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Le porteur de mort

Le porteur de mort

Titel: Le porteur de mort
Autoren: Paul C. Doherty
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Mistleham. Lord Oliver les avait d’abord tolérés...
    — Pourquoi ?
    — Il avait à affronter maintes difficultés. Non seulement le Temple le menaçait, mais d’autres dangers surgissaient comme des catins d’une ruelle immonde. Il y eut de nouveaux messages anonymes, dans les mêmes termes que le précédent, mais un peu différents. Oui, c’est bien ça, déclara Édouard en se grattant le crâne : « Les moulins du Temple peuvent broyer très lentement et leur mouture être très fine, mais il en va de même des moulins de la colère de Dieu. »
    — D’où venaient-ils ?
    Édouard grimaça.
    — Scrope m’a rendu visite le dernier dimanche de l’Avent et m’a tout raconté, mais il ignorait qui le condamnait et pourquoi cette nouvelle menace s’était présentée.
    Le roi ouvrit et souleva le couvercle bosselé d’un coffre pillé qui se trouvait près de lui.
    — Pourtant, à cette date, une question avait été résolue. Les Frères du Libre Esprit avaient cessé d’être.
    — Plaît-il, Monseigneur ?
    Corbett se pencha. En décembre, il avait été occupé à Cantorbéry, mais, à son retour, il avait entendu sur l’Essex des histoires à faire frémir.
    — Lord Scrope, expliqua Édouard en fuyant le regard du clerc, est fervent défenseur de l’orthodoxie. Il se flatte d’avoir combattu en Terre sainte, d’avoir été croisé, d’être un chevalier lié par loyauté personnelle au Saint-Père. Rien de surprenant...
    Il eut un rire sec.
    — ... qu’il ait été protégé de ce côté-là. Vous savez, Corbett, les Frères du Libre Esprit étaient arrivés à Mistleham et s’étaient installés dans le village abandonné voisin, Mordern, qui a lui aussi une histoire sinistre. Une fois établis, ils se sont mêlés à la population locale. Au début, ils étaient davantage des sujets d’étonnement que d’alarme...
    Édouard se tut un instant.
    — ... jusqu’à ce que soudain Lord Scrope change d’avis. Il les a accusés de vol, de braconnage, de luxure et, plus grave, d’hérésie.
    — D’hérésie ?
    — Oui, d’hérésie. Lord Scrope est un croyant strict, encouragé en cela par son chapelain personnel, un dominicain nommé frère Gratian.
    Corbett se rencogna dans son siège et se détendit. Bien que cela lui déplût, il comprenait pourquoi il avait été convoqué ici. Les dominicains servaient d’enquêteurs à la papauté et ne relâchaient jamais leur vigilance contre l’hérésie.
    — Lord Scrope s’en prit aux Frères du Libre Esprit. Il rassembla ses troupes et attaqua les nouveaux venus qui s’étaient réfugiés dans l’église désaffectée de Mordern. Et il pendit sans autre forme de procès aux chênes environnants ceux qui survécurent, soupira Édouard.
    Corbett, se remémorant les récits d’un odieux massacre en Essex qui avaient couru dans les officines de la chancellerie à Westminster, fixa le souverain d’un oeil peu amène.
    — Lord Scrope prétend que c’étaient des hors-la-loi, des hérétiques, reprit ce dernier. Frère Gratian l’a soutenu, produisant des lettres et des écrits de son ministre général ainsi que de la curie papale en Avignon. Il affirme qu’il détient le mandat de Dieu pour éradiquer l’hérésie chaque fois qu’il la rencontre.
    — Depuis combien de temps ce Gratian est-il chez Lord Scrope ?
    — Dieu seul le sait ! rétorqua le monarque. En tout cas, il n’agit pas en mon nom.
    — Les Frères du Libre Esprit sont donc tous morts, n’est-ce pas ?
    — Oui, mais la situation est pire encore, car Scrope refuse de faire enterrer leurs cadavres. Ils gisent toujours à Mordern ou se balancent aux arbres. Scrope dit qu’il est juste qu’ils pourrissent là où ils sont morts en guise d’avertissement.
    — Vous pourriez dépêcher des envoyés.
    — Que nenni, répondit Édouard. D’une part, Lord Scrope est appuyé par notre sainte mère l’Église, d’autre part, les Lords et les Communes sont fort hostiles à ces groupes errants.
    — Et les bonnes gens de Mistleham ?
    — Encouragés par leur nouveau maire, Henry Claypole, ils n’étaient que trop disposés à assister Lord Scrope dans son assaut contre les Frères du Libre Esprit. Vous savez comment ça se passe, ajouta le roi avec amertume. C’est une ville de comté, une communauté qui se méfie des étrangers. Si un seau disparaissait, on en accusait les Frères du Libre Esprit. Si une femme était séduite, on les
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