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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete
Autoren: Jose Frèches
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lanterne allumée sur la terrasse d’une maison.
    —  Faux et archifaux, Mesure de l’Incomparable ! Tu as profité de la situation pour abuser de moi !
    —  Tu criais et tu riais… Tu avais les yeux ouverts… Tu n’arrêtais pas de m’en demander plus ! Tu invoquais le plaisir partagé du Heqi… Tu me disais que je devais ouvrir toutes grandes les portes de mon Champ de Cinabre Inférieur !
    —  Tu as profité de mon sommeil ! Ce n’est pas convenable ! Tu t’es fort mal comporté… Et dire que j’étais persuadée d’avoir rêvé lorsque je me suis réveillée !
    —  Comment aurais-je pu deviner que tu dormais   ? Je te prie de m’excuser. C’était si bon… si délectable… Tu répondais à la moindre de mes sollicitations ! Voilà pourquoi l’adepte du Neidan {4} que je suis s’en est donné à cœur joie.
    —  J’ignore tout de ces exercices d’alchimie intérieure auxquels tu prétends avoir procédé avec moi ! s’était écriée la jeune femme qui commençait à jouir.
    Dans la pièce à côté, il pouvait entendre les pas de Prune Sombre qui préparait le petit déjeuner. Bientôt, ils devraient se lever, quitter cette chambre, et la vie normale reprendrait son cours. Un cours qui lui semblait désormais singulièrement morne. L’idée que peut-être Jasmin Éthéré ne serait plus là, auprès de lui, à la fin de la journée, et que les moments rares qu’ils avaient passés ensemble n’auraient été qu’une simple parenthèse, lui avait soudain paru insupportable. Aussi, sans plus attendre, le Taiping avait-il décidé de lui déclarer sa flamme.
    —  Ce qui s’est passé entre nous est tout à fait extraordinaire… Tu es le nord et je suis l’aiguille aimantée de la boussole, voilà tout. Nous sommes faits l’un pour l’autre, Jasmin Éthéré ! Toi et moi avons cette chance inouïe de nous être rencontrés ! s’était-il exclamé, euphorique et d’une voix tremblante.
    La jeune femme avait paru touchée.
    Il avait alors poursuivi son vigoureux plaidoyer :
    —  Rends-toi compte de notre chance, nous n’avons même pas eu besoin de prendre des mixtures de plantes ni d’ajouter à notre thé vert de la poussière de cailloux, et nous étions pourtant accordés comme les roseaux de la flûte à plusieurs tuyaux !
    Désireuse d’en savoir un peu plus sur ce nouvel amant qui la comblait, Jasmin Éthéré l’avait interrogé sur ses origines, sur son enfance et sur son éducation. Volubile, spirituel même, il lui avait raconté comment sa famille avait déménagé au gré des postes occupés par son père, depuis la petite sous-préfecture de Zunyi, aux confins du Sichuan et du Guizhou, où il gérait les archives, jusqu’au port de Fuzhou dont il avait supervisé la construction des entrepôts de la douane. Élevé selon les préceptes confucéens, il avait appris à obéir et à reproduire les conduites de ses aînés et il s’apprêtait à « chausser les bottes de son père » quand sa rencontre avec Hong lui avait « ouvert les yeux » et fait comprendre qu’il faisait fausse route. Cet événement capital s’était produit devant l’entrée principale du Grand Jardin Public de Canton où un petit attroupement s’était formé devant un homme vêtu à l’occidentale qui parlait d’un « Dieu fait homme » d’une voix vibrante. Les yeux de braise du prêcheur hakka avaient magnétisé le jeune étudiant avide de servir une aussi noble cause. Le lendemain, il était revenu en cachette écouter Hong Xiuquan qui encourageait les badauds à entrer dans la Société des Adorateurs de Dieu. Cette fois, le discours du chef Taiping avait fustigé l’occupation de la Chine par les puissances étrangères et l’absence de réaction de la dynastie mandchoue « engoncée dans sa décrépitude ». Mesure de l’Incomparable, dont les penchants nationalistes ne demandaient qu’à être flattés, avait été subjugué par les propos enflammés de Hong qui prônait l’avènement de la Grande Paix… c’est-à-dire la fin des privations et de la misère pour le peuple de la Chine où chacun disposerait enfin de ce dont il a besoin. Les familles recevraient toutes le même lopin de terre et les biens des riches seraient confisqués au profit de la collectivité. Mais auparavant, il faudrait chasser du pouvoir les envahisseurs mandchous qui maintenaient le pays sous une férule inégalitaire et le gouvernaient au détriment du peuple.
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