était levée. « J'ai conscience, mon Père, dit-il, radouci, que vous ne pouvez pas retourner sur votre bateau les mains vides. Par égard pour vous et pour la grande estime dans laquelle je tiens le roi de France, je vais vous proposer un compromis. Mais sachez que c'est ma dernière offre et qu'elle ne peut être l'objet d'un marchandage. Il s'agit d'un présent, mon Père, et vous devriez bien le faire comprendre à l'ambassadeur. » Il marqua un temps. « Je conseillerai à Sa Majesté de vous accorder le port de Bangkok comme base commerciale, à la place de celui de Ligor, et je
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