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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete
Autoren: Jose Frèches
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jour-là, le principal ressort de l’existence d’Irina s’était cassé et le monde s’était effondré.
    L’eunuque avait confié La Pierre de Lune à l’un de ses petits cousins, calligraphe à Canton, du nom de Bouquet de Poils Céleste, qu’il avait mis dans la confidence avec une forte somme d’argent destinée à pourvoir aux besoins du fils caché de l’empereur. En même temps, il lui avait donné l’étui à pinceau dans la doublure duquel était enroulé le précieux certificat paternel de celui dont il avait désormais la charge.
    Mais l’éloignement de l’enfant de la Sibérienne, loin d’apaiser les esprits, avait exacerbé les tensions au sujet de la succession de Daoguang. Son geste, parfaitement décodé, signifiait que La Pierre de Lune était entré dans la liste des prétendants au trône. Pour l’en faire sortir, il fallait désormais à tout prix éliminer la Sibérienne dont la présence à la Cour devenait encore plus dangereuse.
    Au bout de quelques mois, sentant que le Fils du Ciel risquait de céder aux injonctions de ceux qui souhaitaient sa disparition, la Russe, la rage au cœur, avait pris les devants en s’enfuyant sans demander son reste.
    Ulcéré par le départ inopiné de cette femme dont il restait épris, Daoguang, dans un geste de fureur, avait commencé par ordonner la fermeture des frontières de la Chine.
    —  Monseigneur, si vous me demandiez d’empêcher la mer de se retirer après être montée sur le sable de la plage, vous me verriez dans le même embarras… Les trous dans le Grand Mur sont bien trop nombreux pour que nous puissions prétendre les boucher ! avait fini par lui avouer l’un de ses vieux conseillers qui avait pris son courage à deux mains pour lui tenir ces propos.
    Le Fils du Ciel avait dû se rendre à l’évidence : la Sibérienne s’était bel et bien évanouie. Malgré l’efficacité de son entourage – soulagé ô combien ! par ce départ précipité – qui s’était empressé d’installer dans son lit des filles éblouissantes, Daoguang avait mis longtemps à oublier la belle Russe.
    Et puis, comme à l’accoutumée, le temps – cet incomparable effaceur des taches les plus douloureuses – avait fait son office et, s’il arrivait encore à l’empereur de repenser à la belle Irina, ce n’était que par bouffées de plus en plus espacées.
    Entre-temps, tant de nouvelles amantes s’étaient succédé dans le lit impérial, multipliant la descendance de Daoguang, qu’il s’était progressivement désintéressé du sort de La Pierre de Lune, lequel était devenu un enfant naturel parmi d’autres aux yeux d’un père qui comptait bien, en tout état de cause, retarder le plus longtemps possible le moment où se poserait la question de la désignation du prince héritier au trône de Chine.
    On comprend dans ces conditions en quoi la réapparition de la Sibérienne, après seize ans d’absence et de silence, avait fait l’effet d’un séisme à la cour de Chine. Pour Daoguang, dont la colère envers Irina s’était depuis longtemps effacée, c’était une divine surprise. En revanche, pour les concubines dont les rejetons pouvaient prétendre à la succession, le cauchemar recommençait, qui risquait d’anéantir des années d’intrigues.
    Irina Datchenko savait mieux que personne comment s’y prendre avec le Fils du Ciel, si bien qu’elle avait réussi à faire renaître avec la force du premier jour la passion dévorante que Daoguang nourrissait à son égard.
    —  Vous devez vous douter que je ne suis pas revenue ici que pour vous ! lui avait-elle assené d’une voix dure après avoir prodigué l’hommage qui convenait à sa Tige de Jade.
    —  Je parierais que tu souhaites revoir ton fils.
    —  Exact. Comment va-t-il   ?
    —  On ne peut mieux…
    —  Que fait-il   ? Où est-il   ?
    —  A vrai dire, pas de nouvelles, bonnes nouvelles… Je vais mander quelqu’un le quérir… De toute façon, je comptais le faire revenir auprès de moi. Tu sais, je n’ai pas changé mes dispositions pour ce qui le concerne ! avait déclaré le Fils du Ciel qui brûlait de subir à nouveau un traitement identique à celui qu’elle venait à peine de finir de lui administrer.
    —  S’il ne vient pas, cette fois, c’est moi qui irai à lui !
    Irina, impériale, bien décidée à jouer son va-tout, avait toisé le père de son fils comme s’il s’agissait d’un valet sans
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