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Le rêve de Marigny

Le rêve de Marigny

Titel: Le rêve de Marigny
Autoren: Monique Demagny
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meublée de bancs afin que les spectateurs ne passent plus leur soirée debout.
    — Que de nouveautés ! Comment sont-elles accueillies ?
    — On crie déjà « au fou » !
    — Parlez-moi des comédiens. On m’a rapporté qu’ils auraient voulu d’autres architectes, qu’ils auraient dirigés à leur guise.
    — Ils se sont insurgés ! Mais monsieur d’Angiviller leur a fait savoir qu’ils seraient privés de leur pension s’ils contrecarraient le projet. Ils se sont calmés. Le Directeur a imposé Peyre et De Wailly, le choix qui était le vôtre quand vous avez lancé le projet en 1767.
    Marigny sourit. Il avait su détecter les talents, il avait lancé les projets, il n’avait pas œuvré pour rien.
    — Enfin, dit-il, Paris aura son théâtre italien.

    Le grand pèlerinage prévu par Cochin n’était pas terminé, la voiture passa la Seine, rejoignit la rive droite. La visite au Louvre s’imposait et là encore l’ombre de Soufflot hantait les lieux. Quand Marigny avait quitté les Bâtiments les travaux étaient interrompus, il avait dû la mort dans l’âme faire descendre les échafaudages qui étaient devenus un source de dangers. Ses dernières interventions avaient été pour démolir quelques baraques revenues investir les lieux et débarrasser la base de la colonne des immondices qu’on s’obstinait à y accumuler. Sous Terray il n’y avait jamais eu d’argent pour leLouvre, mais d’Angiviller avait vaillamment repris le flambeau et depuis l’année 1776 le Louvre était enfin couvert. On attendait ce miracle depuis Colbert. Le fronton de la colonnade n’était toujours pas sculpté mais il était dégagé. Quel chemin parcouru depuis l’instant où avec Soufflot il avait attaqué l’énorme chantier.

    Du Louvre les promeneurs nostalgiques passèrent tout naturellement devant le Tuileries. Ce fut Cochin qui sourit cette fois.
    — L’incendie !
    — Et l’affaire des piliers !
    — La salle sert toujours…
    — Il faut croire qu’on y voit quand même quelque chose.
    Puis, tout naturellement des jardins des Tuileries ils débouchèrent sur la place Louis-XV. Et là, vraiment Paris avait changé.
    — Rien n’avait été plus difficile à imaginer !
    — Mais quelle réussite, monsieur !
    Oui, c’était une belle place, et depuis presque vingt ans qu’elle faisait partie du décor on ne savait même plus se souvenir du terrain vague du Pont tournant. L’endroit avait peu à peu pris son identité, s’était façonné à mesure de ses aménagements et alors même que la place était encore en devenir, elle avait aujourd’hui belle allure. Les deux constructions prévues de part et d’autre de la nouvelle rue Royale étaient enfin sorties de terre. Le bâtiment de droite dont la construction avait commencé en 1768 abritait le Garde-meuble du roi comme il avait été prévu. La construction quilui faisait face, de l’autre côté de la rue Royale, n’avait pris sa place qu’en 1775. Le bâtiment destiné à l’origine à abriter l’hôtel des Monnaies avait finalement été vendu à un particulier. Aujourd’hui enfin la place Louis-XV avait pris son vrai visage, et elle forçait l’admiration. S’il y avait un endroit de Paris où un projet avait été mené à son terme, c’était bien là. Marigny avait besoin de voir tout cela pour ne pas s’enliser dans le deuil. Il avait tellement travaillé, tellement lutté contre vents et marées, on l’avait tellement empêché, qu’il avait parfois eu le sentiment de n’avoir rien pu réaliser. Il avait maintenant la vérité sous les yeux, il avait transformé Paris.

    Comment résister au désir de s’engager dans la rue Royale ? Quand on était au centre de la place Louis-XV la belle perspective de la rue y engageait. En bout de course, il y avait encore un chantier initié par Marigny. La nouvelle église de La Madeleine, qui se dresserait dans l’axe de la rue Royale, en était à ses premiers balbutiements. On creusait, on ne bâtissait pas encore. Contant d’Ivry à qui Marigny avait confié le projet s’apprêtait à élever là une superbe église sur un plan très classique de croix latine. Traditionnelle ? Non ! Surélevée d’un dôme. Les travaux commençaient tout juste quand l’architecte était mort en 1777. Le projet avait continué avec Guillaume Couture. Les choses étaient en bonne voie. On prévoyait un péristyle corinthien qui ne semblait plus choquer personne.
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