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Le talisman Cathare

Le talisman Cathare

Titel: Le talisman Cathare
Autoren: Jean-Luc Aubarbier
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dans cet espace militaire. Tout le monde s’entassait dans de petites pièces aux murs épais, mal chauffées et mal éclairées. La chambre nuptiale se trouvait au sommet du donjon, séparée par une simple tenture du réduit où dormaient les demoiselles d’honneur, à trois dans le même lit. L’escalier à vis qui desservait les étages voyait un va-et-vient continuel de valets et d’hommes d’armes. La zone était étroite et tous ces mâles la frôlaient, la palpaient sans vergogne, sans respect pour son rang et son sexe. Bernard y mit bon ordre avec brutalité, chassant son intendant et passant son épée au travers du corps d’un sergent qui avait tenté de la prendre de force.
    « Tu oses poser tes pattes sur une dame de qualité, maraud ! Tu vas le payer de ta vie. »
    Bernard s’était vivement emparé d’une arme accrochée au mur.
    « Elle aguiche les hommes. L’ordre des choses est chamboulé depuis qu’elle réside en ces lieux. À croire qu’une femelle règne sur les pierres de la forteresse ! Cela est contraire à la nature », répliqua le rustre qui ne mesurait pas le danger.
    L’affront fait à sa maison, tout autant que le manque de respect envers son épouse, poussa le bras de Bernard qui transperça le coeur du sergent. Alix se tenait toute raide, comme fascinée. Ce n’était pas la peur qui se lisait dans son regard animé d’une étrange flamme. Le chevalier y vit comme une joie, une volupté. Elle avait pris plaisir au spectacle de la mort. N’avait-elle pas, âgée d’à peine quinze ans, exécuté Guillaume de Gourdon de sa propre main ? Elle avait pris le goût du sang, comme ces loups qui, ayant mangé de la chair humaine, y reviennent avec délice. De son côté, Alix constatait avec amertumequ’il y avait loin de l’amour courtois au comportement des hommes. Mais son mari l’aimait et la protégeait, y compris contre le plus puissant de ses suzerains.
    « Comment ! Vous me refusez le lit de votre épouse ? » Superbe, dans son manteau d’hermine blanc et noir, Gaillard de Beynac ouvrait tout grand ses yeux bleus qui avaient fait se pâmer plus d’une demoiselle. Son visage, encadré d’une barbe et d’une abondante chevelure châtain, marquait l’étonnement.
    « Il en est ainsi, monseigneur ! » Bernard roulait un regard furieux, prêt à saisir son épée.
    « Mais vous êtes vassal des barons de Beynac. Vous devez respecter nos coutumes. Un chevalier sait l’honneur que lui fait un baron en aimant son épouse et tous s’y soumettent. Le sire de la Ferrière et le vidame de Marnac l’ont accepté de bonne grâce, et la belle Isabelle de Salignac est venue d’elle-même m’offrir sa blondeur.
    — Mon épouse ne veut appartenir qu’à moi. Je ne la forcerai jamais à subir une étreinte qui lui répugne. Il faudra pour cela, monseigneur, me passer sur le corps. »
    Il tira sa lame du fourreau ; une colère mal contenue bouillait en lui.
    « Tout doux, mon beau, sire, tout doux ! J’aime votre sens de l’honneur. Nous sommes voisins et n’avons pas besoin d’une guerre privée. Gardez votre épouse. Je la respecterai et vous propose ma protection et mon amitié. »
    Il tendit sa main droite dégantée. Les deux hommes s’estimèrent du regard, se jugèrent dignes l’un de l’autre. Un grand rire les réunit ; une solide alliance venait de naître.

    Alix obtint de son époux d’établir à Castelnaud une cour d’amour. Une cohorte de serviteurs et de donzelles l’avait suivie depuis Turenne. Elle forma et protégea un jeune troubadour, Guilhem, qui se mourait d’amour pour elle et lui dédiait ses plus beaux poèmes, qu’il répandait de château en château, faisant connaître l’esprit et la délicatesse de sa dame. Alix aimait sa voix et son talent. Elle lui pardonnait sa vie de débauche, et les amours qu’il pratiquait contre nature et qui auraient pu lui valoir le bûcher.
    C’est à Castelnaud qu’elle découvrit l’univers des cathares. Son époux, trop fin pour la contraindre, la laissa débattre à sa guise avec les Bonnes Femmes qui venaient chaque semaine prêcher dans la forteresse. Alix y aiguisa son esprit critique et sa connaissance biblique. Son chapelain faisait des efforts pour la garder dans le giron de l’Église et combattre cette peste de l’âme qui poussait Dieu hors les coeurs. L’intelligence subtile de la dame profita de ces affrontements.
    La mort de son père la fit pencher résolument pour la
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