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Le Roi amoureux

Le Roi amoureux

Titel: Le Roi amoureux
Autoren: Michel Zévaco
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écrit… lisez, lisez…
    Elle s’assit à son tour, ramena son voile sur son visage, s’affaissa, s’enfonça dans le fauteuil où elle ne fut plus qu’une indistincte forme noire.
    Clother se mit à lire la relation de Silvia que nous transcrivons avec quelques modifications de forme, et que nous cataloguons sous ce titre :
    Témoignage de Silvia Flavilla, comtesse d’Oritza,
    épouse de don Juan Tenorio.
    « Sur les plaies sacrées, je jure que ceci est la vérité pure. Si j’ai été la victime d’une machination de l’Esprit des Ténèbres, je supplie humblement les saints et Notre-Dame de venir à mon secours et de me délivrer. Si, au contraire, j’ai été choisie par quelque ange pour transmettre sa volonté, j’offre mes ferventes actions de grâces, aux saints, à Notre-Dame, et en particulier à Santa-Maria de Grenade.
    « C’est dans la soirée que la chose s’est passée. Je me souviens avoir entendu sonner neuf heures à la tour du Temple. Josefa, ma servante, venait de se retirer dans sa chambre, et moi, ayant achevé mes prières, j’étais assise dans le parloir près de la table sur laquelle était posé mon livre d’heures. J’étais assise, et j’ai eu alors la pensée d’écrire à mon cousin Veladar, le seul parent qui me reste sur terre. Je me suis donc levée, j’ai posé sur la table une feuille, une plume et un flacon d’encre. Puis j’ai repris ma place, bien résolue à écrire à mon cousin Veladar, bien qu’au fond de moi-même je fusse étonnée de ce besoin d’écrire à Veladar avec qui je n’ai jamais correspondu par lettres. Mais cette résolution s’est évanouie aussitôt. La seule pensée de prendre la plume m’est devenue insupportable, et je me suis mise à songer. Et tandis que je roulais dans ma tête les tristes pensées de douleur qui sont maintenant la seule vie de mon âme, j’ai senti que je pleurais, j’ai vu de grosses larmes tomber sur ce papier qui était près de moi, et j’écoutais le cri de mon pauvre cœur : Seigneur ! Dieu de miséricorde et d’amour ! Quand me rappellerez-vous ? Quand cesserai-je de vivre et de souffrir ? C’est la vérité. Je m’écoutais souffrir. Et, en même temps, à travers mes larmes, je regardais fixement le flambeau qui m’éclairait ; et c’est étrange : dans le temps même où j’étais attentive à ma douleur, je considérais avec curiosité la cire qui brûlait, et qui était tout près d’être entièrement consumée, et, en moi-même, je grondais Josefa de n’avoir point songé à renouveler cette cire. J’ai alors voulu me lever de nouveau pour prendre un autre flambeau, mais cela m’a été impossible, une torpeur m’a saisie, je suis restée en songeant ceci : « Voyons combien de minutes encore va-t-elle m’éclairer, Seigneur ! Si ma vie pouvait être comme cette cire prête à s’éteindre ! » Et je suis restée ainsi, écoutant le morne silence de la nuit, écoutant les plaintes de mon cœur, regardant cette flamme pâle, regardant se consumer mon âme. Car la cloche de la tour du Temple a sonné encore, cela m’a éveillée un peu de cette torpeur, et alors, c’est alors, je le jure sur les saints ! alors, j’ai eu à mon bras droit, à ma main droite, aux doigts de ma main droite cette sorte de fourmillement qu’on éprouve pour avoir gardé longtemps la même position… j’ai regardé mon bras, ma main, mes doigts, et j’ai éprouvé l’étonnement le plus violent de ma vie entière, car voici ce que j’ai vu…
    « Je tenais la plume dans mes doigts, et je ne me souvenais pas de l’avoir prise. Elle traçait des signes sur le papier, et je ne me souvenais pas de l’avoir trempée dans l’encre. Je dis que ma main, au moyen de la plume, traçait des signes, et elle n’obéissait aucunement à ma volonté. Non, non, je le jure : je n’avais nulle intention d’écrire, j’écrivais… Ce que j’ai éprouvé alors, ce fut de la surprise, et aussi une ardente curiosité, et presque une étrange envie de rire, à voir ma main, maladroitement, s’exercer à tracer des signes. Combien maladroite elle était, et combien hésitante ! Et tout à coup, j’ai senti la peur fondre sur moi. Oh ! j’ai eu peur, affreusement peur dans l’instant même où j’ai compris qu’une volonté étrangère à la mienne, une volonté d’un autre monde s’exerçait à diriger ma main ! Pourtant, je n’ai point essayé de résister. « Que la volonté
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